Chapitre 32: Les disparus

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Parmi tous ceux que l’on aurait pu choisir, c’était lui que l’on avait désigné. Et malheureusement, il n’avait pas eu le courage de refuser. Cela n’aurait pas été correct. Refuser une telle mission, à un tel moment, dans de telles circonstances… Surtout qu’il s’agissait d’une décision du doyen lui-même. Et pourtant, Dario ne le connaissait pas personnellement, n’avait jamais de discussion directe avec lui. Il savait juste que c’était en quelque sorte le chef et que personne ne pouvait discuter ses ordres. Rien que ça. Dario avait tout de suite regretté sa question ce jour-là. Une histoire de prophétie ou je ne sais quoi, qu’il lui avait dit. Rien que ça. En quoi est-ce qu’il avait une tête de prophète ? Dario le savait et l’assumait, il avait toujours été fainéant. Désormais, il était sur le chemin. À pied. À pied car la voiture était déjà en panne. Et il restait 8 longs kilomètres jusqu’au village voisin. Rien que ça. Rien que ça, et Dario en avait plus que marre. Plus que marre était un euphémisme. Pour qui il se prenait ce doyen ? Et Dario cheminait depuis maintenant trois bons quarts d’heure. Trois quarts d’heure pendant lesquels il s’était longuement questionné sur sa raison d’être. Le jeune homme devait bien sûr se rendre à l’évidence. Même s’il était resté là-bas, il se serait mortellement ennuyé. Au moins, sur ce sentier longeant la forêt, il était loin de l’agitation, de la tristesse, des cris, de la peine, de la mort…

Et il était loin de toutes responsabilités.

À part qu’il devait aller au village voisin pour jouer au petit messager. Rien que ça.

Épuisé, il s’arrêta quelques secondes sur le côté de la route, s’asseyant sur une souche.

Perdu dans ses pensées, il se surprit à contempler la forêt. Le murmure des feuilles parvenait à ses oreilles comme une multitude de doux chuchotements tandis que le vent taquinait sa chevelure. Il regarda les arbres, majestueux, et se demanda quel âge ils pouvaient bien avoir. Depuis quand cette forêt existait-elle ? Mais plus encore, pourquoi se sentait-il irrémédiablement attiré par elle ? La brise sifflant entre les branches lui jouait sûrement des tours, mais il avait l’impression d’entendre des éclats de voix, et plus précisément, des rires.

Il ne saurait pas dire pourquoi, mais Dario avait l’impression que quelqu’un ou quelque chose était en train de se moquer de lui. Il jeta un regard aux alentours, personne. Alors, il se releva, et les risées reprirent de plus belle, enfantines. Cela ne le faisait absolument pas rire. On l'observait, il en était certain. Mais les éclats de rire étaient bien trop proches maintenant pour qu’il puisse tenter de s’échapper. Il n’avait plus qu’à attendre que les choses se montrent, dans la crainte de tomber sur le pire qu’il pourrait imaginer. Dario pensa alors qu’il se montait un peu trop la tête. C’était sûrement juste des enfants qui avaient eu une envie soudaine de se balader dans la forêt. Là, ils devaient être en train de jouer à un jeu débile comme cache-cache. D’où les rires. Voilà, juste deux enfants qui se promènent dans la… forêt.

Oui, dans la forêt.

C’est pourtant interdit pensa-t-il alors.

Mais ce sont des enfants, ils n’en ont rien à faire se répliqua-t-il en esprit.

Et pourtant, Dario avait beau essayé de se convaincre du contraire, il sentait qu’une énorme menace planait au-dessus de lui.

Une goutte de pluie effleura le bout de son nez. Une autre vint s’écraser peu après sur la manche de son manteau.

En à peine quelques secondes, le bleu vif du ciel s’était assombri, caché par des nuages de noirceur. Des trombes d’eau se déversaient désormais sur le sol, tout autour du jeune homme.

Les rires s’intensifièrent, se muant en une véritable cacophonie. Par-delà les rires, des cris atroces.

Pétrifié par la peur, Dario ne pouvait plus bouger un seul muscle, une seule articulation de son corps. Il sentait, tout autour de son cou, une mâchoire acérée se refermer peu à peu. Au milieu des silhouettes vacillantes des arbres, quelque chose attira cependant l’attention de l’homme transi d’effroi. Un point blanc lumineux éclairait le cœur de la tempête qui faisait rage à l’intérieur de la forêt. Espoir… Espoir… Espoir… Espoir…

ESPOIR !

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