LA MAISON AU BOUT DU CHEMIN (2/3)

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Pressé par la venue du crépuscule, Marcus commençait à revoir ses principes, notamment celui d'éviter à tout prix de jouer les envahisseurs, au risque de se prendre un coup de fusil ou de finir en garde à vue. D'autant plus que les nuages massifs, emportés par le vent, promettaient d'abondantes pluies.

D'un pas décidé, il se hâta de rejoindre la bâtisse isolée en bout de chemin. Ni mur ni grille autour pour empêcher tout intrus d'en fouler le terrain. Prudent comme à son habitude, Marcus progressa en direction de la porte d'entrée. Le verre de toutes les fenêtres visibles était fissuré en plusieurs toiles d'araignée qui se chevauchaient, trahissant de probables jets de pierre, mais pas un morceau ne manquait. Les murs, quand à eux, paraissaient couverts de suie. La végétation s'arrêtaient net au pied de chaque pan, subitement carbonisée. Marcus se dit que, peut-être, d'autres squatteurs prenaient au moins la peine de contrôler la végétation, bien qu'avec des méthodes radicales.

— Pourquoi ce bonhomme m'a pas parlé de cette bicoque ? Ça peut pas être pire que cette caravane, quand même.

Quoi qu'il en soit, ce n'était pas une poignée d'araignées et de rongeurs qui arrêteraient Marcus, surtout s'il s'agissait des seuls occupants de ce refuge inespéré. Au moins, pas de rossée ni de pillage en règle avec eux.

Marcus monta deux marches, manqua de glisser sur les lames verdies de l'entrée et saisit la poignée de porte, chaude, à la limite du brûlant.

— Tiens, c'est bizarre.

Porte verrouillée.

Jouer de l'épaule contre l'obstacle n'apporta rien de plus. Marcus essuya de la main les restes de peinture écaillée et de suie sur sa veste puis tenta une première inspection de l'intérieur, au niveau de la fenêtre de droite. En dépit de l'état du verre, il put constater un grand vide dans la pièce. Même pas une cannette par terre. Rien du tout sinon le plancher. Marcus leva un sourcil.

Ce dernier décida alors de faire le tour du propriétaire, en quête d'une ouverture qui lui épargnerait un bris de fenêtre plus poussé. Pommiers, pruniers et mirabelliers poussaient aux quatre coins de l'habitation. Marcus en salivait d'avance. Dommage qu'il fût encore trop tôt dans la saison pour croquer dans leurs fruits.

L'exploration se solda par un résultat peu probant. Une porte arrière, elle aussi verrouillée, donnant sur un potager en jachère probablement depuis bien longtemps ; beaucoup de cendre éparpillée un peu partout ; un amas de grillage ; d'autres fenêtres brisées, mais sans le moindre orifice, toutes laissant entrevoir des pièces parfaitement vides et, a priori, propres et sombres. Une aubaine pour un sans-abri.

— Je crois que j'ai pas vraiment le choix.

La conscience aux oubliettes, Marcus ramassa une des briques qui contourait le potager et la projeta dans la fenêtre arrière, la plus à l'abri des regards, puisqu'en face un champ s'étalait sur plusieurs hectares. Le projectile retomba par terre. Les deuxième et troisième tentatives n'apportèrent que des fissures supplémentaires.

— Mais qu'est-ce que c'est que ce verre ?

Quelqu'un toqua alors à la porte d'entrée. Marcus s'agenouilla aussitôt, en appui contre le mur, et ne fit plus aucun bruit. Les minutes passèrent, amenant avec elles les premières gouttes de pluie. Les coups ne cessaient pas. Toujours par trois ou quatre. Réguliers tant dans leurs séquences que dans l'intervalle qui séparaient ces dernières. Comme en boucle.

Marcus n'avait pas l'intention d'abandonner tout de suite. En réalité, ces heurts avaient piqué sa curiosité. Il rasa les murs jusqu'à atteindre l'angle suivant, position depuis laquelle il jeta un œil au niveau de l'entrée. Personne.

— Ça vient de l'intérieur apparemment, murmura-t-il.

La fenêtre derrière lui offrait un angle de vue sur la face intérieure de la porte. Un grincement survint alors. Celui de cette même porte que Marcus vit alors s'ouvrir lentement, tirée par une fine silhouette féminine.

Celui-ci demeura figée, hésita. Puis entendit une voix de femme âgée, calme et chevrotante :

— Je sais que vous êtes là. Allez, entrez.

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