Chapitre 20
- Bonjour Monsieur Clessin. Peut-on vous parler quelques minutes s’il vous plait, demandèrent les grands-parents de Mathis, l’un de ses élèves, en voyant arriver l’attelage.
- Oui, pas de problème. Je dis juste au revoir aux enfants et j’arrive. Les élèves qui habitent le village, descendez, dit-il en ouvrant l’arrière de la remorque, et en abaissant les trois marches. Bonne soirée à tous, et à demain.
- Au revoir maître, à demain ! Ils sautaient à terre les uns après les autres, le cartable ou le sac sur le dos.
- Je vous en prie, entrez dans la classe, et asseyez-vous.
- Mathis, peux-tu aller jouer dans la cour s’il te plait, nous voulons parler seul à seul avec Monsieur Clessin, demanda son grand-père.
- D’accord, j’y vais.
Mathis sortit dans la cour avec les élèves de la garderie.
- Nous voulions nous entretenir avec vous, pour parler de la dissertation de Mathis qui évoque sa naissance. Elle nous a un peu… perturbés, commença sa grand-mère qui était à l’initiative du rendez-vous.
- Pour quelle raison ? Est-ce parce qu’il parle de la mort de sa maman ?
- Oui. Il est vrai que nous ne sommes pas tout à fait d’accord non plus avec notre gendre sur ce sujet. Il n’aurait pas dû lui expliquer avec autant de franchise qu’elle est morte des suites de l’accouchement lors sa naissance.
- Il ne pouvait pas inventer autre chose pour expliquer à Mathis pourquoi il n’a plus de maman.
- Oui, mais vous savez, moins en dit à un enfant, mieux c’est.
- Je ne suis pas d’accord avec vous. Mathis est capable de comprendre ce qui s’est passé. C’est important de lui dire la vérité sur sa maman.
- Il n’y a pas que ça. Depuis qu’il est tout petit nous lui disons que sa maman est montée au ciel, et qu’elle veille sur lui et peut le voir dans sa vie quotidienne.
- Et vous pensez que cela peut l’aider ? Est-ce qu’il vous parle de tout ça, lui ?
- Non. Justement. C’était la première fois qu’il parlait vraiment de sa maman, et avec autant d’émotion. Mais nous somme gênés par ce qu’il explique dans sa dissertation. Il dit que les atomes de sa maman sont maintenant dans d’autres êtres vivants, qu’ils se sont réincarnés. Cela ne correspond pas à nos croyances. Nous croyons à la résurrection, pas à la réincarnation.
- J’ai expliqué aux élèves que les atomes de leurs corps, et de tous les êtres vivants de cette planète d’ailleurs, étaient éternels, que la nature les réutilise à l’infini. C’est de la science, il n’y a pas de croyances là-dedans.
- Sa dissertation nous choque quand même.
- D’accord… Et avez-vous parlé de ce que vous pensez de son texte avec lui ?
- Oui. Mais il ne veut pas s’étendre sur le sujet. Pourtant, depuis ce travail, il a demandé à voir les albums photos de sa maman, et il a posé des questions sur elle, ce qu’il ne faisait jamais avant. Il évitait au contraire toutes les photos d’elle, comme si elles lui étaient trop douloureuses à regarder.
- Et bien, vous voyez, il ne faut pas vous inquiéter. Parlez-lui de sa maman, cela lui fera du bien, c’est important. Ce n’est pas un petit garçon bavard à l’école, mais il est extrêmement intelligent. Vous avez de la chance d’avoir un petit-fils comme lui.
- C’est gentil, merci. Et merci aussi de nous avoir reçus.
- Je vous en prie. N’hésitez pas à venir me voir en cas de problème. Je préfère qu’on s’explique et que le dialogue soit toujours présent avec les familles.
- Bonne soirée Monsieur Clessin, dirent-ils en lui serrant la main et en quittant les lieux.
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