PARTIE 1 - Retrouvailles (2/2)

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 Il lui fit un clin d’œil avant tourner les talons. Elle sentit ses joues rosir et elle eut un léger rictus pour camoufler sa gêne. Elle attendit qu'il ne soit plus dans son champ de vision pour relâcher la pression.

 Pourquoi lui avait-il dit qu'il se trouvait dans le vestiaire, et surtout, qu'il était en train de se changer ? Devait-elle le rejoindre pour voir avec lui si les tailles étaient bonnes ? Non ! Certainement pas ! C'était sûrement une plaisanterie de sa part pour la tester. De toute manière, elle n'aurait jamais eu le courage de s'y rendre, elle était beaucoup trop pudique.

 Chaque jour, lorsqu'elle arrivait ici, elle devait passer par la case vestiaire pour revêtir sa tenue d'équipier. La plupart du temps, elle arrivait bien avant le début de son service pour pouvoir être seule. Et les jours où le vestiaire était rempli de filles bien formées et sûre d'elles, elle se cachait dans les petites toilettes pour dissimuler son corps plein de vergetures et de cellulite.

 Elle évacua ces pensées pour se concentrer sur la tâche qu'on lui avait donnée et sur ses nouvelles responsabilités. Elle essayait d'imaginer les traits de ce nouveau collègue qu'elle serait chargée de former.

 Encore toute euphorique suite aux derniers événements, il lui fallut quelques minutes pour retrouver son calme. Elle prit la décision d'attendre que ce fameux Baptiste ait fini de se préparer et elle irait le voir lorsqu'il sera sur le terrain. Et puis, que penserait-il s'il la voyait dans un tel état de transe ? Non, il valait mieux se calmer et faire bonne impression devant lui.

 Les odeurs de viande grillée et de frites salées venaient titiller ses narines, lui creusant un trou béant dans l'estomac. Celui-ci criait famine derrière la couche de muscle, de graisse et de peau. Elle alla discrètement dans les cuisines et piqua une tomate tranchée ainsi qu'un bout de bacon et les enfourna rapidement dans sa bouche. Elle sortit furtivement et continua sa route dans le couloir.

 La bouche encore pleine, Amandine se dirigeait vers le bureau des managers. Certains de ses collègues, qui arrivaient pour prendre leur poste, la félicitaient en voyant son tout nouveau polo qui signifiait qu'elle était montée en grade. Un grand gaillard à la barbe imposante lui donna une petite tape sur l'épaule alors que d'autres, en retrait, pestaient dans la leur.

Allez-y, votre jalousie nourrit ma détermination !

 Elle remerciait les plus gentils et bienveillants et ignorait simplement les autres qui crachaient dans son dos. En un an de travail dans ce Burger King, elle en avait appris énormément sur la personnalité des gens. Personne n'était entièrement droit et honnête. Tout le monde avait une part sombre et malveillante en lui.

 Après avoir fini de parler avec ses collègues, elle continua sa route vers le bureau des managers. Lorsqu'elle fut arrivée dans le couloir qui y menait, elle s'arrêta devant le foot sur lequel était inscrit la répartition des postes. Elle inspecta les noms et essayait de trouver le sien.

 Quelques instants de recherche plus tard, elle tomba nez à nez avec son prénom écrit en de belles lettres rondes et soignées. À côté du sien se trouvait celui de son nouveau et mystérieux collègue : Baptiste. Ce prénom ne lui était pas inconnu. Sa mémoire lui jouait souvent des tours et elle n'arrivait pas à remettre un visage sur ce nom qui lui était familier. Elle haussa les épaules, ce n’était pas important après tout.

 — Salut, dit une voix grave derrière elle.

 Elle se retourna subitement. Son rythme cardiaque s’était accéléré et ses poils s’étaient hérissés. Elle n’aimait pas, mais vraiment pas du tout, qu’on la surprenne de la sorte. Les ascenseurs émotionnels, ce n’était pas son truc.

 Après avoir repris ses esprits et avoir recouvré un rythme cardiaque normal, ses yeux inspectèrent la personne qui se trouvait en face d’elle. Un grand homme, blond aux yeux bleus et à la carrure de rugbyman, était posté devant elle. Il s’était appuyé contre le foot et avait effacé une partie de ce qu’il y était noté. Elle eut un haut-le-cœur en croisant ses deux yeux d’un bleu médusant. Elle était persuadée de les avoir déjà vu quelque part.

 — Salut, répondit-elle après avoir fini son examen.

 — Je t’ai fait peur ? Tu es blanche comme un cul.

 — Non non, on arrive derrière moi et on me hurle dans les oreilles. Tout baigne, ironisa-t-elle.

 La douce mélodie de sa voix venait chatouiller les oreilles de la rouquine qui se sentit transportée vers des contrées lointaines. Son timbre grave et rocailleux était très rassurant et séduisant.

 Baptiste la regardait avec des yeux pétillant de joie et d'excitation. Jamais de sa vie, au grand jamais, il ne se serrait imaginé revoir cette chevelure flamboyante qui lui avait fait chavirer le cœur. Elle ne semblait pas l'avoir reconnu, mais lui ne l'avait pas oublié. Il se souvenait de chaque centimètre de son visage, de son corps, de son odeur, de ses tics de langage et de son petit nez qui se plissait quand elle souriait. Tout lui était resté en tête. Son fantôme l'avait hanté pendant plus d'une année et il n'arrivait pas à croire qu'elle était là, sous ses yeux. Lorsqu'il vit les doux yeux verts d'Amandine s'emplir de gêne, il détourna immédiatement les siens vers le tableau blanc.

 — Tu sais qui est Amandine ? demande-t-il. Pourquoi mon nom est marqué à côté du sien ? Deux pour faire les boissons ça fait beaucoup non ?

 — C'est moi, dit-elle en lui montrant son badge.

 — Bien sûr, c'est toi Amandine. Comment j'aurai pu l'oublier ?

 Amandine ne fit pas attention à sa remarque et lui expliqua rapidement qui elle était et ce qu’ils allaient faire pour ce service. Être préposé aux boissons était un poste assez simple et qui était accessible même aux plus bêtes. La seule chose était de ne pas se laisser déborder, sinon ça pouvait vite devenir un vrai calvaire.

 Le service se déroula à merveille et Baptiste s'était montré très assidu et coopératif. Sa formatrice n'avait eu à aucun moment besoin de lui ré-expliquer les choses. Il avait tout assimilé rapidement.

 L'heure de pointe était passée et les deux employés étaient partis prendre un café dans la salle de repos. Baptiste ne pouvait détourner son regard de la rouquine, ce qu'elle avait rapidement remarqué. Elle s'installa sur la banquette et bu une gorgée de ce liquide chaud et réconfortant. Le blondinet fit de même et planta son regard dans le sien.

 — Je suis un peu triste quand même, je pensais que ma caissière préférée se serait souvenue de moi.

 Ses yeux s'écarquillèrent et elle resta quelques instant bouche bée. Tout lui revenait en tête et elle se trouvait stupide de ne pas l'avoir remis plus tôt. Ses joues rosirent et elle plongea son regard dans le sien. Un sentiment étrange s'empara d'elle et empli son cœur d'une chaleur qu'elle ne connaissait pas. Un petit sourire se dessinait sur ses fines lèvres.

 — C'est fou qu'on se retrouve après un an, ce doit être un coup du destin, dit Baptiste en lui souriant.

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