Vendredi 28 Août 2116. Je lui envoie un message pour savoir si on peut se voir. Je reçois un rendez-vous en confirmation. À la Caserne. Sur son terrain. Quand elle ouvre la porte, elle est digne mais je vois qu’elle a pleuré.

• Greta, je regrette. Je ne veux pas qu’on soit ennemies. Je veux qu’on soit amies.
• J’en ai beaucoup eue tu sais. À chaque fois ça a été différent. Avec toi c’est… No word.

Elle sourit. Je la prends dans mes bras. On soupire. On est bien, là.

• Je suis désolée, Bri. Je m’excuse. J’ai perdu le contrôle.
• Je suis le Pôle Sud. Tu es toute déboussolée. C’est ma faute. On doit garder nos distances, ne pas être trop intimes.

On relâche notre étreinte et on se regarde. Ses yeux sont gris. Je vois la vraie Greta. Sans artifices. Sans magie. Tout simplement elle. Un petit bisou. Sur le coin de la bouche. Sur la bouche. Avec les lèvres. Avec la langue. Tant de douceur. On est interrompues, par Mona qui tire la robe de Greta.

• Mamma !

Elle est mignonne avec ses boucles d’or et ses beaux yeux bleus et elle exprime une tendresse pour sa mère que je n’ai jamais eu de mes enfants. Ça doit être le résultat d’une gestation lente. Greta la prend dans les bras.

• Avec elle aussi c’est différent, de toutes mes autres filles. On a de la chance, Bri, d’avoir une famille. On n’est pas que Greta et Bri, on est aussi nos familles. On est des femmes accomplies à la tête de nos tribues. C’est une bénédiction, il faut le considérer comme telle. J’étais une vieille femme qui a perdu sa planète et mes pouvoirs et votre technologie m’a amené ici avec d’autres élues. Maintenant que nous sommes toutes sauvées, on a besoin d’être protégées, c’est là que ton devoir commence. Je sauve, tu protège. Pôle Nord, Pôle Sud.

Je la laisse en famille, en paix, et je rentre dans la mienne. J’espère en secret un jour reboire de son lait, si elle continue d’en produire. Ou peut-être aussi lui faire goûter au mien, si l’occasion se présente. Je n’en ai pas fini avec Greta, loin de là. Nous sommes liées maintenant, d’une façon ou d’une autre. Mais la prochaine fois j’aimerais qu’on parle en terrain neutre. Et cette histoire de pôle me fait penser à l’Équateur, c’est le nom de la cafétéria à l’École des Arts, exactement entre Laguna et Sylvania. Étonnant, non ? Je prends mon dark et je demande à Izzy si elle peut faire visiter son Musée fantôme à Greta. L’invitation est lancée.