Une lueur dans l'obscurité

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Réveil brutal.

Les tranquillisants ont cessé de faire effet.

Des sons que je n'arrive pas à identifier m'enveloppent toute entière.

Je n'arrive plus à respirer. Je me sens oppressée, perdue au plein cœur d'un océan de bruits qui me terrifient.

Dans la plus totale insécurité et la plus absolue solitude.

Une peur incontrôlable s'empare de moi.

Des souvenirs récents et intolérables me submergent et me noient.

Des souvenirs de mots barbares. Décollement rétinien, cécité.

De mots inconcevables, inacceptables. Aveugle, irréversible.

Souvenir d'une voiture arrivant en sens inverse et d'un pare brise volant en de centaines de petits éclats scintillants.

La vision serait presque belle si ses conséquences n'étaient pas aussi tragiques.

Le tout dernier souvenir visuel de ma vie.

Face à cette douleur insoutenable me prend soudain l'envie irrépressible de quitter ce monde que mes yeux ne me permettront plus jamais de voir.

Je me sais condamnée à vivre entourée des ténèbres les plus profondes, plus noires que la plus sombre des nuits sans lune, sans la moindre petite lueur pour me guider.

Ma vie est fichue, mon avenir gâché.

Et après l'onde de choc et de douleur, une vague de questionnements me submerge.

Suis je défigurée ?

A quoi se résumera ma vie maintenant : braille, canne, chien d'aveugle et isolement ?

Comment continuer à vivre sans plus jamais pouvoir admirer un coucher de soleil, la beauté d'un paysage marin, la magie d'une nuit étoilée, la majesté des éclairs déchirant le ciel et, pire que tout, sans plus jamais avoir la chance de m'émerveiller devant le visage souriant de mon bébé ?

Cette pensée me plonge dans un profond désespoir.

Et puis, du fond de mon gouffre, je l'entends, ce son.

D'une d'innocence, d'une joie, d'une puissance telles qu'il était le seul à pouvoir me sortir de ma torpeur, à pouvoir me ramener à la vie.

Ce son. Un rire. Le rire de mon enfant.

Le plus magnifique son qu'il m'ait été donné d'entendre.

Il parvient à mes oreilles plus pur que jamais, perçu uniquement par mon ouïe, sans perturbation visuelle.

Et c'est là que je comprends que je me dois de continuer à vivre. Pour lui.

D'apprendre à vivre autrement.

Vivre sans la vue mais avec mes quatre autres sens.

Apprendre à apprécier plus intensément les plaisirs simples de la vie : la caresse du vent sur mon visage, la douceur de la peau de mon amoureux sous mes doigts, le bruit de la pluie frappant les carreaux, l'odeur du pain fraîchement cuit, le goût délicieux d'un morceau de chocolat.

La voilà, la lueur qui me permettra de continuer à avancer dans l’obscurité.

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