Gung Ho (Benjamin von Kummant/ Thomy von Eckartberg)

4 minutes de lecture

Résumé : Zack et Archer Goodwoody, deux frères orphelins, débarquent à la colonie de « Fort Apache », en pleine « zone de danger », par le train de ravitaillement. À peine arrivés, ils se heurtent à la population locale : Bagster, le responsable du ravitaillement véreux, seul à avoir un contact avec « la Ville », les adultes sous la poigne de la sévère Kingsten, qui tentent de leur imposer leur règlement militaire, mais surtout les « Gung Ho », les jeunes têtes brûlées du coin… entre drague lourde, bastons et concours de celui qui pisse le plus loin, les frères Goodwoody se font petit à petit leur place, dans un monde autour duquel plane une terrible menace...

Je n’en révèle pas plus dans le résumé, car c’est comme ça que j’ai découvert cette courte série de 5 tomes : sans rien savoir. Le lecteur découvre la colonie en suivant les deux frères Goodwoody, la tête pleine de questions : pourquoi tout, ou presque, est en ruine ? Pourquoi y a-t-il aussi peu de monde dans ce « village » ? Pourquoi y fait-on des exercices d’évacuation et pourquoi les gamins apprennent-ils le maniement des armes à l’école ? Quelle est cette « ville » d’où proviennent les armes, ravitaillement et parias en guise de nouvelles recrues, à pleine vitesse et sous bonne garde ? Pourquoi affiche-t-on le nombre de tués tous les jours, ainsi que la date de la dernière « attaque » ? On devine vite que ces gens tatoués, au parler rude et aux look digne de « Hartley cœur à vif », vivent sous le joug d’une terreur constante, qui dicte tous leurs actes. La fameuse menace est mentionnée à mots couverts, avec parcimonie : on sait qu’elle se déplace « en meute » et qu’il ne reste pas toujours « un corps à enterrer » après son passage. Au centre du village, qui devait ressembler, il y a très longtemps, au parvis de l’Église d’un petit bourg européen, un arbre immense recouvert de portraits au crayon conserve la mémoire d’innombrables disparus. Parmi les 400 habitants, beaucoup n’ont plus de famille, et on s’efforce de vivre au jour le jour, en essayant d’oublier ce qui est responsable de la situation et attend toujours au-delà de l’enceinte sécurisée, dehors...

Walking Dead avec des singes cannibales

J’ai dit que je ne savais rien de cette série allemande, mais il y a tout de même quelque chose qui m’a poussé à acheter ses cinq tomes (grand format tout en couleur, ce qui veut dire plus cher qu’une BD normale). C’est ce que j’avais vu des créatures en couverture du dernier volume de la série. C’est l’originalité – et, à la fois, la grande simplicité, gage d’efficacité – des monstres qui m’a décidé. Pour le reste, on est dans le post-apo classique : raids à moto, machettes et flingues à tout-va, massacres impitoyables, conflits barbares entre tribus de survivants, protagonistes badass, enfants-soldats, viols, marche ou crève. Et au milieu de ça, on a une bande d’ados qui ne pense qu’à s’amuser et se prouver qu’elle existe, quitte à se mettre en danger. On ne s’attend pas à l’escalade finale… et finalement, la série se termine aussi vite qu’elle a commencé, en véritable feu d’artifice, tout en laissant la porte ouverte à une suite éventuelle. Ce qui serait pas mal, car beaucoup de questions concernant cet univers sont laissées en suspens. On ne saura pas, par exemple, d’où viennent les fameux « rippers » ni quelle catastrophe fut responsable de l’extinction des deux tiers de l’humanité douze ans auparavant…

Un graphisme sublime

Les dessins, entièrement numériques, sont magnifiques. La profusion de détails et de clins d’œil (le sigle extinction rebellion sur le mégaphone du chef des adultes dans le tome 5, les références à Blue Oyster Cult et Beastie Boys...) donne envie de s’attarder sur toutes les cases, et, même si le rythme va à cent à l’heure et qu’on a hâte de connaître la suite sitôt un tome refermé, on prend un certain temps à en lire un en entier. Ça faisait longtemps que je n’avais pas connu ça avec une BD !

Au début, pourtant, je trouvais le scénario un peu léger. Trop orienté « male gaze » et fan service, prétexte à des scènes d’action entre deux pépées en mini-short et forte poitrine (l’un des protagonistes féminins est le sosie BD de Meghan Fox). Mais j’ai changé d’avis au fur et à mesure de la lecture. Une fois la série finie, cette histoire hante. L’ambiance, le message… à travers l’histoire de deux frères qui n’ont plus que l’un pour l’autre dans un monde pourri, Gung Ho nous chante un hymne à l’énergie (et à la connerie) adolescente, à la liberté et au refus absolu du compromis. Les gamins dans la série savent bien que ce sont les adultes qui sont responsables de leur situation sans espoir. Et ils en sont les premières victimes. Alors, ils le leur font payer…

Le seul bémol, selon moi (mais c’est sans doute du pinaillage) : les deux personnages japonais, extrêmement caricaturaux, qui se battent au sabre en invoquant « giri » et « bushido ». Mais si ce genre de cliché ne vous rebute pas, que vous aimez le post-apo, la violence bon enfant, les monstres réussis, et les BD au graphisme original, jetez-vous dessus !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Maxence Sardane ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0