Chapitre 1

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Chambre de Cynthia

Cynthia se réveilla comme chaque jour dans une pièce carrée avec deux fenêtres. L'une donnait sur un laboratoire, l'autre, teintée, empêchait de voir ce qu'il y avait de l'autre côté. Cette pièce, c'était sa chambre. Dans cette chambre il n'y avait pas grand-chose mis à part son lit, une lampe accrochée au plafond, une chaise et un bureau en bois entreposés dans un coin de la chambre, une étagère sur lequel il y avait quelques livres dont la majeure partie n'était plus de son âge.

Elle venait de faire un horrible cauchemar, comme ça lui arrivait souvent. Toujours le même cauchemar, dans lequel elle voyait la mort, la souffrance et la destruction.

Comme tous les jours, elle savait que quelqu'un n'allait pas tarder à venir la chercher. Une femme. Le docteur Kathleen Rathburn. Elle était spécialiste en psychologie et en parapsychisme. En tout cas c'est ce qu'elle avait cru comprendre. De plus, pourquoi cette Rathburn serait là si ça n'était pas le cas ? Depuis toute petite, c'était elle qui la suivait et qui lui avait fait passer d'innombrables tests dans le but d'évaluer ses capacités psychiques et paranormales et de les développer.

La porte de sa chambre s'ouvrit. C'était elle, Kathleen Rathburn. Une femme assez grande, les cheveux bruns. Elle était vêtue d'une blouse blanche et de chaussures à talon. Cynthia, se demandait comment est-ce que l'on pouvait marcher avec ce genre de chaussures. On lui donnait toujours des chaussures plates et aucune autre personne, ici, ne portait des chaussures réhaussantes.

La scientifique était accompagnée de six hommes, tous équipés d'un fusil chargé de fléchettes anti-parapsychique, cette drogue créée par Hal Damon à la fin des années 1980, qui empêchait les paranormaux de se concentrer suffisamment pour faire usage de leurs dons. Cynthia les observa un moment et vit qu'ils avaient tous leur index posé sur la gâchette, prêts à lui tirer dessus en cas de besoin. Ce qui n'était pour le moment jamais arrivé. Cynthia leur adressa un petit sourire. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle aimait voir les hommes de la sécurité la craindre plus que tout. C'était sa façon à elle de les narguer. Kathleen se détacha du petit groupe de gardes et s'avança vers la fillette.

— Cynthia, tu viens ma chérie. On va commencer...

« Commencer ? Continuer plutôt... et je ne suis pas ta chérie » pensa Cynthia.

— Je ne t'appellerai plus ma chérie si tu veux. Et puis tu sais bien que l'on effectue ces tests pour ton bien.

Comment Rathburn avait-elle pu répondre à ce qu'avait pensé Cynthia ? Tout simplement parce qu'elle lui avait dit... par la pensée. Cynthia était une puissante télépathe. La télépathie faisait partie de ses nombreuses facultés parapsychiques. Certaines étaient inoffensives tout en restants tout de même très spectaculaires. D'autres en revanche avaient un potentiel de destruction énorme. Voilà entre-autre pourquoi on l'avait enfermée dans ce complexe. Même si elle ne maîtrisait pas encore ses capacités offensives.

Son père, qui dirigeait les recherches, avait peur de la laisser libre, peur de la faire sortir au risque qu'elle s'en prenne à la population. Mais comment lui expliquer ça ? Plutôt que de lui dire toute la vérité, il avait dû lui raconter n'importe quoi... lui raconter que dehors, c'était un véritable enfer, que sortir était dangereux pour elle, que des gens s'en prendraient à elle, qu'ils la tueraient. Ce dernier point était sans doute vrai. Même si sur Exotis, rares étaient ceux qui croyaient vraiment en l'existence du paranormal, même si beaucoup affirmaient avoir déjà assisté au moins une fois dans leur vie à un phénomène étrange.

« On fait toujours les mêmes tests ».

— Pour voir l'évolution de tes capacités, répondit Rathburn. D'ailleurs, tu arrives de mieux en mieux à te contrôler. C'est très bien. C'est pourquoi nous allons, aujourd'hui commencer quelque chose de nouveau.

«Et ensuite, je pourrais sortir ?»

— Comme d'habitude, si tu souhaites te rendre aux jardins...

"Non pas dans les jardins. Dehors. Hors du Refuge ?"

— Je te l'ai déjà dis. C'est non. Ton père ne veut pas... Et puis ça n'est pas une question de te maîtriser ou pas Cynthia. On te l'a déjà expliqué de nombreuses fois, c'est trop dangereux.

Cynthia lança un regard menaçant à son interlocutrice. « La plupart ne veut pas dire tous et quasiment ne veut pas dire tout » pensa-t-elle, cette fois-ci pour elle-même.

— Alors, tu vas venir ? lui demanda Rathburn en lui tendant la main ? S'il te plait...

— D'accord... j'arrive.

***

Rathburn conduit Cynthia dans une petite salle semblable à une salle d'interrogatoire. Dans cette salle se trouvaient quatre gardes. Un dans chaque coin. Après quoi elle en ressortit pour accueillir son patron, Hal Damon qui venait d'arriver.

— Comment va-t-elle ? demanda ce dernier.

— Bien. Elle semble en pleine forme. Mais elle a accepté de reprendre les tests sans le moindre enthousiasme. Elle... Elle a de plus en plus envie de voir ce qui se trouve hors du complexe.

— Je sais, répondit Hal. Mais elle doit comprendre que nous la gardons ici pour sa propre sécurité... et... pour celle des autres. Je vais aller la voir. Après quoi vous pourrez commencer le test.

Hal entra dans la pièce. Lorsqu'elle vit qui venait d'entrer, Cynthia éclata de joie.

— Papa ! Cria-t-elle en se précipitant vers Hal.

Les gardes hésitèrent à se tenir prêts à tirer. Hal leur fit signe que c'était inutile, qu'elle ne tenterait rien contre lui.

Le PDG de Rising Drake n'était pas toujours présent pour sa fille. Il devait jongler entre ce complexe, le siège de Rising Drake et son fils, Tobias qui était dans l'année de sa majorité et qui ignorait qu'il avait une sœur. Cynthia ignorait elle aussi qu'elle avait un frère. Et puis, il prenait régulièrement des nouvelles de Leslie Longbriand, la fille de l'une de ses amies utopiennes, Olympe avec qui il avait combattu vingt ans avant. Celle-ci avait eu une fille avec un puissant paranormal devenu dangereux. Ayant peur pour sa fille, Olympe la lui avait confié. Ne pouvant pas s'en occuper, il avait décidé de la confier à l'un de ses employés qui souhaitait adopter un enfant.

— Cynthia, lui répondit Hal en la prenant dans ses bras. Ma chérie. Tout va bien ?

— Oui... je... non. Je fais toujours ce cauchemar.

— Toutes les nuits ?

— Non. Mais à chaque fois que je fais un cauchemar, c'est presque toujours le même.

Hal hocha la tête.

— D'accord. On verra ça plus tard tu veux bien ? Pour l'instant, le docteur Rathburn t'a préparé un nouveau test. Tu te souviens il y a quelques jours, lorsque tu as réussi à sentir la présence des gardes à côté de ta chambre ?

— Oui, répondit la petite fille d'un air las.

— On veut savoir jusqu'où tu arrives à ressentir la présence des gens.

— Mais je sais pas... Je sais pas comment je fais...

— On ne cherche pas à savoir comment tu fais ma chérie. On cherche juste à connaître l'étendue de ce don.

"Pourquoi j'ai l'impression d'être quelque chose de bizarre ?" demanda Cynthia par télépathie.

— Tu ne l'es pas. Tu es quelqu'un de formidable. Quelqu'un d'unique en ton genre. Et tout ces tests servent à faire de toi la meilleure version de toi même. Tu comprends ?

— Oui.

— Alors... Tu veux bien faire ce test ?

La jeune fille hocha la tête avant d'ajouter, par télépathie, "De toute façon... je n'ai pas vraiment le choix".

Hal s'abaissa pour être à la hauteur de sa fille puis posa ses mains sur ses épaules.

— Plus tard... lorsque tu seras grande, tu auras des décisions à prendre. On veut être sûr que tu sois en mesure de prendre les bonnes décisions. C'est aussi pour ça qu'on fait tous ces tests. Pour t'apprendre à te maîtriser.

Cynthia resta sans réponse.

— Je t'aime, reprit son père.

— Je t'aime aussi papa.

Hal, ou "le Dragon" comme certains aimaient l'appeler, se releva et quitta la pièce pour retrouver Kathleen qui avait été rejoint par le chef de la sécurité, un homme de taille moyenne, blanc, chauve, avec un regard très sérieux, toujours sur ses gardes.

— Monsieur Damon, fit ce dernier.

— Monsieur Ross.

— Mes hommes sont en place.

— Parfait, répondit Hal avant de se tourner vers le docteur Rathburn. Vous pouvez aller lui expliquer le test. Elle le fera.

— J'en suis ravie, fit Rathburn avant de rejoindre Cynthia.

Le test allait se dérouler dans une immense salle où la petite fille avait l'habitude de tester l'étendue de ses pouvoirs. À chaque test, le hangar était aménagé avec divers obstacles ou objets à déplacer, selon les objectifs de l'exercice. Pour celui-ci, un couloir avait été constitué, avec des portes. De chaque côtés du couloir, il y en avait seize. Soit trente deux portes au total. Derrière certaines portes se trouvaient des hommes de la sécurité. Cynthia n'avait aucune information sur leur nombre et leur localisation. C'était là son objectif. Trouver combien ils étaient et derrière quelle portes ils se cachaient.

— Cynthia, tu peux me suivre s'il te plait ?

La petite fille suivit le docteur jusqu'à l'entrée du couloir.

— Tu vois ce couloir ? Demanda Rathburn. Derrière certaines de ses portes se trouvent des personnes. Je voudrais que tu essaies de ressentir leur présence pour savoir combien ils sont. Puis tu vas avancer ouvrir les portes derrière lesquelles tu penses qu'il y a quelqu'un. Tu as compris ?

Cynthia acquiesça, puis le docteur l'invita à commencer le test avant de rejoindre Hal.

De son côté, Cynthia se plaça à l'entrée du couloir et se concentra quelques secondes. Elle ressentait la présence des gardes. Pour elle, ils étaient sept. Sans qu'elle ne sache se l'expliquer, elle savait où ils étaient. Elle n'avait même pas besoin d'avancer dans ce couloir. Elle se contenta d'ouvrir par la pensée, les portes derrière lesquelles se trouvaient les gardes. Elle réalisa un sans fautes. Derrière chaque porte ouverte se trouvait effectivement un garde.

Dans la salle de contrôle, son père et le docteur Rathburn étaient époustouflés.

— Elle... Elle n'a même pas avancé, fit Kathleen.

— Elle progresse vite. Très vite. Elle est très puissante pour une Paranormale de dix ans, lui répondit Hal avec un soupçon de crainte. La portée de ce don dépasse donc celle du hangar.

— Mais jusqu'où ?

— J'en sais rien. Pas très loin j'espère... Sinon, elle risquerait de savoir, pour dehors.

— Et si elle sait ?

— Si elle le découvre trop tôt... Alors notre projet sera compromis et le monde entier serait en danger.

Hal craignait que sa fille ne sache pas contrôler ses pouvoirs, qu'elle ne sache pas en faire bon usage. Il avait beau se le cacher, elle lui faisait penser à un autre Paranormal qu'il avait rencontré sur Utopia, le père de Leslie. Un Paranormal aux côtés de qui, il avait combattu et qui avait fini par basculer du mauvais côté, se sentant supérieur aux autres. Il ne voulait pas que sa fille prenne le même chemin.

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