Chapitre 7 : Organiser la défense

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L’Aston-Martin s’arrêta devant un immeuble datant de la fin du dix-neuvième siècle, récemment entré dans un programme municipal de nettoyage des façades du centre, ce qui avait eu la vertu de lui faire retrouver son blanc d’origine, et, du même coup, de lui faire refléter bien mieux la lumière du soleil. Toute l’avenue avait gagné en clarté et en charme. Hector et Nathalie sortirent du coupé anglais, mais le conducteur s’adressa à sa passagère.

— Non, Nathalie, j’y vais seul.

— Tu ne vas pas me refaire ce coup-là ?

— Je veux que tu prennes la voiture et que tu retournes au centre. C’est toi qui veilleras sur Luc et sa famille. On doit répartir les ressources.

— Moi ? Au centre ? Veiller sur Luc ? Avec Marie et Roger pendus à mes basques ? Tu plaisantes, là ?

— Angélique t’as vue à Santa Monica, et elle ne te connais pas. Comment crois-tu qu’elle va réagir si tu te pointes chez elle ?

— Et comment crois-tu qu’ils vont réagir, là-bas ?

— Ils entendront raison. Ils n’auront pas le choix. Et ils ne te feront rien, tu es plus forte qu’eux tous réunis.

Tandis que le coupé anglais noir repartait, Hector se présenta à l’interphone, puis une sonnerie électrique rauque lui donna le signal pour pousser la lourde porte. Il gravit l’escalier jusqu’au deuxième étage et vit la porte du fond du couloir, sur le palier, s’ouvrir timidement. Revoyant son ancien patron pour la première fois depuis son stage et le test en laboratoire (1), Angélique fondit en larmes et se laissa tomber dans ses bras.

— Qu’est-ce qui se passe, Monsieur Fischer ? Qu’est-ce que c’est que tout ça ? Et vous faites quoi, vous ? Vous êtes qui ?

— Écoute, rien n’est sûr, mais on prend des précautions. Viens à l’intérieur, je vais t’expliquer.

— Mais j’ai rien demandé à personne, moi… continua la jeune femme. Et j’ai été enlevée (2), menacée de mort, on m’a implanté ce truc, là (3). Et vous, et monsieur Muslin, je croyais vous connaître, au moins un peu, je croyais que vous étiez amis…

— Je le croyais aussi, ils nous a tous bernés. Et toi, il t’a fait bien plus que ça.

— Et je croyais que c’était fini, que j’allais pouvoir reprendre une vie normale, et ça recommence…

— Je sais, c’est pour ça que je suis là, je vais m’assurer personnellement qu’il ne t’arrive plus rien. Mais François, ou plutôt Alban, puisque c’est son vrai nom, il a été mis sous les verrous à la suite de Santa Monica, grâce à celui-là même qui t’as sauvée de l’éboulement de l’immeuble. Mais tu as peut-être entendu parler, ces jours-ci, d’une attaque aérienne sur une prison, en région parisienne. C’était lui, on en est quasiment sûr, il s’est évadé. Et il a proféré des menaces, suffisamment inquiétantes pour qu’on les prenne au sérieux, et suffisamment floues pour qu’on soit dans l’obligation de protéger plusieurs personnes à la fois.

— Et c’est qui, on ?

— Nous sommes une équipe, plusieurs personnes avec des compétences très particulières, acquises après plusieurs années d’activité menées parallèlement à nos vies normales.

— Mais vous étiez tout le temps au bureau, ou alors avec vos enfants…

— J’ai arrêté pendant quelques années, mais pas les autres.

— Les autres ?

— Oui, il y a l’homme qui t’a sauvée, il y a Marie, que tu connais déjà, et son mari, Roger, que tu as vu aussi, et il y a… Hector eut une demi-seconde d’hésitation, il y a une femme, avec qui je faisais équipe, à l’époque.

— Et vous disiez que vous deviez protéger plusieurs personnes en même temps ?

— Oui, tu es l’une d’elles, il y a aussi le fils de Marie et Roger, et une jeune fille… De nouveau, Hector hésita, la fille de l’homme qui t’a sauvée. Pour ces deux-là, on s’inquiète moins, ils devraient pouvoir se défendre en cas de coup dur. Et enfin, il y a le fils d’une de nos collaboratrices, ainsi que sa femme et son fils.

— Et c’est vous qui venez pour moi ? Parce que les autres sont plus nombreux, ils ont préféré les faire protéger par des gens plus expérimentés ?

— C’est moi qui t’ai choisie. Et tu peux avoir pitié du pauvre bougre qui viendrait ici dans l’intention de te nuire, parce que moi, je n’aurai aucune pitié, je ne faiblirai pas, et je n’échouerai pas, tu peux me faire confiance.

L’assurance d’Hector avait calmé les émotions de sa jeune stagiaire qui venait de servir un café à son invité.

— Dis-moi, on peut voir la lumière à travers tes volets ? À quelle heure as-tu l’habitude de tout éteindre ?

— En général, je me couche vers onze heures, onze heures trente. Mais en ce moment, c’est plutôt vers huit heures. Pourquoi ?

— S’ils décident de s’attaquer à toi, on va leur donner une occasion d’entrer et on va leur faire comprendre leur erreur. On leur tend un piège. Pour ça, comme je suppose qu’ils doivent te surveiller, on va leur faire croire que rien n’a changé dans tes habitudes. Ils entreront en toute confiance, et on les cueillera.

— Vous êtes sûr que ça va marcher ? Je serai tranquille, après ?

— Je te promets que tout va bien se passer. Je vais sortir faire une petite course, je reviens vite. Toi, tu ne changes rien à tes habitudes du moment. Ne t’occupe pas de moi. Fais-moi confiance.

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(1) Voir Épisode I : Retour aux sources

(2) Voir Épisode III : Les Masques tombent

(3) Voir Épisode IV : Traumatismes

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