Petite plume d'amertume
Vous êtes toutes et tous réunis pour accompagner Carole dans son dernier voyage.
Ça tombe bien, Carole c'est moi, enfin c'était moi. Vous pensiez peut-être me connaître mais peut-être pas suffisamment puisque c'est moi qui suis obligée de faire cette put- pardon cette satanée éloge funèbre.
j'ai passé ma vie à courir après le bonheur et à fuir la routine, alors que le bonheur je l'ai eu, il était là caché dans ma routine. Ironie de la vie, c'est lorsque j'ai su que j'avais raté l'heure de son grand départ, que j'ai compris que mon bonheur était rangé dans ses valises. Tapi entre nos doux souvenirs tendres et libertins et mes pires trahisons.
J'ai, depuis, continué à essayer de retrouver le sel de cette vie mais jamais n'ai retrouvé le goût de ce qu'il m'avait apporté.
Toutes ces chimères et tout cet alcool ingurgité lors de cette existence passée à chercher toujours mieux.
Vous ne l'avez sans doute pas vu derrière ce masque fait de sourires, mais la tristesse et l'amertume sont restées là, comme deux vieilles amies qui n'ont eu de cesse de grandir au long de ce parcours.
Passé tant de temps depuis à rechercher son image à fuir son contraire puis l'inverse, alors qu'il était là, à attendre que je lui revienne, patiemment.
j'ai aussi toujours veillé a donner le sourire à ceux que je croisais, ou tout du moins à ceux que j'ai laissé s'approcher de moi.
Rappelez-vous nos fous rires et nos échanges, nos apéros, nos digeos toutes ces soirées enfumées.
À tous ces êtres mauvais qui m'ont blessée, brisée, je ne pars pas sans vous avoir oubliés, je trouverais bien un instant pour revenir vous hanter.
À tous les autres qui ont partagé ce bout de chemin avec moi, une part de vous m'accompagne vers ce je ne sais où, et nous nous tiendrons chaud, le moment venu.
Cependant, n'ayez aucune tristesse, ni regret, je suis partie, envolée, légère comme une petite plume d'amertume soulevée par le vent du destin vers d'autres horizons.
Non, cachez-moi ces larmes, car, enfin, je suis partie rejoindre celui qui m'a tant aimé et que j'ai tant blessé. Imaginez simplement qu'après s'être regardés, et tout simplement pardonnés, nous venons, enfin, de nous retrouver et maintenant nous sommes enlacés... pour un peu plus que l'eternité.
Annotations
Versions