Rupture
Agathe,
Après toutes ces échauffourées, ces mots (pensés ?) jetés entre nous deux, je prends le taureau par les cornes en t’envoyant cette lettre. J'espère que tu pourras comprendre. Je ne veux pas te parler face à face, peur d'être stoppé par tes remarques et ton étonnement avant même de commencer.
Tu vas être déçue, étonnée, en colère. Tu ne vas pas comprendre, tu vas me détester.
Mon cœur est lourd de ton amertume future.
Je pense que nous avons eu tort de nous mettre ensemble peu de temps après notre rencontre. Cela a tout changé. Au début, tu t’es montrée amoureuse, débordante, prête à tout pour nous deux, créant à chaque rencontre des espaces nouveaux, tu m’as secoué, éjecté de ma zone de confort d’éternel jeune homme sans attaches, poussé dans mes retranchements et j’avoue que ça ne m’a pas déplu.
Au début, ce fut l’extase, à en perdre jugeote et sagesse. On a été fous, exaltés, perchés au-dessus de nos nuages d’amour. Ça a été enchanteur et surnaturel. On a voulu que ça dure, que ça dure et on a cherché un appartement pour ne plus être séparés.
Seulement, dès qu’on s’est calés ensemble dans notre refuge d’amour, la vapeur s’est renversée ! Nos cœurs tout à coup se sont calmés. Etrange phénomène. Tu es devenue plus douce et plus ennuyeuse… Tu as perdu tes accès de fougue, d’ardeur …. Et au fur et à mesure de ces jours à deux, tout est devenu pesant.
J'étouffe.
Les flammes ne sont plus que des cendres.
On a été trop pressés, on y a cru, former un couple nous a semblé couler de source. Les moments de grâce des débuts, le cœur battant, l’âme exaltée, dans les parcs et dans les cafés, nos balades sans but dans les rues nous ont semblé éternels.
Alors, rassembler nos âmes dans le même foyer n’a soulevé aucun doute pour nous deux.
Ce que je peux te révéler et t’avouer, c'est que durant ton absence de quelques jours, le soulagement et le bonheur retrouvé comme des fenêtres ouvertes sur ma légèreté d’avant ont conforté les murmures de mon cœur. D’abord un fort étonnement accompagné de doute (ma tête ne tourne plus rond ?) et tout à coup, une grande clarté sans appel.
Je ne peux pas passer à côté de ce que j’éprouve.
Je ne veux plus m’ennuyer à tes côtés.
Je ne peux que m’envoler.
Mes fenêtres sont ouvertes de nouveau.
Jean
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