Chapitre 16. Enfin les vacances.
Enfin les vacances ! Se dit Rachel, elle allait profiter de l’offre de Sophie, deux semaines et demi en all in, à la plage, farniente.
Il lui fallait encore préparer sa valise et elle devait être à l’aéroport très tôt demain matin… Vol charter, horaire charter.
C’est en taxi qu’elle arriva avec sa valise. Elle envoya un message à Sophie, histoire de savoir où se faire rendez-vous dans ce grand hall. Sophie ne répondit pas immédiatement, Rachel eu le temps de s’acheter un soda avant d’obtenir une réponse :
Devant le kiosque de l’agence « bon voyage », j’arrive dans un gros quart d’heure, on attend Louis aussi. Soph.
Un peu interloquée, Rachel songea,
Euh, oui, mais c’est quoi ça, « on attend Louis aussi » ? Quel Louis ?
Elle réfléchit tout en se rendant vers la pancarte de l’agence « bon voyage » et c’est là qu’elle comprit… En le voyant, lui aussi, consulter son portable. Il s’agissait de Louis Leblanc et de son bébé.
Super, pensa-t-elle, tu comptes encore m’annoncer quoi d’autre Sophie, qu’on devra partager la même chambre ? Purée, j’espère qu’il sera de meilleure composition que la dernière fois que je l’ai vu dans son bureau… Bon, allez, affiche un sourire et dit bonjour Rachel, si ça se fait, il ne te reconnaîtra pas !
— Bonjour Monsieur Leblanc, apparemment Sophie semble nous avoir fait rendez-vous ici, elle devrait arriver dans moins d’un quart d’heure, enfin, aux dernières nouvelles.
— Oh bonjour, vous êtes Rachel, qui remplace Marcel au pied levé,
Malgré le sourire qu’il afficha, elle le vit tiquer … Il tenta,
— Je vous connais, non ? Votre visage me dit quelque chose, vous travaillez à l’hôpital ?
— En effet, nous nous sommes déjà croisés, dans votre bureau, en radiologie,
En montrant le couffin du menton, elle rajouta,
— Je vous avais filé un coup de main pour Madeleine, c’est son prénom, si mes souvenirs sont bons, non ?
— Oui, c’est ça, Madeleine !
Cela fit « tilt » dans sa tête et il eut une impression de petite douche froide, c’était celle qui l’avait vu quand il avait craqué… Il hésita puis lui dit,
— Et vous c’est Rachel, du service de neuropsychiatrie, oui, je m’en souviens et je m’excuse d’avoir été sec avec vous ce jour-là, mais…
— Mais comme vous le disiez si bien, cela ne me regarde pas… Vous allez en Crète aussi ?
Ouaips, changeons de conversation se dit Rachel… Je vois bien qu’il m’a « remise » et il ne semble pas plus heureux que moi… Purée Sophie, qu’est-ce que tu as fait ! Misère…
— Oui, c’est là que je vais, à l’hôtel Playa beach, vous aussi ?
Il senti un froid, dont il était responsable, à l’origine… Il l’avait sèchement remballée, alors qu’elle l’avait aidé. Elle était sur ses gardes, il le comprenait, mais s’en voulait ; comment lui donner une autre image de lui, alors que cela avait si mal commencé… Et qu’ils seraient dans le même hôtel pendant deux semaines et demie.
Rachel confirma, en tentant de garder un sourire de façade.
— Oui… Nous serons apparemment dans le même hôtel. C’est Sophie qui vous l’a renseigné ? Vous avez réservé une chambre avec vue sur mer, piscine, jardin ?
Merde ! Confirmation, se dit Rachel… J’espère qu’il sera à l’autre bout du complexe ! Non quoi, je n’ai pas envie de passer mes vacances avec un mec bourru et mal poli sur le transat d’à côté… Il ne manquerait plus qu’on prenne tous nos repas ensemble… Je vois ça d’ici avec Sophie, elle le trouve si sympa !
— En fait, Sophie a réservé pour moi, elle m’a dit qu’elle connaissait bien l’hôtel, cela fait trois ans d’affilée qu’elle y va, elle demande toujours la même chambre familiale… Et elle a demandé celle d’à côté, une plus petite, pour Madeleine et moi. Apparemment, des chambres, on peut directement plonger dans la piscine…
Rachel le regarda lui donner le descriptif des chambres de l’hôtel, celui que Sophie lui avait déjà donné, oui, il y avait bien une petite terrasse d’où chaque locataire de la chambre pouvait entrer dans la piscine… Oui, il y avait un frigo rempli de soda tous les deux jours, oh oui, cela tombait bien pour le lait du bébé, oui, à la réception, ils prêtaient un chauffe-biberon etc. … Il semblait « à fond » dans ses explications, Rachel, elle, réfléchit, il semblait de meilleure composition que lors de leur rencontre, mais bon, elle avait bien vu qu’il avait tiqué lorsqu’il l’avait « remise ».
Pff, quel début de vacances ! Pensa Rachel qu’est-ce qui m’a pris d’accepter de remplacer Marcel ? Me voilà coincée avec ce type… Mais qu’est-ce que je vais faire là-bas ? Purée…
À un moment, Louis capta que Rachel n’écoutait plus ce qu’il déblatérait pour remplir la conversation, il finit par arrêter et lui demander, après avoir pris une bonne respiration pour oser le faire,
— Je vois bien que vous n’écoutez pas ce que raconte, j’imagine que Sophie vous a déjà fait le descriptif… Mais je sens bien qu’il y a autre chose, cela vous dérange que nous soyons dans le même hôtel ?
Autant demander clairement, pensa-t-il …
Rachel le regarda en haussant quelque peu les sourcils, étonnée de sa franchise, et lui répondit,
— En effet, Sophie m’avait déjà fait la description de l’hôtel, photo à l’appui pour bien me donner envie de venir.
Elle sourit en se remémorant l’énergie que Sophie avait dépensé pour la convaincre de remplacer Marcel… Puis, en regardant Louis droit dans les yeux, elle lui dit,
— Mais elle avait oublié de mentionner le voisinage prévu… Alors qu’elle savait très bien ce que je pensais de vous, je lui ai raconté notre « entrevue ». Mais bon, je demanderais à Sophie ce qu’il lui est passé par la tête dès que j’aurais un moment avec elle.
Dans ses petits souliers, Louis lui demanda :
— Et vous pensez quoi de moi ? Autant mettre les choses à plat si nous devons nous côtoyer pendant quelques semaines, non ?
Rachel fut un peu étonnée par cette proposition, elle trouva cela… Positif. Elle évoqua alors ce qu’elle avait ressenti face à son attitude lors de leur rencontre.
— C’est une perception personnelle, mais je vous ai vu comme une personne fermée et n’acceptant aucune aide, même si vous vous écroulez.
Elle fit une micro pause, observant son interlocuteur dont elle vit les joues se colorer ; colère ? Gène ? Elle précisa,
— Sachez que je suis en vacances, je ne ferais pas de soutien psy ! J’espère que Sophie ne s’est pas dit que « ça pourrait aider au cas où ».
Paf ! Mais quelle image de lui « fermé et écroulé » … Il déglutit et lui indiqua, dérouté,
— Mais vous savez, cela va mieux, j’étais dans une mauvaise passe…
— On peut être dans une mauvaise passe, c’est une chose que je peux parfaitement comprendre, mais c’est votre attitude bourrue qui m’a le plus heurté, je n’ai fait que vous aider, sans contrepartie, j’ai respecté le fait que vous ne désiriez pas en parler... Mais bon, j’espère pour vous que cela va effectivement mieux.
Le ton de Rachel fut sec. Heureusement sur ces entrefaites, Sophie arriva alors à leurs côtés et s’écria,
— Ah vous êtes là vous deux !
Louis respira en la voyant ; elle tombait à pic, la situation devenait un rien tendue entre Rachel et lui.
— Venez vite, il faut enregistrer les bagages au comptoir numéro dix, juste en face, Louis, t’as tout ce qu’il faut pour la petite dans l’avion ?
Content du changement d’ambiance, mais encore tendu par rapport à ce qu’il venait de se passer, il répondit plutôt sèchement, un chouillat agacé d’avoir l’impression de passer pour un incapable …
— Oui, t’inquiètes, j’ai fait la valise avec ma sœur ! Et je ne suis pas idiot non plus Soph !
Sophie tiqua, l’espace d’une seconde, puis interrogea son amie,
— Et toi, Rachel, t’as tout ?
Elle se rapprocha d’elle tout en disant à Louis de prendre une place dans la file
— Ça va ? Ça ne te dérange pas trop qu’il soit là ?
Sophie lui fit une petite moue de chien battu en le lui demandant et précisa,
— Je suis sûre que vous vous entendrez très bien, je le connais depuis des années, et toi, je te vois bien avec lui, je t’assure !
Rachel éclata de rire, évacuant la tension qui grandissait en elle depuis la discussion avec Louis. Elle répondit ensuite à Sophie, sur un ton ironique,
— Ah bon ! Ah ben merci, je crois que tu ne l’as jamais vu dans ses mauvais jours, il est d’une froideur ! Là, il a l’air tout gentil, mais moi, j’en ai déjà vu un autre visage ! Sympa le traquenard, Sophie.
Son amie insista,
— Oui, mais c’est l’occasion de connaître son vrai visage, ce que tu as vu c’est ce qu’il montre à ceux qu’il ne connaît pas.
Amusée par l’insistance de Sophie, elle tenta,
— Ah oui, dis-moi Sophie, c’est comme cela qu’il a dragué le top model alors ? Allez, te fout pas de moi, et pour ton coté « entremetteuse », je n’ai pas le gabarit de l’autre, en gros, 10 cm de moins, mais 10kg de plus au compteur.
— Rachel, t’es en vacances, tu vas oublier ce connard d’Alban et tu vas t’amuser, point à la ligne !
Elle la poussa vers la file où Louis avait déjà ramené toutes les valises. Rachel conclut alors ;
— En fait, Sophie, tu as décidé de faire ta « B.A. » de l’année en amenant en vacances les âmes en peine de l’hosto… Purée, ça va être sympa les repas, on se passera les mouchoirs pour pleurer, lui parce qu’il a eu des cornes et que maintenant, il a un bébé, moi parce qu’Alban a confirmé qu’il était un connard et toi parce que Marcel n’a pas su venir à cause du boulot !
Elles éclatèrent de rire toutes les deux.
Louis sourit à les voir s’esclaffer de la sorte, il les regarda arriver vers lui, avec les deux fils de Sophie et Madeleine qu’il avait mis à présent dans un porte-bébé ventral. Il resta cependant un peu inquiet, ce que lui avait dit Rachel lui trottait en tête… Il allait devoir la côtoyer tous les jours, et elle semblait assez « tranchée » dans ce qu’elle pensait de lui ; l’image qu’il lui avait donnée n’était effectivement pas celle du gars sympa avec qui il est agréable d’envisager de passer des vacances…
De toute façon, le mal est fait… À moi de tenter de modifier cette image, pensa-t-il.
Après le dépôt des valises, ils prirent le chemin du point d’embarquement prévu sur leurs tickets. Le passage à la douane ne fut pas compliqué et l’attente de l’embarquement ne fut pas trop longue.
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