Chapitre 4
— Mais tu es vraiment sale, ma parole.
— Chut, j’écoute, m’interrompit Victoria.
Cette dernière était complètement avachie dans le canapé devant une série ou un film, entourée de paquets de bonbons, de chips et de gâteaux. Je partis pour récupérer les divers déchets afin de les ranger, mais à peine avais-je posé ma main sur le sachet de cookies au bout du canapé, que Victoria me lança un regard noir. Je le reposai délicatement et partis dans ma chambre. Cette femme était folle. Et flippante.
Je regardai l’heure et vis qu'il était bientôt quinze heures. Je décidai d’appeler ma secrétaire pour avoir des nouvelles.
« — Comment ça se passe au bureau ?
— Bonjour monsieur Castez, rien d’inhabituel. Monsieur Costa a appelé pour convenir d’une date. Il souhaitait voir avec vous certaines modalités pour le spectacle artistique qui a lieu à la fin du mois. Je lui ai donné rendez-vous demain à quinze heures.
— Rien d’autre ?
— Si.
— Quoi ?
— Votre père est venu.
— Je dois te faire cracher les informations ? demandai-je, agacé qu’elle ne dise pas tout d’un coup.
— Je vous prie de m’excuser, il tient une réunion pour nous informer que vous allez travailler en collaboration avec madame Chan désormais. Il a demandé à toute l’entreprise de lui faire un accueil chaleureux.
Donc, il était sérieux. Je devais vraiment collaborer avec Victoria au boulot. Génial.
Une idée me vint en tête.
— Envoie un mail à tout le monde en disant d’exclure notre nouvelle collaboratrice de toute décision. De ne lui apporter aucun intérêt, de la considérer comme une simple assistante. »
Si elle ne se sentait pas à l’aise dans l’entreprise, cela contribuerait à la faire craquer. Je raccrochai et me posai moi aussi devant la télévision.
La fin de l’après-midi passa rapidement. Je sortis de ma chambre lorsqu’une bonne odeur me fit gargouiller le ventre.
Victoria cuisinait.
— J’ai fait des empanadas, je n’en avais jamais fait, j’espère que ce sera bon.
— Merci.
Je restai méfiant. Pourquoi était-elle gentille tout d’un coup ? Aurait-elle mis quelque chose dans la nourriture ?
Quand je la vis croquer à pleines dents dans les siens, je me dis que c’était sans danger et croquais dans les miens aussi.
— C’est délicieux.
J’étais sincère, ils étaient délicieux, c’était un vrai régal. Elle était douée en cuisine. Ça ne me surprenais pas, elle réussissait toujours tout ce qu’elle entreprenait, c'était d’ailleurs ce que je trouvais agaçant en elle.
— Merci, répondit-elle la bouche pleine.
Elle en avait partout sur le visage. Ce petit bout de femme n’avait aucune grâce. D’ailleurs, comment pouvait-elle manger autant après tout ce qu’elle avait grignoté ?
— Tu veux qu’on regarde un truc ensemble ce soir ?
— Non, désolé, je suis de sortie.
— Oh, tu vas où ?
— En boîte.
— Tu…
— Oui, je sais, je ne devrais pas avec le mariage qui approche, la coupai-je.
— J’allais simplement demander si tu voulais une autre empanadas.
Je me sentais vraiment stupide maintenant.
— Tu veux venir ? demandai-je pour essayer de me rattraper.
— Non merci, je n’aime pas ce genre d’endroit.
— Pas de souci.
— Demain, on commence par ton entreprise, c’est ça ?
— Ouais.
Nous finîmes le repas en silence. Je n’avais rien à lui dire de plus. Une fois terminé, je nettoyais la table et filais me préparer.
Je pris une douche, me lavai les dents et appliquai une crème hydratante. Eh oui, même les hommes prenaient soin d’eux.
J’enfilai une chemise et un jean, attrapai mes clefs de voiture ainsi que celles de l’appart et partis.
Lorsque j’arrivai devant la boîte, il y avait déjà beaucoup de monde. De nombreuses personnes attendaient de pouvoir entrer. J’avais presque pitié d’eux. Être pauvre devait tellement être contraignant.
Le videur me laissa passer en me saluant. Quand on était riche, tout le monde nous connaissait. Pour preuve, les filles qui attendaient dans la file criaient mon prénom.
Je me dirigeai directement dans la zone VIP. Nathan n’était pas encore là, mais de nombreuses filles étaient présentes ainsi que Nate et Liam. La soirée s’annonçait prometteuse. J’attrapai un verre sur le plateau d’un serveur et le bus d’une traite. L’alcool coulant le long de ma gorge me tira un sourire. Je pourrais oublier un peu tous les ennuis qui me tombaient dessus. Être loin de Victoria et de ce foutu mariage, vivant comme j’en avais l’habitude, était encore plus revigorant. Un sentiment de liberté me parcourut. Je m’assis sur le canapé, deux filles s’assirent sur mes genoux. Je ne distinguais pas très bien leur visage à cause de la pénombre, mais je me laissai faire.
J’ai toujours adoré ça, être idolâtré.
Je reconnus que parfois, justement, cela manquait de piquant, d’adrénaline. Un peu de résistance pourrait être amusant. Mais, pour ce soir, j’aurais été ravi d’un peu de simplicité. Victoria était compliquée, elle m’épuisait mentalement.
— Alors mec, j’ai appris que tu allais te marier.
— Pas trop dur d’avoir la corde au cou ?
Liam et Nate se foutaient ouvertement de moi.
— Fermez-la, ce soir, j’oublie tout.
Nathan arriva enfin et nous partîmes tous sur la piste de danse après quelques shots. Rapidement, une fille vint me chauffer en dansant sensuellement contre moi. Je répondis à ses avances et nous finîmes dans les toilettes de la boîte.
J’arrivai enfin à me détendre complètement, sentant le stress se dissiper avec chaque souffle. J'avais simplement besoin de cette évasion passionnée, ce moment où le monde extérieur disparaît. Cette fille, malgré ses cris un peu trop ardents, avait une grâce et une habileté qui dépassaient mes attentes.
Elle s’approcha de moi avec une assurance tranquille, ses mouvements fluides et maîtrisés. Ses mains parcouraient mon corps avec une délicatesse électrisante, chaque caresse envoyant des frissons de plaisir le long de ma colonne vertébrale. Ses lèvres, douces et chaudes, effleuraient ma peau, créant une série de sensations qui me faisaient perdre pied.
Ses yeux reflétaient une intensité brûlante, une passion qui me captiva et m’entraîna dans une danse sensuelle. Ses gestes étaient précis, chaque mouvement soigneusement calculé pour maximiser mon plaisir. Elle savait exactement où toucher, où embrasser, où murmurer des mots doux et provocants.
L'atmosphère devenait plus envoûtante à chaque seconde, la pièce emplie d'une chaleur palpitante. Je me laissai complètement emporter par cette vague de sensations. Rapidement, je me laissai submerger par une vague de plaisir, chaque fibre de mon être vibrant.
Après avoir fini, j'ai laissé l'autre se rhabiller pendant que je retournais dans le carré VIP. Les gars n'étaient pas là, j’imagine qu'ils étaient en train de vivre la même expérience que moi il y a seulement cinq minutes.
Je bus encore quelques verres afin de profiter pleinement et décidai de rentrer. Je devais bosser demain et je sentais que j’allais avoir une sacrée gueule de bois, pas besoin de forcer.
J’appelai un taxi, je n’étais pas en état de conduire, je viendrais chercher ma voiture demain.
Pourquoi cette fichue serrure bougeait dans tous les sens ? Je n’arrivais pas à rentrer la clé. Je frappai dans la porte en espérant qu’elle allait s’arrêter de bouger. Cela ne changea absolumentrien, mais j’arrivai tout de même à ouvrir cette porte.
À peine eu-je eu le temps de rentrer que je reçus un coup sur la tête. Ma vision se brouilla et mon équilibre, déjà impacté par l’alcool, me fit défaut et tombai à terre. Heureusement que j’étais saoul, sans quoi je pense que cela aurait été douloureux.
Je levai les yeux et aperçus Victoria, une poêle à la main. Elle s’était crue dans Raiponce ? Il fallait qu’elle arrête avec ses films.
— Charmant accueil.
— Je suis désolée, répondit-elle en se jetant à genoux pour regarder si je n’avais rien, j’ai cru que tu étais un cambrioleur avec le gros coup que tu as mis sur la porte.
— Tu es dans une villa sécurisée, tu crois vraiment qu’ils peuvent rentrer ? Utilise ton cerveau.
— Tais-toi ou je te remets un coup.
— J’aurais pu m’en passer.
Je me redressai péniblement et me dirigeai vers ma chambre. Je m’allongeai sans prendre la peine d'ôter mes vêtements et sombrai dans le sommeil.
Au moment où mon réveil retentit, j'eus l'impression que mon cerveau était sur le point d'éclater. Il était bien trop tôt, et ce il était excessivement bruyant.
Je me dirigeai vers la cuisine. Chaque pas résonnait dans ma tête. Je cherchai du café, mais n’en trouvai pas. C’était une blague ? Ou était donc ma machine ?
— Tu cherches quelque chose ?
— Du café.
— Je n’arrivais pas à dormir alors j’ai modifié l’organisation de la cuisine pour la simplifier.
Je me retournai violemment, ce qui me valut quelques secondes pour retrouver mon équilibre. La journée allait être longue, je n’aurais pas dû abuser autant hier soir.
— Tu as fait quoi ?
Elle ignora complètement ma phrase.
— D’ailleurs, j’aimerais que tu ne boives pas de café à côté de moi, j’ai horreur de l’odeur, s’il te plaît.
— Tu as trente secondes pour remettre ma cuisine comme elle était.
— Je voudrais m’excuser pour…
— Ne le prends pas mal, mais tais-toi. Je ne suis déjà pas du matin, mais sans café, c’est encore pire. Prends en compte ma gueule de bois en plus et on a un combo, la coupai-je. Je vais me doucher.
Je partis sous la douche en espérant que l’eau me détendrait et atténuerait les maux de tête.
Quand je me décidai enfin à sortir de la salle de bain, je remarquai que Victoria n’était plus là. Elle était sans doute déjà partie au bureau. Il fallait que je me dépêche, je ne voudrais pas qu’on pense qu’elle travaillait mieux que moi. J’appelai un taxi, qui me déposa devant le lieu de la soirée précédente, sautai dans ma voiture et fonçai travailler.
J’arrivai enfin à l’étage de mon bureau, qui se situait au second. Le bâtiment ne comportait que deux étages. Le rez-de-chaussée permettait d’accueillir les clients ou les visiteurs et comportait des salles pour des représentations artistiques. Le premier étage et le second étaient composés de bureaux, d’une cafétéria et de salles de réunion. Plusieurs bâtiments comme cela étaient situés un peu partout. Nous avions préféré mettre des établissements à proximité des centres culturels que nous gérons plutôt que d’avoir un seul et grand bâtiment.
— Allez me chercher un café, ordonnai-je à mon assistante avant d’entrer dans mon bureau.
Tout ce que je désirais, c’était d’en boire une gorgée afin de faire passer cette terrible gueule de bois.
Victoria était déjà là, assise sur ma chaise.
— Je t’ai acheté un café, me sourit-elle.
Sans prendre garde, je le saisis et en avalai une gorgée généreuse. J'aurais dû être plus prudent. Le café était bouillant, bien au-delà de la température habituelle. À en juger par le sourire sadique qu'elle arborait fièrement, elle l'avait fait délibérément.
— Tu l’as fait exprès, articulai-je difficilement.
— Oui. J’ai été plus qu’agréable avec toi. J’ai fourni des efforts, mais toi, tu t’es comporté comme le crétin que tu es. Moi non plus, cette situation ne m’amuse pas. Je n’avais pas besoin d’un gamin prétentieux comme toi dans ma vie. Malheureusement, nous allions devoir faire avec pendant un an. Mais, si tu veux jouer à qui craquera en premier, jouons. Je peux t’assurer que tu perdras.
— Agréable, tu dis ? Dois-je te rappeler que tu as failli me tuer hier soir ?
— Si tu m’avais laissé finir ma phrase ce matin, tu aurais su que j’étais désolée. J’ai paniqué en entendant les coups sur la porte.
— Il n’empêche que si tu le voulais, tu pourrais arrêter toute cette mascarade. Tu es la petite fille à son papa.
— Arrête avec ça.
— Parce que je me trompe peut-être ? Tu es tellement superficielle et faussement parfaite. Je te promets que je montrerai ton vrai visage.
— Très bien, si tu veux jouer à cela. La guerre était déclarée et tous les coups étaient permis. Je te laisse avec ton café, n’oublie pas de souffler dessus, ce serait dommage que tu brûles. Je vais aller me présenter à l’équipe.
— Je ne te retiens pas.
Si elle anticipait un accueil chaleureux, elle serait rapidement confrontée à des désillusions. J'avais émis un ordre, et ils savaient tous parfaitement que pour préserver leur emploi, il était préférable de ne pas me contrarier. On ne pouvait pas garantir la loyauté, mais on pouvait inspirer la crainte. En fin de compte, le résultat était le même, à la seule différence que, lorsque nous étions craints, nous n'avions pas à nous inquiéter d'une éventuelle trahison.
En attendant, je devais trouver comment me venger de cette peste. Je renonçais déjà à beaucoup de choses, je voulais mon café.
Je bus une gorgée de celui apporté par Victoria, mais, oubliai qu’il était brûlant et me blessait une nouvelle fois avec.
Je la tuerais.
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