CHAPITRE 26 : Un Nouveau Départ
Le lundi suivant, Franklin High s’éveilla sous un ciel gris et une pluie fine, typique de Seattle. Pourtant, l’ambiance dans les couloirs était tout sauf morose. Depuis la projection qui avait exposé Carter et ses manigances, les regards jetés à Lila et Jonah n’étaient plus les mêmes. Au lieu de moqueries ou de défiance, on y voyait une forme de curiosité mêlée de respect, comme si leur courage avait forcé l’admiration de beaucoup.
Carter, quant à lui, brillait par son absence. La rumeur courait qu’il avait été suspendu et que l’administration menait une enquête formelle sur ses actions. Même certains de ses anciens amis s’étaient détournés de lui, effrayés ou déçus par l’ampleur des mensonges révélés.
Pour Jonah et Lila, cette nouvelle atmosphère s’apparentait à une forme de renaissance. Lila remarqua, chaque matin, des élèves qui l’abordaient pour s’excuser de ne pas l’avoir crue plus tôt, ou pour la féliciter de son audace. Des groupes de fans de rock alternatif, arborant des chemises de flanelle et des badges Pearl Jam, l’accueillaient désormais avec des sourires bienveillants.
Emily ne la quittait presque plus, ravie de retrouver leur complicité. Elle avait retrouvé son sourire doux, et s’amusait parfois à taquiner Lila sur ses talents artistiques, l’encourageant à exposer davantage ses dessins. Chloé, elle, gardait un air froid en façade, mais un jour, alors qu’elles se retrouvaient seules près des casiers, elle baissa la voix :
— Tu as été… courageuse, lacha-t-elle, comme un aveu difficile.
Lila, consciente de l’effort que cela représentait pour Chloé, esquissa un léger sourire :
— Merci, Chloé.
Il n’y eut pas d’autres mots, mais ce bref échange marquait un pas vers la réconciliation.
Jonah, Lucas, et Ryan, eux, décidèrent de transformer cette victoire en célébration musicale, organisant un dernier concert avant la fin de l’année. Mais cette fois, ils ne voulaient pas d’entrepôt clandestin : ils obtinrent l’autorisation d’utiliser la salle de musique du lycée, symbole éclatant de leur réhabilitation.
Ryan, qui vérifiait déjà les spots et le système audio, ne put s’empêcher de remarquer :
— Tu te rends compte ? On passe d’un show illégal à un concert “officiel”. Si c’est pas un retournement de situation, je sais pas ce que c’est.
Jonah sourit, l’air plus serein qu’il ne l’avait été depuis des semaines :
— Ça prouve qu’on a eu raison de se battre.
Lucas acquiesça :
— Et qu’on a gagné le respect de beaucoup de monde.
De son côté, Lila participa avec joie aux préparatifs. Elle créa des affiches colorées, reprenant l’esthétique grunge tout en y ajoutant sa touche artistique. Malgré la grisaille constante dehors, elle se sentait plus légère que jamais, comme si un poids invisible avait quitté ses épaules.
Emily aidait à distribuer les flyers, alors même que certains cheerleaders, jadis sceptiques, s’y intéressaient.
— Votre musique est vraiment cool, lança l’une d’elles à Lila. J’ai hâte de voir ce que vous allez faire.
Lila sourit, remerciant poliment. Chaque petite validation de ce genre lui rappelait que les choses avaient changé, qu’elle n’était plus l’isolée qu’on dénigrait.
Le vendredi soir, la salle de musique se remplit rapidement d’élèves curieux. Les instruments étaient disposés devant le tableau, et des guirlandes lumineuses suspendues aux murs donnaient une ambiance intime. L’énergie était bien différente de la première fois : plus de tension extrême, mais une joie partagée, comme si tout le monde venait assister à une fête de fin d’année méritée.
Jonah ajusta les cordes de sa guitare, jetant des coups d’œil à Lila qui parcourait la foule, saluant des connaissances, un petit carnet de croquis dans la main. Ryan, derrière ses percussions, se permit même quelques rythmes d’échauffement, tandis que Lucas faisait un dernier check sur la console sonore.
Au signal, la musique démarra. Le public applaudit, d’abord timidement, puis avec plus d’enthousiasme à mesure que le trio enchaînait les morceaux. Les regards se croisaient, les têtes hochaient en rythme, et quelques élèves, en chemises à carreaux et jeans déchirés, dansaient discrètement.
À la fin de la dernière chanson, Jonah prit le micro, essuyant son front.
— Merci à tous d’être venus, commença-t-il, la voix tremblante d’émotion. Ce concert, et toute cette année… rien n’aurait été possible sans une personne en particulier.
Il tourna le regard vers Lila, debout près de la scène, et lui tendit la main :
— Viens.
Sous les applaudissements, Lila monta, le cœur battant. Jonah, un sourire sincère éclairant son visage, la fixa :
— Tu as été ma force quand tout semblait perdu. Merci, Lila.
Les joues de Lila s’empourprèrent, mais elle soutint son regard, émue :
— Et toi, tu m’as montré que rester soi-même vaut tous les combats, dit-elle, la voix vibrante.
Un silence complice tomba, avant que la salle n’éclate en applaudissements. Certains crièrent, « Bravo ! », d’autres les regardèrent avec admiration. Chloé, adossée contre un mur, esquissa un sourire discret. Emily, quant à elle, laissa échapper un « You go girl ! » enthousiaste.
Dans les semaines suivantes, la paix qu’ils avaient conquise se confirma. Les élèves ne voyaient plus en Lila et Jonah des parias ou des rebelles, mais de vrais acteurs d’un changement positif au lycée. Carter, quant à lui, était suspendu, et de nombreux anciens complices s’étaient éloignés de lui.
Le dernier jour d’école, Lila et Jonah se retrouvèrent sous l’arbre qui avait souvent abrité leurs confidences, près du terrain de basket. Jonah grattait doucement les cordes d’une guitare acoustique, tandis que Lila feuilletait son carnet de croquis, où des dessins colorés traduisaient l’apaisement qu’elle ressentait.
— Tu penses à quoi pour la suite ? demanda-t-il, rompant un silence doux.
Lila posa ses yeux sur lui, un petit sourire aux lèvres :
— Je ne sais pas encore, mais je n’ai plus peur de chercher.
Jonah acquiesça, un sourire tranquille sur son visage :
— Moi non plus.
Ils échangèrent un regard complice. Une brise légère fit bruire les feuilles au-dessus de leurs têtes, et Lila sentit une chaleur réconfortante l’envahir.
— Alors, on avance ensemble ? murmura-t-elle, glissant ses doigts contre les siens.
Jonah posa délicatement sa guitare pour prendre sa main :
— Toujours.
Sous la lumière dorée du soleil couchant, ils restèrent là un moment, savourant la sérénité d’un chapitre qui s’achevait. Seattle, dans toute sa grisaille charmante, s’était effacée devant eux comme une toile de fond pour leur histoire. Mais ce n’était pas la fin : juste le début d’une nouvelle étape, où ils se savaient plus forts, plus libres, et prêts à embrasser tout ce que l’avenir leur réservait.
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