Elle y était enfin. Après plusieurs jours de trajet qui lui avaient semblé interminables, à être ballottée par les mouvements incessants du train, bercée par les bruits des machines ainsi que les voix qui semblaient ne jamais se taire, elle remettait enfin les pieds sur la terre ferme. Elle resta devant les quelques marches qu'elle avait dû descendre pour sortir du train quelques secondes pour profiter de la bouffée d'air frais qu'elle put prendre, la première qui n'était pas chargée de cette odeur de fumée et de renfermé, elle avait l'impression que ses poumons étaient entrain de renaître. Heureusement que la gare où elle était montée faisait partie des derniers arrêts avant le lycée, elle n'aurait certainement pas tenue plus de temps dans cet endroit. La jeune fille était d'ailleurs restée dans son box pendant tout le trajet en ignorant toute personne qui avaient choisies de dormir dans le même, elle n'avait pas eu envie de faire connaissance, surtout après les mauvaises rencontre qu'elle avait pu faire, notamment les deux garçons du premier jour. Elle ne les avait pas recroisés depuis et elle espérait que les choses restent ainsi.

  Même si elle était descendue du train dans les dernières, son box se trouvant dans ceux au fond du wagon, elle avait dû attendre que le troupeau d'élèves qui se trouvaient dans le même daignent descendre, il y avait encore quelques retardataires qui attendaient de pouvoir descendre. Ils perdirent vite patiente et l'un d'entre eux bouscula Elly qui sortit alors de ses pensées en lui adressant un regard noir. Cependant, le jeune homme ne s'était même pas tourné vers elle et avait continué son chemin jusqu'à être engloutit par la foule d'élèves. Elle était sur le point de l'appeler, ou en tous cas de tenter de l'interpeller, quand un grand silence s'abattu sur la foule. Il devait forcément y avoir quelque chose, parce qu'en général, quand il y avait un attroupement d'adolescents, peu de choses réussissaient à tous les faire taire, au grand malheur d'Elly qui se retrouvait par conséquent souvent avec des migraines épouvantables, elle ne comprenait comment il était possible d'être aussi bruyant. Comme ils semblaient tous regarder dans la même direction, elle suivit le regard de l'un d'entre eux pour essayer de comprendre ce qu'il se passait.

Elle faillit se retrouver bouche-bée elle aussi quand son regard tomba sur une personne, qui était certainement un homme au vu de la carrure, vêtu d'une cape qui ne permettait pas de distinguer son visage caché dans l'ombre et qui lui tombait jusqu'aux pieds. Cette personne avait réussis, par sa simple présence, à instaurer un silence pesant, et tout le monde attendait qu'elle prononce un mot, mais il fallut plusieurs minutes d'attente avant qu'elle ne se décide à descendre du banc où elle s'était perchée pour enfin prendre la parole. En effet, c'était bel et bien une voix d'homme, grave, qui imposait le respect, elle songea qu'il s'agissait peut-être du directeur de l'école.

  « - Bien le bonjour, ou devrais-je dire bonsoir, chers élèves, professeurs, et surveillants. J'espère que le voyage vous aura été agréable, malgré sa durée qui est, je vous le concède, plutôt longue. Cependant, ce n'est pas n'importe qui qui a la possibilité d'étudier à Darkmoon, j'espère que vous prenez conscience de la chance que cette école vous offre et que vous ne vous arrêterez pas à vos premières impressions. Je continuerais mon discours une fois que nous serons arrivés à l'école, il serait fort dommage de devoir marcher dans la nuit complète.

  - Hein ? Mais je croyais qu'on était déjà arrivés à l'école ! Il faut marcher en plus ? Dites-moi que c'est une blague, en portant nos affaires, je présume ? »

  La personne qui venait de prendre la parole était un garçon, qui était plus jeune qu'elle de quelques années, il devait donc avoir aux alentours des 15 ans, selon sa supposition, et au vu des expressions dépités qu'affichaient certains de ses futurs camarades, il était le seul à avoir, semblait-il, eut le courage, ou la bêtise selon le point de vue que l'on avait, d'exprimer à voix haute ce que tout le monde pensait. Les chuchotements avaient repris suite à cette annonce, les voix étaient tantôt indignées qu'une école qui semblait si prestigieuse les oblige à marcher, d'autres étaient simplement fatigués à la simple idée de faire un effort, et d'autres, comme Elly, n'en avait rien à faire. Après tout, un peu de marche ne pourrait faire de mal à personne, surtout que la plupart ici ne semblaient pas être très sportifs. Elle n'empêcha cependant pas un sourire de se former sur ses lèvres en remarquant qu'une partie des élèves n'avaient pas opté, au contraire d'elle-même, pour un sac à dos compact, mais bien pour plusieurs valises, certains semblaient même avoir déménagé l'entièreté de leur maison. Ces personnes-là allaient, en effet, avoir du mal à marcher selon la distance à parcourir. Il y eut ensuite de nouveau le silence, et la voix grave de l'homme encapuchonné qui s'élevait pour répondre aux interrogations muettes des élèves.

  « - Il y a un peu moins de deux kilomètres de marche. En ce qui concerne vos affaires, ce n'est pas mon problème, mais le vôtre : vous n'aviez qu'à en prendre moins, retenez ça pour la prochaine fois. Maintenant, deux options s'offrent à vous tous. Soit vous marchez en silence jusqu'à l'établissement, soit vous restez dehors. La décision n'appartient qu'à vous. »

  C'est sans attendre une quelconque réponse suite à ses paroles que l'homme emprunta un sentier qui s'enfonçait dans la forêt s'étendant à perte de vue, semblait-il, derrière la gare où ils venaient d'arriver. Il n'y eut plus un mot, pas un seul chuchotement indigné, personne n'osait parler après qu'on leur ait clairement dit qu'ils avaient le choix entre marcher ou crever, juste des élèves qui empruntèrent le même chemin que l'homme, quoiqu'Elly vit sur le visage de certains qu'ils semblaient méfiants. Il se trouvait qu'elle l'était aussi au vu des conditions, mais ne voyant pas ce qui pourrait arriver de mal, elle n'en était pas non plus arrivé au stade de l'angoisse réelle, juste quelques appréhensions qui lui trottaient dans la tête, cela était cependant normal : nouvelle école, nouvelle vie, même sans les conditions étranges n'importe qui serait dans le même état qu'elle. Elle passa donc avec un sourire narquois sur les lèvres devant des élèves qui peinaient à tirer leurs valises, ou à les porter, vers le chemin de terre pour l'emprunter à son tour.

  Elle ne sait depuis combien de temps ils marchaient puisqu'elle était trop subjuguée par le paysage qui l'entourait pour se concentrer sur leur marche, elle était dans sa bulle, comme souvent. Son œil d'artiste en herbe scrutait les arbres qui dressaient leur ombre menaçante sur les élèves, dans la nuit, ils ne représentaient plus la vie, ils n'étaient plus majestueux, non, ils dévoilaient une tout autre facette, plus sombre, et il semblait aux élèves que, d'une seconde à l'autre, ils allaient être engloutis par ces arbres. C'était ce qui plaisait à Elly qui n'avait pas souvent eut l'occasion de se promener dans la nature une fois la nuit, elle découvrait une nouvelle facette de ce qui la fascinait tant. Son regard tomba aussi sur le ciel qu'elle regarda avec émerveillement, il était dégagé au-dessus de leurs tête puisqu'il n'y avait pas d'arbre pour le couvrir, et elle eut le droit à une vision qui ressemblait à un rêve : le ciel était bleu, mais si il n'avait pas encore atteint le bleu foncé de la nuit, il n'en était pas loin, le croissant de lune brillait malgré quelques nuages fins qui passaient devant, et elle distinguait clairement les étoiles briller dans le ciel, il y en avait tellement, cela n'avait rien à voir avec le ciel nocturne de la ville, il était tellement plus beau tel qu'elle le voyait maintenant. Malheureusement, elle n'avait pas le temps de s'y attarder parce qu'ils arrivaient déjà à Darkmoon, le trajet était passé en moins de temps qu'il n'en avait fallu pour le dire.

  Elly étant dans les premiers à être arrivés, elle put jeter un rapide coup œil aux alentours sans que la vue ne lui soit gâchée par les autres élèves. Elle remarqua notamment la statue qui se trouvait au centre des chemins, mais elle n'eut pas le temps de faire plus attention à ce qu'elle représentait puisque les autres se regroupaient déjà devant le perron de ce qui semblait être le bâtiment principal. Elle en comptait quatre, et le terrain qu'occupait le campus était énorme, même si l'on ne comptait pas la forêt, elle espérait qu'on lui fournirait un plan parce qu'elle n'était pas sûre de réussir à trouver son chemin. Il y eut de nouveaux chuchotements, certainement causés par l'ancienneté du bâtiment qui leur faisait face. Tout en pierre, il se dressait sur deux étages, mais il semblait morne, triste, certainement parce qu'il n'y avait personne. Malgré les nombreux espaces verts qu'elle pouvait voir, tout semblait avoir la même allure que ce bâtiment, certainement à cause de l'automne qui avait arraché toutes leurs feuilles aux arbres et qui commençait à jaunir la pelouse par endroits. Elle comprenait parfaitement le doute de certains des élèves, elle vit notamment le garçon qui avait osé prendre la parole à la gare afficher une mine perplexe, presque de dégoût, en voyant le bâtiment, ce qui lui arracha un sourire. Elly faisait parti de la minorité qui appréciait l'environnement dans lequel ils étaient, elle ne s'arrêtait pas à la première impression et arrivait à s'imaginer l'endroit plein de vie et, surtout, elle songea à tous les dessins qu'elle pourrait faire, l'architecture était ancienne, cela changeait des bâtiments modernes tous identiques, tous monochromes, que l'on trouvait la plupart du temps. Si l'école était réellement ancienne, il devait y avoir plein de recoins, peut-être même des mystères et, le plus important pour elle, cette école avait une histoire. Elle était de plus en plus excitée à l'idée de commencer l'année, ainsi que d'explorer le campus, et tous ses doutes étaient à présent envolés.

  L'homme qui les avait menés jusqu'à l'établissement se tenait sur les marches du perron autour duquel avaient fini par se rassembler la totalité des élèves, il y eut de nouveau un silence, tous étaient pendus à ses lèvres, la plupart attendant certainement des explications en ce qui concernait l'état de l'établissement qui semblait être désert depuis de nombreuses années. Il ne prit cependant pas la parole de suite, mais il fit tomber sa cape au sol d'un mouvement théâtrale qui fit lâcher un "Ooh" à une majorité d'élèves, mais qui ne fit qu'exaspérer Elly, il n'y avait pas besoin de faire tant de tintouin pour ça. Elle leva les yeux au ciel en repensant à la situation.

  Elle ne put cependant s'empêcher de détailler l'homme du regard, histoire de voir à quoi il ressemblait et, surtout, pour essayer de comprendre la raison qui l'aurait poussé à se trimbaler avec une cape, parce que même si elle devait bien avouer que c'était stylé, elle n'arrivait pas vraiment à comprendre pour l'instant. Il était vêtu d'un costard assez ancien dans des tons marrons et beiges, ce qui lui confirma qu'il s'agissait bien du directeur, elle voyait mal quel autre membre du personnel pourrait être vêtu de cette manière. Il semblait assez jeune pour occuper ce poste, aux alentours des trente ans, tout au plus, mais le plus étonnant était ses cheveux entièrement blancs qui lui tombaient au niveau de ses yeux. Si elle était sûre d'une chose, c'était qu'il imposait le respect de part sa simple présence, et elle ne donnerait pas cher de la peau des personnes, élèves comme professeurs, qui tenteraient de le défier à l'avenir.

  « - Bien, je vois que vous avez tous pris la sage décision de marcher jusqu'à l'établissement. Je vais donc commencer par me présenter : je suis Adam Allister, mais ce sera Monsieur Allister, ou Monsieur le Directeur, pour vous tous. Comme je le vois à vos mines effarées, vous avez sûrement déjà remarqué que l'établissement est quelques peu.. ancien, mais je vous rassure, ce n'est que d'extérieur. Vous n'avez donc pas à vous en faire, l'intérieur des bâtiments a été rénové, et je suis sûre que vous serez comme chez vous à Darkmoon. Avant d'attaquer avec la distribution des chambres, j'ai quelques indications à vous donner pour que nous commencions l'année sur de bonnes bases. Vous trouverez tous sur vos bureau votre emploi du temps, un plan du campus ainsi que le règlement de l'école que vous devez lire attentivement, de plus, je vais clarifier un point pour que ce soit clair pour tout le monde, et empêcher quelques mauvaises interprétations de ce qui est écris. Le campus commence donc aux bâtiments que vous voyez derrière moi et s'arrête au niveau du pont en bois que vous avez traversé, à la lisière de la forêt donc. Tout élève qui sera pris en dehors du campus une fois la nuit tombée s'expose à de sévère sanctions, sauf exceptions, mais les élèves concernés sont déjà au courant. De plus, il y a un couvre feu fixé à 22h00, heure à partir de laquelle vous devez être dans le bâtiment C, celui des dortoirs, et vous n'aurez le droit d'en sortir qu'à partir de 7h00 le lendemain. Tout élève dérogeant au couvre feu sans bonne raison s'exposera aussi à une sanction. J'espère que c'est clair pour tout le monde parce que je serais intransigeant sur cette règle, qui est certainement la plus importante de l'établissement. Les cours commenceront dans deux jours, alors soyez prêts. Maintenant que nous avons clarifié ces quelques points, nous allons pouvoir entamer à la répartition des chambres, où vous êtes regroupés par groupes de cinq personnes de même sexe et même année. Retenez bien votre numéros parce que je ne m'amuserais pas à répéter plusieurs fois. »

  Elle avait écouté avec attention le discours du directeur, et elle n'avait pas vraiment relevé à quel point il était bizarre qu'il insiste autant sur cette règle qui ne concernait, au final, qu'un simple couvre-feu parce qu'elle était épuisée et n'avait qu'une seule envie : aller s'installer dans sa chambre, s'étaler sur son lit et dormir comme un bébé pour rattraper les nuits de sommeil manqués dans le train. Elle entendit son nom de famille être appelé et elle releva la tête pour retenir le numéro de sa chambre : F3.