Chapitre 7 : Une nuit mouvementée -Partie 5 : tous au front.   (nouvelle version)

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– Que se passe-t-il ? interrogea Céléna. Pourquoi autant d’agitation ?

– Ne bougez pas de là, je vais voir où en sont les hommes, lança Anna avant de sortir du camion.

– Attends-moi Anna, je viens avec toi, ajouta Céléna se précipitant derrière elle.

Anna acquiesça, elle savait qu’il serait vain de la convaincre de rester, et le temps pressait. Elles confièrent Harold au jeune pompier avec pour seule consigne, de ne pas le laisser sortir. Puis, les deux femmes disparurent. Dehors le feu redoublait, les flammes encerclaient la distillerie. La scène, apocalyptique, ne présageait rien de bon.

– Anna, nous devons sortir ton père et Grégor de là, avant qu’il ne soit trop tard, cria Céléna.

– Je sais, viens avec moi, enfile cette combinaison, suggéra Anna. Ton père m’en voudrait s’il t’arrivait quoi que ce soit.

– Je me souviens, lorsque j’étais petite, je m’amusais à les espionner dans la distillerie, pour ne pas me faire prendre. Je prenais un chemin qui se trouve à l’arrière. Peut-être que le camion pourrait l’emprunter ?

– Suis-moi, nous allons dire deux mots au capitaine.

Les deux femmes filèrent en direction du poste de commandement, les pompiers s’affairaient dans tous les sens, des ordres fusaient avec précision dans le chaos. Les fumées, de plus en plus denses, rendirent l’air irrespirable.

– John, où se trouve le capitaine ? interpella Anna.

– Je suis là, que faites-vous ici ? C’est dangereux.

– Je m’inquiète pour mon père, dit Anna en montrant le feu qui prenait de plus en plus d’ampleur, il est derrière le brasier.

– Nous faisons de notre mieux, soupira-t-il. J’ai appelé du renfort, un troisième camion est en route. Il faudrait que nous puissions avoir un accès pour atteindre l’arrière du bâtiment pour affronter le feu sur tous les côtés. En plus, la rivière menace de déborder à tout moment, coupant l’accès à tout autre véhicule. Nous devons faire au plus vite.

Céléna avança et proposa :

– Je connais un sentier qui mène à la cave. Nos ancêtres utilisaient ce chemin pour évacuer les surplus de tonneaux à l’époque où le whisky était taxé. Si je me souviens bien, on peut le rejoindre par dessus. Mais cela fait longtemps que je n’y suis pas allée. Peut-être est-il impraticable ?

– Anna pars avec Céléna, à la rencontre du camion qui fait route et voit si c'est envisageable. J’ai bien peur qu’il s’agisse là de notre dernière option pour sauver la distillerie.

Anna attrapa Céléna par la main et elles coururent en direction de l’entrée de la propriété. Au passage, elles interceptèrent le véhicule et montèrent à l’abri tout en expliquant la situation. Arrivées à hauteur du sentier en question, les choses se compliquèrent, un arbre gisait de son long en travers de la route.

Après une dizaine de minutes, le treuil leur permit de dégager le chemin et ils purent continuer leur progression. L’engin avançait doucement pour ne pas s’embourber afin de ne prendre aucun risque qui mettrait fin à tous leurs espoirs.

De là où ils se trouvaient, la distillerie était à une centaine de mètres tout au plus et semblait être peu de choses devant le rideau de flammes dévorant tout. Anna et Céléna échangèrent un regard, on pouvait y lire la même angoisse. Max le chauffeur essayait tant bien que mal de les rassurer.

Il stoppa le camion, ses deux collègues avaient pris les devants déroulant les lances qu’ils avaient à leur disposition. Anna et Céléna vinrent à leur tour leur donner un coup de main, elles ne pouvaient pas rester sans rien faire. Alors que tous œuvraient du mieux qu’ils pouvaient, ils entendirent des cris venir de leur gauche.

– Par ici, nous sommes là, lança une voix qu’elles reconnurent aussitôt.

– Grégor, ne bougez pas, nous arrivons, dit Céléna.

– Rory est avec toi ? hurla Anna.

– Oui, nous allons bien. Nous nous sommes mis à l’abri.

Max et les deux pompiers qui l’accompagnaient créèrent une brèche pour accéder au bâtiment principal. Les uns derrière les autres, ils avançaient. Il fallait rester prudent et ne surtout pas se laisser avaler par la colonne de feu qui était sur leur droite.

Si celle-ci venait à se rapprocher, leur seule option serait la rivière en contre bas, mais celle-ci n’était pas plus accueillante, bouillonnante après les fortes pluies de la soirée. Anna et Céléna, restées à l’arrière, servaient de relais entre les deux escadrons.

Une demi-heure plus tard, épuisés, les traits tirés, leurs visages couleur suie, et quelques brûlures sur les bras, Rory et Grégor apparurent se soutenant l’un l’autre

Ils s’assirent à l’arrière du camion, Anna les prit immédiatement en charge aidée de Céléna reconvertie en infirmière. Tous regardaient au loin les pompiers. Les hommes combattaient le monstre, ne relâchant pas leurs efforts, prêt à tout pour sauver ce lieu historique.

Céléna, par le biais des radios, s’empressa de donner des nouvelles à son père. De son côté, Harold allait bien et fut soulagé de savoir ses amis sains et saufs. Anna, assise à côté de son père, se serrait contre lui.

– Merci à vous deux de vous être battus pour sauver la distillerie, dit Céléna, soulagée. Enfin s’il vous était arrivé quoi que ce soit, je vous en aurai voulu pour toujours, parce que vos vies sont bien plus précieuses que tout.

– Au fait Céléna, comment connaissais-tu ce sentier ? demanda Rory pour détendre l’atmosphère.

– Je l’ai découvert un jour que je venais vous voir travailler sans que vous ne le sachiez.

Après plus de deux heures d’efforts, l’arrivée d’un quatrième camion et le retour de la pluie, le feu fut stoppé, de toute façon il n’y avait plus grand-chose à brûler dans le secteur.

Céléna avait rejoint son père. Il était assis avec Isabel. Avec son bandage sur la tête, il ressemblait à un corsaire. Tous les trois, ils observaient les pompiers ranger leur matériel. Anna raccompagna son père après s’être assurée que tout allait bien pour Harold. Elle le savait dans de bonnes mains avec Isabel et Céléna. Elle était aussi rassurée, la distillerie était sauvée. Ses collègues avaient assuré.

La brume se levait, dévoilant les restes de l’incendie. La lumière du jour éclairait le parc malmené, la nuit avait été interminable, éprouvante, le réveil était bien plus douloureux. Les murs de la distillerie étaient à nus. Le lierre avait fondu, les parterres de fleurs qui agrémentaient les allées n’étaient que des tas de cendres. Le ciel bleu contrastait avec le gris qui leur faisait face.

Céléna se tourna vers ses parents, Isabel serrait fort la main de son mari, elle savait ce que cela représentait pour eux. Tout en les regardant, en souriant, elle leur dit :

– La vie est précieuse, tous ceux que nous aimons s’en sont sortis et c’est là l'essentiel. La distillerie renaitra encore plus belle.

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