Murmure
Savez-vous entendre le murmure d’un poumon ? Rien de plus simple.
Munissez-vous d’un stéthoscope et placez-le sur le haut de votre poitrine. Maintenant respirez à fond. Vous n’entendez rien ?
Placez le stéthoscope sur votre genou. Là, vous n’entendez rien.
Replacez le stéthoscope sur votre poitrine, vous entendez la différence ?
C’est le fameux murmure.
Une légère brise, à peine audible, qui emplit les poumons. Rien que de l’air qui passe.
Pour moi, c’est le plus beau son du monde.
Je travaille en kinésithérapie respiratoire, je passe mon temps à ausculter les poumons malmenés de mes patients.
Certains ont un murmure étouffé, noyé dans du liquide. D’autres ne murmurent plus car les bronches sont toutes chiffonnées. Le silence est inquiétant.
Il y a aussi des poumons plus bruyants. Murmurer n'est plus suffisant pour hurler leur mal-être.
Ils sifflent comme le vent dans les tours, ils ronflent comme des moteurs, ils craquent comme la neige sous les pas.
Alors j’arrive à la rescousse.
Je comprime le thorax en rythme, j’aide les bronches mal en point à se débarrasser de cette matière gluante qui les encombre.
Puis le patient tousse et crache littéralement ses poumons. Ce n’est pas très ragoutant.
Mais après avoir désencombré les voies aériennes, j’entends de nouveau leur murmure. Et je sais que mes efforts n’ont pas été vains. Je sais pourquoi je fais ce métier.
Voilà comment le plus doux des murmures me remplit de joie.
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