Blanche Neige

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Si les bébés pouvaient parler... Ils raconteraient des histoires : vécues, rêvées.

J'ai moi-même été bébé et croyez-moi : des histoires vécues, rêvées, j'en ai de nombreuses à partager. Qui sait ? Peut-être à inventer, si ma mémoire vacille...

Tiens : par exemple, celle de la jeune femme sur le panneau de mon lit de bois.

C'était dans ma première année de vie ou guère plus : je pourrais le jurer. Une chose est certaine, je ne savais pas encore marcher. Dans une immense chambre flanquée d'un recoin où l'on avait casé mon lit, impressionnée par ce mastodonte compact, haut et profond, je jouais avec mes doigts, avec mes pieds. En position dorsale, je voyais des ombres projetées sur les parois faisant écho aux rayons lumineux artificiels ou naturels qui aimaient à se moquer de mes terreurs de nourrisson.

Des étranges créatures dansaient et me narguaient au fil de leur fantaisie et il m'arrivait de fermer les paupières en souhaitant leur disparition dans l'instant. À chacun de mes réveils, comme un appel au calme, elle était là. J'avais beau frotter mes menottes sur le bord de mes cils, rien n'y faisait. Elle était là, tout sourire. Très belle au demeurant. Cheveux noirs comme l'ébène... Bouche rouge, robe bleue et jaune, amie d'un petit faon.

Elle me fixait. De nuit comme de jour. Elle restait près de moi, fidèle et attentive. Je l'observais, fascinée. Comprendrait-elle, à défaut de langage, mon gazouilli confus mais argumenté ? Il semblait que oui. Sa discrète présence et son soutien indéfectible était la preuve (s'il fallait qu'il y en ait une) qu'elle veillait sur moi.

À chaque fois que le rideau s'écartait, signe d'une séparation imminente, je pleurais. Des bras chaleureux m'emportaient loin de cette vision qui m'appaisait. Dans la chevelure courte, noire et bouclée qui se penchait vers moi, je retrouvais un je ne sais quoi de familier. Mes petits doigts dodus aimaient à se faufiler dans l'épaisseur suave de ce velours adoré. Sans remord, ma joue au creux d'un cou à la saveur maternelle, je restais blottie là où l'amour vrai m'acceptait.

J'aurais pu croire qu'une telle trahison eut raison de la présence de la belle jeune femme sur le panneau de mon lit de bois. Faisant fi de toute considération mesquine, elle resta près de moi.

Bien plus tard, je compris qu'à défaut de maman, c'est avec Blanche Neige que j'ai dormi, enfant.

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