Prologue : Encore ce rêve
Le téléphone sonne. Je décroche le combiné, dans l’entrée. Cette voix, que je ne connais que trop bien, ne peut cacher sa peur panique.
— Daddy, viens nous chercher, on a besoin de toi !
Cent fois je l’ai fait, ce rêve, ce cauchemar. Comme cent fois avant, je me hâte, j’arrive, tenez bon ! Comme cent fois avant, cette voix douce me retient, me renvoie.
— Il est trop tard, Monsieur, vous ne devez pas rester ici, vous devez repartir.
Comme cent fois avant, la douleur, je n’ai pas été à la hauteur, comme cent fois avant, vous m’avez fait confiance, comme cent fois avant, je vous ai fait défaut. Mes pauvres enfants, votre pauvre maman, je n’ai pas été là pour vous, et vous n’êtes plus là pour moi. Et moi, je deviens quoi ? Et toi… Toi, tu es là, enfin, toi, tu es restée parmi nous, il ne me reste plus que toi, toi que je ne connais pas, toi qui as perdu ta pauvre maman, tes pauvres sœurs, il ne te reste que moi, mais tu ne me connais pas, j’en suis tellement désolé.
Et cet ange qui vient me condamner, comme cent fois avant, il rend la douleur plus insupportable encore. Et ce diable, qui vient me narguer, fier de m’avoir fait tomber dans son piège, infâme manipulateur, odieux intriguant, qui s’est laissé prendre, pour mieux nous punir, à son tour. Tant de haine, tant de malice, tant de rancœur, plus que notre corps, plus que notre cœur, c’est notre âme qu’il veut nous prendre. Le laisserons-nous faire ? Le laisserai-je nous emporter dans sa folie ? Mais comment arrête-t-on le diable ?
Sortir de ce cauchemar, se réveiller, se relever, repartir de l’avant.
Sortir de ce cauchemar, ouvrir les yeux, tu es là, Toi, dans l’encadrement de la porte, tu m’observes, tu me regardes sortir de ma torpeur.
Le soleil brille enfin, jusqu’à ce soir…
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