Elle préfère l'amour en mer
JJe suis femme, capitaine d’un bateau vert et blanc, d’une élégance rare, et plus fort que l’ébène, pour les trop mauvais temps.(1)
Née dans une famille de marins, j’ai passé mon enfance dans un petit port. Mon père m’emmenait souvent sur son rafiot de pêche lorsque c’était le week-end et que le temps n’était pas trop mauvais. Mes études m’amenèrent vers l’ingénierie navale et je travaillai ensuite aux chantiers de Saint-Nazaire.
J’étais jeune ingénieure lorsque que je découvris l’amour de ma vie. C’est un fameux trois-mâts fin comme un oiseau […] Dix-huit nœuds, quatre cents tonneaux(2), mais il était en très mauvais état. Ce jour-là que je décidai de mon futur.
Je dus en faire l’expertise pour savoir s’il était réparable. J’indiquai aux propriétaires que les coûts de réparations en matériaux et main d’œuvre seraient exorbitants. J’exagérai un peu mais c’était plutôt vrai en ce qui concernait le prix du travail manuel à réaliser. Ils décidèrent, comme je l’espérais, de s’en séparer. Je ne pouvais l’acheter directement, alors je le laissai acquérir par les ateliers, pour destruction.
Entre-temps j’avais préparé un business plan, qui tenait la route, pour ma banque. Je pus alors emprunter de l’argent. J’acquis l’objet de mon désir pour une bouchée de pain et j’effectuai les travaux moi-même avec l’aide ponctuelle de quelques amis et un peu de travail au noir. Le plus cher étant la cale sèche. Je la nommai Armelle, car ce devait être une fille !
Lorsqu’au bout d’un an ou deux mon bateau fut prêt, je quittai mon travail aux ateliers et montai mon affaire. Il s’agissait d’accueillir un tourisme un peu spécial qui viendrait pour apprendre la navigation. L’idée était que les gens paieraient pour leur formation, et moi je pourrais naviguer. J’engageai comme second une ancienne camarade qui vivait difficilement en tant que pêcheur dans mon village natal.
Nous coachâmes quelques équipages, puis un jour je décidai que je ferai le tour du monde pour voir à chaque étape si tous les gars du monde veulent bien me lâcher la grappe(3). Je sélectionnai alors particulièrement bien mon équipage : des gens ayant déjà navigué mais voulant se perfectionner sur un voilier. Il fallait donc que nous soyons toutes deux satisfaites. Je m’occupai de recruter des filles pendant qu’elle s’occuperait des mecs. Je les choisis célibataires et tentai de voir par des œillades et allusions si elles répondaient à mes attentes saphiques. La plupart étaient assez opaque, mais je pus déceler une sensibilité chez quelques-unes d’entre elles.
Lorsque nous fûmes partis, nous instaurâmes à notre vie de bord une certaine convivialité, nous appelant tous par nos prénoms, mangeant ensemble, soit sur le pont, soit à la cale que j’avais organisée en partie pour prendre nos repas et pour avoir des lieux de repos agréables pour l’équipage.
J’avais repéré deux filles qui semblaient réceptives à mes avances. Une magnifique brune aux grands cheveux fins et lisses qui tombaient harmonieusement sur sa chute de reins, et une blonde, mais c’est vrai qu’en blonde j'ai des lacunes (4).
Au bout de deux semaines de navigation, un petit grain s’était levé. J’avais consulté la météo, il y aurait de l’orage. J’avais posté la jolie brune, Julie, à la barre. Et comme les brunes ne comptent pas pour des prunes(5), je vins à elle, la regardant manœuvrer. Elle était prise par son activité et faisait glisser ses longues mains délicates sur le gouvernail. Je m’approchai d’elle et déposai une main sur la sienne, je caressai doucement ses doigts, nos regards se rencontrèrent.
— Vous avez des mains très douces moussaillon !
Normalement nous nous tutoyions, mais j’avais décidé de jouer un petit jeu de séduction.
— Vos doigts sont longs et fins, dis-je tout en continuant à les caresser avec douceur, ils doivent être très habiles, je remarque aussi vos ongles très courts… Vous ne souhaitez blesser personne, c’est délicat de votre part.
— Merci capitaine, me répondit-elle entrant dans mon jeu, je pourrais vous démontrer leur habileté.
Elle se passa délicatement la langue sur les lèvres.
— Très bien moussaillon, quand vous aurez fini votre quart, venez me retrouver dans ma cabine. Nous dînerons ensemble, puis j’ajoutai avec un clin d’œil très appuyé, ne faites pas de folies vestimentaires, les dessous chics, c’est des dentelles et des rubans (6), et ce n’est pas ce qui m’intéresse. Une belle femme n’en a pas besoin pour se mettre en valeur.
— À vos ordres capitaine. J’attendais votre invitation depuis longtemps. Vous m’avez fait languir…
— Et moi j’attendais que la météo soit favorable. Il y aura de l’orage ce soir ! Tu sens comme Armelle bouge, je vais avoir du mal à t’attendre…
Je la contournai. Alors qu’elle était fine et longiligne, j’étais plutôt petite et potelée, aussi quand je passai mes bras autour d’elle, je dus me mettre sur la pointe des pieds pour lui glisser un baiser dans le cou. Je la gardai contre moi, me laissant griser par la chaleur de son corps, le vent qui venait frapper mon visage et les roulis du bâtiment.
— Danse avec moi, Julie, faisons corps avec Armelle. Lui glissai-je à l’oreille, à nouveau sur la pointe des pieds.
Je tenais son ventre avec une main, plaquai mon bassin contre ses fesses et l’entraînai quelques moments dans une danse lascive guidée par le tangage.
— Prends la barre Aurélie, je vais te faire danser moi aussi.
Je pris amoureusement le gouvernail de mon navire en main, alors que ses mains se refermaient déjà sur mes seins, les caressant avec douceur, mais fermeté.
— Tu veux faire l’amour ici, Julie ?
— J’aimerais bien, mais tout le monde va nous voir… On ne peut pas se déshabiller !
— J’en ai trop envie. Mais je ne voudrais pas attendre, l’orage se rapproche, on va mettre tout le monde à l’abri. J’aime faire l’amour avec une belle fille, en pleine tempête, bercées par les flots, c’est mon plaisir ultime, je veux le partager avec toi. Reste à la barre j’arrive !
— Ne sois pas trop longue, moi aussi j’en crève d’envie !
Heureusement les premiers éclairs se faisaient voir. Je dus quitter son étreinte passionnée à regret pour aller donner les ordres nécessaires, aidée par mon second, nous jetâmes l’ancre, descendîmes les voiles et fîmes rentrer l’équipage. Mon second savait bien pourquoi j’avais fait rentrer tout le monde, alors que le grain ne s’annonçait pas si dangereux que ça ! Elle avait l’habitude de mes caprices. Les vagues commençaient à s’accentuer, ça allait être bon ! Au bout d’une demi-heure l’orage était sur nous et tout le monde était rentré. Je pensais déjà à Julie, à ses mains et surtout ces turbulences qui annonçaient pour moi un plaisir décuplé.
Lorsque je retournai à la barre, elle s’agrippait au gouvernail, tout en retirant ses vêtements. Derrière le poste de navigation, il y avait un coffre dans lequel nous stockâmes tout ce que nous avions sur le dos. En moins d’une minute, nous étions nues et prêtes. Je lui fis signe de s’accrocher à deux mains à la commande de direction, une de chaque côté.
Quelle femme magnifique ! Je la pris dans mes bras et commençai à dévorer son visage avec ma bouche avide. La pluie cinglait nos corps nus, quelle sensation exaltante. Julie la sentait tout autant que moi, je n’avais jamais eu une partenaire aussi enthousiaste à partager ma passion pour la tempête sur un bateau.
— Je préfère l’amour en mer(7) ! lui dis-je suffisamment fort pour me faire entendre.
Puis nos langues s’entremêlèrent, je la dévorais littéralement et elle me le rendait bien. Nous étions connectées à la violence des éléments.
Après de longs et passionnés baisers je commençai à descendre sur elle. Les embruns donnaient un goût salé et iodé à sa peau. Je l’embrassai d’abord dans le cou, descendis ensuite sur sa poitrine qui s’harmonisait parfaitement avec son corps athlétique de marin. Ses seins au goût mer étaient délicieux, son ventre délicat se contractait au rythme de mes doigts qui lui caressaient le sexe avec effusion.
Puis ma bouche fusionna avec son coquillage, salé à point, dont la dégustation s’avéra un délice. Je la léchai longuement et puissamment, laissant les mouvements du navire nous donner les impulsions nécessaires. Ma bouche répondait aux folies d’Armelle, aux envies qu’elle me dictait, jusqu’à faire hurler de plaisir la belle Julie, qui offri ses cris au vent qui les réclamait.
Lorsqu’elle fut repue de plaisir, je m’offris à elle dans la même position, les deux mains accrochées au gouvernail, les bras et les jambes écartées comme si j’aillais subir le supplice de la roue. Comme moi elle m’embrassait avec passion et jouait follement avec mon corps. Le désir de l’orage l’habitait autant que moi. Ses doigts passionnés et habiles avaient commencé leur travail dans mon entrejambe. Mon dos reposait sur le bois tant aimé de la barre, je la tenais à pleine main pour sentir Armelle, penchant à droite puis à gauche, au rythme des vagues qui agitaient son gouvernail. Puis je sentis sa bouche s’affairer sur ma vulve, deux doigts joueurs m’avaient pénétrée et sa langue s’amusait sur mon clitoris.
Nous glissâmes au sol. Elle m’accueillit sur sa bouche alors que mon corps dansait et balançait, faisant ballotter mes seins, récupérés avidement par les mains de Julie. Mon regard s’égara sur le ciel déchiré par les éclairs. Alors au plus fort de l’orage, mes cris de jouissance se marièrent au tonnerre qui grondait. Nous ne faisions plus qu’une, la tempête, Armelle, Julie et moi. Puis alors que nous nous embrassions plus tendrement, allongées sur le pont, la puissance du vent diminua, les éclairs se calmèrent, et au loin, quelques rayons d’un soleil couchant apparurent.
— Vivement le prochain orage ! me soufla Julie.
Armelle et moi étions du même avis.
(1) Dianne Tell, si j’étais un homme
(2) Hugues Aufray, Santiano
(3) Renaud Séchan, Dès que le vent soufflera
(4) Alain Souchon, Le baiser
(5) Lio, les brunes ne comptent pas pour des prunes
(6) Jane Birkin, Les dessous chics
(7) Philippe Lavil, elle préfère l’amour en mer
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