Chapitre 4 : Une virée avec Grand-Ma (Partie 3 : Souvenirs chez Tante Beth).
Le paysage baigné de lumière, contrastait avec les jours précédents, Mike se sentait le cœur léger, les idées claires, prêt à relever les défis à venir. Karl, comme Harrold la veille, lui avaient transmis une toute nouvelle énergie.
– Tu as l’air heureux, Miky, souligna Grandma.
– Serein avant tout.
– Les enfants ont ce pouvoir. Ils nous obligent à donner le meilleur de nous-mêmes.
- Mommy, est-ce que maman te manque ? demanda-t-il avec douceur.
– Oui, et Déborah m’a fait penser à ces moments que nous partagions, quand petite elle m’accompagnait pour peindre les levers de soleil. Pourquoi me demandes-tu cela ?
– Les images de l’accident ont ressurgi, et parfois je me demande comment tu fais pour toujours rendre les choses si faciles ?
– Je le fais pour toi, parce que tu as besoin de moi et moi de toi.
Mike ne sut quoi répondre, l’émotion lui prit la gorge. Pourquoi, justement cette semaine, les souvenirs de ses parents revenaient-ils sans cesse ? Pourquoi ressentait-il ce besoin d’être rassuré ? L’un comme l’autre restèrent un long moment silencieux, plongés dans leurs pensées. Après une heure et demie de route, Mike se gara dans la cour de la ferme. Hugh s’agitait à l’arrière, il trépignait. Son plaisir, gambader dans la lande au milieu des moutons. À peine descendu de la voiture, Mike prit Olivia dans ses bras, la serrant fort. Il avait besoin d’être réconforté pour retrouver la sérénité de ce début de matinée.
– Est-ce qu’on pourra encore me parler de mes parents ? demanda-t-il avec une pointe de nostalgie dans la voix.
– Miky, j’en serai ravie.
– Juste une ou deux anecdotes, pas plus, pour ne pas oublier.
– Avec Beth, nous en avons plein, et tu la connais, elle adore raconter des histoires. Je pense que cela lui fera aussi du bien.
Olivia finit tout juste sa phrase, que Beth apparut avec son panier.
– Je ne vous attendais pas si tôt, dit-elle heureuse de les voir. C’est très bien, Mike accompagne-moi au poulailler s’il te plait.
Beth et Mike partirent bras dessus bras dessous, Hugh était déjà au milieu des boules de laine, nullement surprises par sa présence. Un quart d’heure après, Mike entrait avec son panier rempli d’une douzaine d’œufs. Olivia, songeuse, était installée devant la cheminée.
– Tout va bien Grand-Ma ? demanda-t-il inquiet.
– Oui,rassure-toi, répondit-elle avec un sourire tendre. Je vous attendais. Les poules ont été généreuses ?
– Nous allons pouvoir faire notre omelette, comme quand nous étions petites et que nous les préparions avec maman, ajouta Beth avec enthousiasme.
Les deux sœurs se mirent à l’ouvrage. Autour du plan de travail, elles cuisinaient et échangeaient des souvenirs d’enfance. Mike les écoutait avec attention. Voir leurs yeux pétillants de joie était source de bonheur partagé.
– Mike, tu peux mettre la table ?
– J’y vais.
– Tu te souviens Olivia, c’était toujours « Pa » qui mettait le couvert et faisait la vaisselle.
– Il disait qu’il n’y avait pas de raison que maman fasse toutes les tâches ménagères.
– Il était avant-gardiste, s’amusa Mike.
– Il était surtout très amoureux, souligna Grandma.
– Et mon papa, il était comment ? interrogea Mike.
– Tout aussi amoureux, s’empressa de dire Beth.
– C’était avant tout un jeune homme attentionné, précisa Olivia.
– Tu te souviens la fois où, pour leur anniversaire de mariage, il avait tout organisé pour faire une surprise à Julia en lui offrant un voyage à New York.
– C’est Joseph qui avait été le plus décontenancé. Ton papa, Jerry, lui avait demandé de l’aider dans son entreprise, ajouta Olivia.
– Dites-moi, j’ai envie de tout savoir.
Les deux femmes s’empressèrent de lui conter l’histoire, n’omettant aucun détail. Prises de plusieurs fous rires, elles durent faire des pauses, pour reprendre leur souffle. Mike, assis face à elles, savourait l’omelette et se délectait des anecdotes. Le repas se poursuivit autour de discussions rythmées et agréables. Mike plongeait dans un passé qu’il n’avait pas connu, et qui lui semblait pourtant si familier. Beth arriva avec sa fameuse tarte au caramel écossais, crème fouettée et noix de cajou. Tout en la posant sur la table, elle dit à Mike :
– Tout comme toi, ton papa, ton grand-père et ton grand-oncle en étaient friands.
– Normal, elle est tellement bonne.
Olivia ajouta en prenant son morceau :
– Tu te souviens de la fois où ils ont joué la dernière part de tarte aux fléchettes. La partie avait duré jusqu’à la soupe.
– Et qui a gagné ? questionna Mike.
– Grammy !
– Comment ça, la chienne de Grand-Pa ! s’étonna Mike.
– Oui, elle était couchée au pied de la table lorsque tout est tombé.
– Et elle l’a engloutie, compléta Olivia en souriant.
– Comment est-elle tombée ? demanda Mike.
– À cause d’un petit garçon !
– Mon oncle Tom ? interrogea Mike.
Olivia et Beth le regardèrent et répondirent à l’unisson.
– Non, toi !
– Tu étais assis sur les genoux de Tom, vous jouiez : À dada sur mon bidet
Quand il trotte il est trop laid, commença Olivia
– Au galop, il est trop beau Au pas, au pas, au pas, Au trot, au trot, au trot
Au galop, au galop, au galop, au galop, poursuivit Mike.
– Tu as voulu attraper ton lapin Jamy et tu as heurté l’assiette, ajouta Beth.
Les deux sœurs éclatèrent de rire en se remémorant la scène.
– Julia s’était précipitée en entendant le bruit. En te découvrant assis à côté de ta peluche, elle fut rassurée de te voir rigoler. Grammy quant à elle léchait les dernières miettes au sol et Joseph se bidonnait, conclut Beth.
Après le repas et une fois tout remis en ordre, la petite troupe se mit en route. Mike prit la place du conducteur, Beth s’installa à côté de lui, et Olivia se glissa sur le siège arrière, rejointe par Hugh.
– Tu te rappelles Olivia, c’était toujours le papa de Mike qui nous conduisait.
– Oui tout à fait, Joseph et Tom avaient abandonné l’idée de l’emmener avec eux à la pêche.
– Pourquoi ? s’empressa de demander Mike.
– Oh, tout simplement, parce que la seule fois où ils ont tenté l’expérience, Jerry avait vomi toute la matinée, on va dire qu’il n’avait pas le pied marin.
– Je comprends mieux, ajouta Mike.
– Du coup, pendant que ces messieurs partaient en mer, Jerry avec gentillesse nous conduisait là où nous voulions.
– Olivia, je me demande encore aujourd’hui si nous n'en avons pas abusé.
– Rassure-toi, Jerry m’a toujours dit qu’il était ravi de venir avec nous à la découverte de l’histoire et l’architecture de l’île.
– Et maman, elle venait aussi ? interrogea Mike.
– Non, elle préférait partir sur l’eau. Elle aimait le vent du large et pêcher avec son père.
– Avec qui est-ce que j'ai passé du temps enfant ? demanda Mike.
– Au début, ton papa, dit Olivia.
– Pourquoi ?
– Il pensait que cela était plus prudent, et puis il était tellement fier de pouvoir profiter de toi.
– Très rapidement avec ta maman, ajouta Beth. Joseph et Julia t’ont fait découvrir la mer et là tu étais à ton affaire.
– Je me souviens de tes premiers pas, tu les as faits lors d’une balade sur la plage de Gary Beach. Ton papa s’était mis au bout du pont pour te permettre d’avancer.
– Et maman n’était pas là ?
– Non, en mer.
– Ni une ni deux, nous sommes remontés tous les quatre en voiture et pris la direction du port de Stornoway pour arriver avant qu’ils ne rentrent de leur virée. Jerry est monté sur la passerelle en te tenant par la main. Puis il t’a lâché. Tu as fait tes premiers pas en mer ce jour-là.
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