Chapitre 56: Le temps d'un sourire

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La soupe était vraiment succulente. Comme à son habitude.

Tout allait bien, vraiment trop bien. Alexandre se murait dans le silence. Était-il encore sous le choc ? Cette bête, le regard qu’elle lui avait lancé. Comme si ce n’était pas lui qu’elle voyait. Comment la fenêtre s’était-elle retrouvée ouverte ? Pourquoi le loup était-il entré ? Qu’est-ce qui avait pu lui faire peur au point de prendre ses jambes à son cou si prestement ? Tant de questions pour absolument aucune réponse.

Il faisait chaud dans l'habitacle. La discussion battait son plein, les assiettes se vidant progressivement au fil des propos captivants des convives. Lui, avait froid. Froid à l’intérieur. Quelque chose n’est pas normal… Cette femme, Maria, était un modèle de gentillesse, de joie, de bonne humeur. Le temps d’un sourire… Alexandre se figeait d’effroi. Dents blanches immaculées aux reflets fantomatiques. Perfection figée, presque cadavérique. L’imagination morbide du garçon le plaçait face à la charogne putride d’un spectre méphitique.

Ses orbites vides, son rire à glacer le sang.

Sa présence changeait l’atmosphère douce et tranquille de cette nuit d’automne en désert sans fin, néant d’aliénation. Était-il le seul à sentir la menace silencieuse ? Une aura se dégageait de l’inconnue, fumées abstraites prenant vie en prenant celle des organismes alentour. Délimitant un territoire au-delà duquel rien n’est garanti. Révélant au dernier instant la nature du prédateur. La femme était-elle vraiment celle qu’elle prétendait être ?

Chacun de ses mouvements lui donnait une profonde sensation de mal-être. L’odeur alléchante des mets était éclipsée par celle, rance et nauséabonde, de la sinistre apparition. Ses mots sonnaient creux, sans conviction. Utilisés pour tromper. Alexandre n’avait pas du tout confiance en cette ”Maria”. Qui était-elle ?

Alors que les mots continuaient de s’échanger, l’espace d’un instant, le garçon se sentit sondé, observé sous toutes ses coutures. Les yeux de la femme s’étaient posés sur lui moins d’une seconde. Disséqué, son esprit n’avait plus rien à cacher.

  • Excusez-moi, pouvez-vous m’indiquer où sont les toilettes ? Je crains d’avoir à les utiliser.

  • Il n’y a pas de problèmes, c’est au fond à droite dans le couloir !

  • Merci beaucoup.

Maria se leva de table.

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