Action
Malgré tout, Pierrot n’était pas tranquille. Il encouragea son frère à continuer leur course. Arrivés en haut du chemin, aucune trace de Mehdi. La vue s’étendait au loin, jusqu’à la mer. L’anxiété était très forte et les garçons s’affolaient. Pierrot décida de passer à travers le maquis pour rechercher son ami. Cependant, Jean-Claude était épuisé par la course et surtout par ses respirations haletantes. Son asthme menaçait et il était préférable pour lui de continuer le chemin, seul, lentement en se cachant dès qu’un frôlement, un bruissement ou n’importe quel indice suspect se présentait. Jean-Claude était physiquement un peu plus faible que Pierrot, mais son intelligence était vive et son courage comblerait sa lenteur.
Les frères se serrèrent dans les bras. Courage.
Ils se séparèrent. La peur les motivait. Pierrot commença sa recherche, le maquis dense lui griffait les jambes, le sable rentrait dans ses chaussures de toile, la sueur coulait dans son dos. Ses pensées se dispersaient, Mehdi, Jean-Claude, la famille dans le cabanon.
Pourquoi se targuer d'être les défenseurs de la liberté si c'était pour éclabousser les communautés de cruauté ? A quoi bon ? Ce pays de lumière n’appartenait à personne, il était destiné à servir de refuge à tant de populations, et ceci depuis l’Antiquité. Les religions diverses se côtoyaient sans réellement vivre ensemble, les races ne se mélangeaient pas. Mais si les enfants pouvaient jouer ensemble, Mehdi, Mohamed, Louis, Pierre et les frères Cohen, pourquoi à l’âge adulte, ces querelles, ces guerres se succédaient-elles? Cette terre vaste et tellement belle pouvait abriter tout le monde, il suffisait de combattre les extrémistes de toutes les communautés, même les colons qui ne respectaient pas ces valeurs, et en faire une terre d’accueil, celle qu’elle a toujours été. Personne n’est arrivé en premier. L’amour pour ce pays était le lien commun entre-tous. La beauté peut se partager.
Pierrot ne se laissait pas submerger par ces pensées qui le hantaient. Il fallait courir, en silence, de cachette en cachette, mais aucune piste ne se présentait à lui. Aucun bruit, aucune trace de pas dans le sable. Il ne sentait pas l’épuisement, ni la soif. Cependant, après une heure, exténué, il s’accroupit derrière un arbuste tout sec. Et c’est là, qu’il vit quelques hommes, les visages burinés, leurs burnous cachant leurs silhouettes. Ils étaient armés et entouraient le jeune Mehdi. Ils ne semblaient pas agressifs mais ils écoutaient attentivement le garçon qui semblait faire une véritable plaidoirie, Il agitait les mains, montrait la montagne au loin, se déplaçait de l’un à l’autre. Son discours semblait captiver ces hommes capables de tuer des villages entiers. Et puis, après ce long monologue, les hommes de la guérilla le laissèrent partir.
Pierrot n’osa pas se lever de suite, il repartit vers le chemin, il croiserait bien Mehdi à un moment donné. Les idées plus claires, il décida à ce moment précis, qu’il jurait devant Dieu de ne jamais faire partie d’un groupe extrémiste, qu’il soit français, arabe ou de s'investir dans une cause qui ne respecterait pas les différences. Ce jour fut une vraie révélation pour le jeune garçon. Toute sa vie, il respecterait cette promesse. Il retrouva Mehdi, quelques centaines de mètres plus loin et celui-ci lui raconta qu'il avait été cerné par ces hommes qui l'avaient forcé à les suivre et avec quelle créativité il leur avait expliqué, qu’il se baladait tranquillement et qu’il avait vu des jeunes gens qui s’enfuyaient vers la montagne. Il était fier de sa prouesse d’avoir baladé tout une troupe de militants qui l’aurait frappé s’il avait avoué cette trahison. Maintenant, il était temps de retrouver Jean-Claude et la famille au cabanon. La peur ne les lâcha pas jusqu’à ce qu’ils aperçoivent la petite maison, au loin.
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