Émeline, la 1ere locataire.
(Fin août)
Elle descendit de la voiture de son père, garée dans l'allée de sa copine, avec la dernière chanson de la radio en tête. Elle s'accouda à la portière conducteur pour embrasser Didier.
— Passe un bon après-midi, ma chérie ! Tu diras bonjour à Lana de ma part.
— Merci, je n'y manquerais pas. Sois prudent sur la route.
Elle se retint de lui répéter une énième fois que c'est Lyane et non Lana... La vitre se referma et la voiture partit en trombe, alors qu'elle restait plantée là en agitant la main. Un soupir franchit la barrière de ses lèvres brunes. Em tourna les talons et Cathy, la mère de Lyane, lui ouvrit la porte avant qu'elle n'ait sonné.
— Bonjour Line, dit-elle en lui faisant la bise. Tu vas bien ? Ta petite soeur est bien remise ?
— Bonjour ! Oui, tout va bien ! Il y a eu plus de peur que de mal. Beaucoup d'inquiétude c'est tout. Elle est triste de ne pas pouvoir venir mais le médecin est contre le fait qu'elle prenne la route.
— Je comprends. Elle viendra la prochaine fois, ce n'est pas grave !
Émeline lui sourit. Cette femme est adorable. Pendant qu'elle enlevait sa veste, Cat cria à sa fille unique de descendre. Les escaliers craquèrent sous les pas précipités de sa meilleure amie. Une jeune fille à la peau claire vola dans les bras mats de son invitée. Elles virevoltèrent et éclatèrent de rire. La mère s'effaça pour aller sortir ses cookies du four.
Bras dessus, bras dessous, les deux amies montèrent à l'étage. La rentrée prochaine fut le sujet d'une discussion animée. Les garçons, les ami(es), les profs, les cours, les repas... Line n'avait pas envie d'aller à l'internat mais elle n'avait pas trouvé de logement autre que sa maison et l'école... Lyane hésita avant de déclarer :
— Tu sais quoi, ma belle ?
— Non, mais je sens que tu vas me le dire.
La jeune noire sourit en finissant sa phrase. Sa copine rit aussi.
— Il suffit que tu te trouves un logement étudiant.
— Mais, tu sais bien que...
— Laisse-moi finir ! Si je t'en parle, c'est que j'ai vu une maison avec un panneau "location étudiante, deux places ". Ça peut peut-être le faire, tu l'as ta porte de sortie !
— C'est une maison, Lyane. Une maison. Mon père ne voudra jamais !
— On peut juste aller visiter, ça ne coûte rien. C'est ça ou l'internat.
L'argument était saisisant, Lyane avait trouvé les mots justes.
Aussitôt, les jeunes femmes prirent leurs affaires et prévinrent qu'elles sortaient faire un tour.
— Les filles ! Où allez-vous ?
Sa fille haussa les épaules et lui fit un clin d'oeil :
— Faire un tour, simplement, mamounette chérie ! Promis, on sera là pour manger tes délicieux cookies au goûter !
Avant que sa mère puisse répliquer, la porte d'entrée claqua.
Lyane, 19 ans, avait obtenu son permis et Émeline, 17 ans (bientôt 18), ne l'avait pas. Elles se rendirent sur le lieu de location. Les propriétaires étaient présents et dirent qu'ils avaient déjà déménagés. Comme la maison représente un coût trop élevé pour un étudiant seul, ils co-louaient la petite habitation.
— Puis-je prendre des photos ? Pour ma famille.
— Oui, bien sûr. Ma femme va vous faire visiter.
Les deux jeunes femmes suivirent l'ancienne maîtresse de maison. L'entrée est un couloir qui débouche sur le salon, puis la cuisine ouverte. La salle à manger et la terrasse donnaient derrière ainsi qu'une chambre et la salle d'eau. À l'avant de la maison se trouvaient la deuxième chambre et le bureau.
— Prenez en compte, mademoiselle, que le second habitant pourra être un garçon. À ce que j'ai compris, votre amie vous accompagne juste.
— Oui, c'est vrai.
Après un regard échangé avec sa meilleure amie, elle ajouta ;
—Ça ne me dérange pas. C'est une grande maison donc ça devrait le faire.
— Vous êtes la première personne qui visite... Pour le bail, voyez avec mon mari, il pourra mieux vous renseigner.
Elle appela ensuite ses parents pour demander un avis. Sa belle-mère fut enthousiaste, uniquement pour se débarrasser d'elle... Pour son père, elle usa d'arguments pour le convaincre : le lycée sera plus proche, le car permettra de faire moins de détours, ce sera moins cher que l'internat. Didier savait aussi très bien qu'entre Gisèle et sa fille, le courant ne passait pas du tout et c'était pesant. Le besoin d'indépendance d'Émeline gagna. Il se porta garant du paiement l'assurance et du loyer. La conclusion fut qu'Émeline payerait les transports en commun et la nourriture, ainsi que toutes les autres choses nécessaires à sa vie.
Un autre problème se posa ensuite à la jeune femme : comment annoncer la nouvelle à sa soeur de 10 ans qui ne voulait jamais la quitter ? Pour l'internat, ça avait déjà été compliqué, mais comme elle serait là le lundi matin et revindrait le vendredi, c'était passé. À force de promesses, Jade se résigna et céda.
L'après-midi se termina comme prévu ; gavage de cookies et discussions interminables entre filles, sur tous les sujets possibles, en majorité en lien avec la maison... Depuis que la dame avait émis la possibilité de cohabitation avec la gent masculine, les deux amies de toujours s'imaginaient des relations plus farfelues les unes que les autres. Les potins fusèrent dans la chambre.
Le lendemain, la famille Plamyr, à l'exception de la benjamine, se présenta avec l'argent pour signer le contrat et les affaires de Line. Tout alla très vite car les proprios avaient déjà retiré les leurs.
Quelques jours plus tard, les vacances se terminèrent et la rentrée scolaire arriva, sans nouvelle d'un quelconque colocataire. Au départ, elle s'attendait à ce qu'une fille arrive, brisant les rêves de garçons mais elle se résigna en se disant qu'elle serait aussi bien toute seule. Quoique l'année commençait tout juste...
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