L’esprit encore dans les vapeurs de sommeil, Mélissa était comme dans un autre monde et pourtant sa conscience était arrivée à un nouveau stade de préhension de tout ce qui l'entourait. Elle avait les yeux clos et pourtant, elle voyait tout, sentait tout, entendait tout. La métamorphe adorait ce genre de moment simple. Le week-end était arrivé et son époux se levait tôt, avant leurs deux garçons pour s'occuper du petit-déjeuner. Mélissa avait tellement de chance de l'avoir lui à ses côtés. Aucun autre ne lui était semblable et il l'aimait elle.

Des odeurs de crêpes embaumaient même la chambre dont la porte avait été discrètement refermée. Les chuchotements des trois hommes de sa vie lui arrivaient tout de même, mais c'était plaisant de se rendre compte de tous les efforts et de l'attention qu’ils lui portaient. À ce constat, un petit sourire était né sur les lèvres de la créature.

Si d'ordinaire, Mélissa gardait sa forme totalement humaine, il y avait des matins, comme celui-ci, où la tentation était trop grande.

Cela faisait quelques instants déjà qu'elle avait pris sa forme féline. Rien de bien imposant. Elle n'était ni une lionne, ni une tigresse. Elle n'était rien qui soit très dangereux à part pour les souris et les rats. Cependant, elle n'en tirait aucun complexe. Au contraire, un ocelot, malgré son côté exotique, était parfaitement passe-partout. Sa taille, peu importante, lui permettait de vivre sous sa forme féline plus aisément.

Par exemple, ce matin, dans le lit, elle pouvait se laisser aller de tout son long, les pattes bien au-dessus de sa tête, ses griffes acéré en avant. Ses pattes arrière tout aussi étendues, sa queue souple et immobile accompagnant le mouvement.

L'étirement était long, elle prenait tout le lit en travers. Ce genre d'assouplissement le matin était un des petits plaisirs simples de la vie aux yeux de Mélissa et elle en profitait sans honte. Elle sentait sa colonne vertébrale être soulagée en douceur, quelques nœuds de sa forme humaine disparaître en quelques respirations.

Les yeux toujours aussi clos, la femelle ocelot profitait des quelques rayons de soleil matinal arrivant sur sa fourrure, caressant son pelage avec bienveillance. La chaleur l'attirait de nouveau dans le royaume du sommeil, cependant, la luminosité ambiante l'empêchait intelligemment de replonger. Alors Mélissa restait là, entre deux mondes attirants, l'esprit clair et en éveil tandis que son corps lui semblait lesté de plomb.

Combien de temps resterait-elle dans cette situation ? Elle n'en savait rien. Sous sa forme féline, elle n'avait pas la même notion du temps. Ce dernier passait toujours beaucoup plus vite. Cependant, elle estima qu'une fois le rayon de soleil détourne de son corps, il serait temps de retrouver une vie plus productive et active. Elle avait deux petits garçons à aimer, un mari dont elle devait profiter de la présence.

Après un dernier étirement excessif, le corps aussi tendu que la corde d'un arc, accompagné d'un bâillement dévoilant une petite mâchoire pleine de crocs acérés et pointue, Mélissa se redressa avec lenteur. Les quatre pattes sur le matelas encore chaud, la métamorphe reprit doucement sa forme humaine. Le matelas sembla rétrécir et beaucoup de détails s’estompèrent Que ce soit de par sa vision, de par son ouïe ou de son odorat, tout semblait moins net et présent. Sa forme humaine n'était pas vraiment prévue pour la chasse et à chaque fois qu'elle en prenait la forme, la remarque devenait une évidence; Elle s'adaptait pourtant assez vite à ce constat.

Un petit instant plus tard, la mère de famille aux généreuses boucles rousses ouvrait délicatement la porte de sa chambre, offrant au monde un sourire joyeux, quoi qu'encore vague de sommeil. Zachary et Nicolas ne prirent pas la peine de faire attention à de détails et se jetèrent sur leur mère, venant chercher leur précieux premier câlin de la journée.

Mélissa était aux anges.