Chapitre 3 : Jéricho
Entre un morceau de pain grillé garni de beurre et de confiture d’abricot et une gorgée de lait chocolaté, Joanie interrogea de nouveau Fred.
— Alors, c’est quoi cette histoire d’opération Jéricho ? Pourquoi c’est si grave ? Je veux dire, en plus des morts, tout ça…
— Un raid aérien effectué par la Royal Air Force, en 1944, sur la prison d’Amiens. L’idée, c’était de libérer des agents secrets alliés et des résistants français.
— Quel rapport avec le bombardement de cette prison ? demanda Joanie.
— Dix-huit avions type Moskito FB Mk VI ont mené l’attaque, ça te parle (1) ? répondit Fred. En réalité, il est plus que probable que cette opération fût un leurre, destiné à induire les Allemands en erreur, en leur faisant croire qu’un débarquement se préparait dans le Pas-de-Calais.
— Comment tu sais ça ? T’es un féru d’histoire, toi, ou quoi ?
— Non, j’ai juste vu ça dans une émission, à la télé.
— Bon, OK, mais je vois toujours pas le rapport avec Alban…
— Amiens, ça fait un deuxième point commun. Tu te souviens, ce que je t’ai raconté, le Cours Jules Ferry, la rue Jean Boen, la Tour Perret, la cabine téléphonique, l’Étrangleur, tout ça, c’était à Amiens (2). C’est là-bas qu’on a eu nos diplômes, Hector et moi.
— Bon, admettons. Ça veut dire qu’il a peut-être vu la même émission que toi et qu’il a demandé de simuler cette attaque à un de ses potes, à l’extérieur.
— Je ne pense pas que les choses se soient déroulées comme ça…
— Attends, c’est évident, tu vois une émission d’histoire à la télé, et quelques jours après, l’attaque décrite dans ce show est reproduite avec des maquettes…
— Pas quelques jours, coupa Fred, quelques années…
— Pardon, demanda Joanie, abasourdie, qu’est-ce que tu as dit ?
— Quelques années, répondit Fred, finissant son café.
— Tu te fous de moi ? Comment tu peux te souvenir de ce genre de détails, si t’as vu ça une fois il y a une centaine d’années ? s’étonna, amusée, Joanie.
— J’arrive à me souvenir d’un tas de choses inutiles, c’est mon super-pouvoir, ça ne vaut rien, mais c’est comme ça…
— Tu vas faire quoi ?
— Il faut qu’on le retrouve, qu’on l’enferme pour de bon. Lui, et ses complices, ceux qui ont mené l’attaque.
— On ? Tu veux dire que je ne vais plus en Alsace ?
— On, comme, je dois donner un coup de main à Hector, ils doivent être nombreux, dans le montage de cette opération. Il aura besoin de toute l’aide possible. Cela dit, non, tu ne pars pas là-bas, pas pour l’instant. Il faut assurer ta sécurité. Je vais t’enseigner deux ou trois trucs, cours accélérés, tu vas devoir apprendre vite. On commence ce matin.
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(1) Voir Épisode IV : Traumatismes
(2) Voir Épisode III : Les Masques tombent
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