Chapitre 5
Les commanderies et fermes templières étaient nombreuses dans la région. Tout le monde ou presque avait entendu parler du mythique trésor de l’Ordre des Chevaliers du Temple. Les chasseurs de trésors, périodiquement, annonçaient des trouvailles qui jusqu’ici, avaient toutes fini en eau de boudin. Constantin décida de se replonger dans les livres, pour rafraîchir ses connaissances.
La plupart des avis autorisés concordaient : le trésor aurait été réparti en au moins trois convois, sans compter les leurres destinés à tromper les sbires du Roi, de chariots qui, après diverses étapes dans des établissements templiers, chartreux ou des chevaliers teutoniques, auraient fini dans différents pays limitrophes.
« Une première partie du trésor aurait atteint, dit-on, le Portugal, par le sud-ouest de la France, puis la plage de Saint-Jean-de-Luz où elle fut rejointe ensuite par une flotte de dix-huit navires partie de Paris, par la Seine. Elle prit alors le large en direction du Portugal où le roi se déclara protecteur de l’Ordre et devint du coup ennemi de la France et du pape.
Une seconde partie du trésor partit vers le nord et l’est de la France et s’évanouit quelque part autour de Liège et de Strasbourg.
Une troisième partie du trésor (selon la très sainte règle de la Trinité) aurait parcouru la France vers le Sud-Est, via les différentes abbayes des Chartreux et cela jusqu’en Italie, par le port de Gênes, où le trésor fut dispersé entre l’ordre de Malte et celui de Jésus-Christ, au Portugal. »(1)
Combien d’étapes avaient dû respecter ces convois nocturnes, protégés par des hommes déguisés en marchands ? Celui du Sud-Ouest serait-il passé par la commanderie des Andrivaux ? C’était ce qu’il convenait d’établir en premier.
Constantin, fin connaisseur de la nature humaine, aurait parié qu’à chacune des étapes, ceux qui avaient permis cette fuite de capitaux vers l’étranger n’avaient pas manqué de prélever leur dîme au passage, voire davantage. D’où la possible existence de plusieurs « petits » trésors. C’était son hypothèse.
Il commença par établir une carte aussi précise que possible des principales commanderies des Templiers entre Paris et Saint-Jean-de-Luz. Vaste entreprise. Cette fois, il dut renoncer aux livres pour recourir à l’Internet. Le principal site dédié à l’Ordre en recensait des centaines ! Classées par département et par ordre alphabétique, ce qui ne faisait pas du tout son affaire. Il dut donc opérer des allers-retours entre sa vieille carte de France Michelin et la liste proposée. Au bout de quelques heures de ce va-et-vient, il disposait d’une sélection arbitraire, mais cohérente. Il s’interrogea ensuite sur la distance que pouvait parcourir nuitamment un convoi de chariots plus ou moins lourdement chargés. Pas bien grande, pour sûr. Pas plus de 6 à 8 lieues parisiennes selon le terrain, autrement dit, entre 20 et 25 kilomètres, au mieux. Cela signifiait un nombre important d’étapes (entre 30 et 40) et des risques multipliés. Pas étonnant que ce trésor se soit évanoui dans la nature ! C’est qu’il y avait 230 lieues à parcourir entre la capitale et la côte basque ! Bref, entre quatre et cinq semaines de voyage ! Une éternité par les temps incertains d’alors.
Constatation encourageante : à l’époque, l’itinéraire le plus direct entre Paris et Saint-Jean-de-Luz passait bien par Périgueux ! Après Étampes, Orléans, Vierzon, Châteauroux, Limoges, et avant Bergerac, Marmande, Mont-de-Marsan et Dax. Le passage d’un convoi par la Commanderie des Andrivaux s'avérait donc plausible. Celle-ci avait été fondée en 1139. Et de 1297 à 1306, le précepteur en avait été Géraud de Lavernhe, maître de l’Ordre en Périgord, qui fit partie l’année suivante des soixante-dix Templiers emprisonnés à... Domme ! Curieuse coïncidence ! Mais difficile d’aller plus loin, sans autres éléments. Il décida de s’intéresser alors de plus près au texte du parchemin.
(1) Dominique Jongbloed in Chroniques des plus énigmatiques trésors : http://www.chasses-au-tresor.com/generalites/chasseurs-de-tresors/le-tresor-des-templiers.html
(à suivre)
©Pierre-Alain GASSE, juin 2017.
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