La vérité absolue n'existe pas
Joli tableau. Génial même. Toute l’allégresse de l’artiste est concentrée dans cette minuscule toile de deux mètres de haut. Cette couleur pêche ne pouvait pas être mieux choisie. Quelques nuances laissent cependant paraître sa rage. La haine de l’Humanité, évidemment. Le peintre est en colère, contre ceux qui répandent le mal et ceux qui les laissent faire. Une pointe de déception dans le coin supérieur droit, juste au-dessus de ce halo de lumière qui pourrait indiquer l’espoir d’un monde nouveau. Un lieu paisible, une forêt peut-être ? où les enfants de Mère Nature cohabiteraient.
Et cette forme si géométrique… La peinture étouffe dans ce carré si parfait. Cela représente clairement la prison psychologique dans laquelle nous sommes tous. Dépourvus de toute réflexion, aucun moyen de sortir et de nous battre pour changer les choses. Spectateurs de notre vie, complices passifs d’un meurtre de masse, d’une explosion du mal, une pandémie d’égoïsme qui frappe la planète. Cette cage qui retient l’essence-même de l’œuvre, c’est la restriction, les règles, la fausse liberté, une hypocrisie démesurée qui nous laisse croire que nous vivons bien.
Voilà en quoi cette œuvre relève du génie : l’artiste y a peint le visage de l’Humanité, sous toutes ses formes : le bien, le mal, l’Histoire, l’aveuglement. C’est toute une dénonciation qui se cache derrière ce rose-orangé. Toute une réflexion. Admirer ce tableau, c’est voir les rouages de la pensée du peintre. C’est la sagesse. C’est toutes les valeurs humaines rangées dans une boîte rose. C’est du grand art !
« Mademoiselle ! Mademoiselle. Venez voir, deux minutes. Regardez donc ce tableau. Vous en êtes toute remuée, pas vrai ? — Pourquoi ? C’est juste un carré rose. — Non, non ! Regardez mieux. Concentrez-vous. Que voyez-vous vraiment ? — … Ben… ça m’évoque une pêche, vue de très près. — Ah, la jeunesse. Dès que vous sortez d’Internet, vous ne savez plus penser. La réflexion, vous connaissez ? On dirait que votre cerveau se déconnecte quand vous n’avez plus de wifi. Vous ne savez plus interpréter, résoudre les énigmes, lire entre lignes. La stupidité vous menace. »
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