Visite inattendue

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— Marta, par pitié, accepte cette chance d’être accompagné par des thérapies alternatives.

— Non ! Jamais ! Vous avez l’entendu ! C’est un non-sens de refuser à une patiente de revoir mon traitement ! Une mise en danger délibérer d’autrui ! La preuve qu’il est au courant que ce qu’il me donne accentue ma maladie ! Je lui ferais bien un procès tient !

Que lui dire ? Le rendez-vous cette après-midi fût exactement comme ce soir. La fin du repas se passe dans un dialogue de sourd.

— Ma sœur, essaye de commencer à voir la psy. Et si cela se trouve, elle fera tout pour convaincre le cardiologue que tester un changement. Il pense que des troubles psychiatriques étaient présent dans l’ombre et qu’ils se sont réveillés avec ton greffon.

Elle ne répond plus, se ferme en fixant son verre d’eau. Roberto lui sert sa main droite en réconfort. On a appris aussi ces derniers secrets qui l’ont libérés durant les deux dernières semaines.

Pour détendre l’atmosphère, mon père lance un petit jeu qui consiste à raconter des blagues. Tout le monde se lâche enfin se force. Tous, sauf une nouvelle fois, Marta. C’est à mon tour de trouver la meilleur vanne, quand la sonnette retentie. On s’observe surpris.

— Tu as invité quelqu’un maman ?

— Non.

— Bon, si personne compte ouvrir, j’y vais.

Roberto nous surprend avec sa gentillesse. Il réajuste son col relevé et on perçoit la conversation sans en saisir les mots. Enfin, il revient avec un homme droit, grand, mince. Il semble froid, polie. Sa pâleur, sa mâchoire marquée, et ses cheveux poivre et sel étaient soigneusement plaqués vers l’arrière, le rend presque irréelle.

Il porte un long manteau noir, ouvert sur un costume sombre taillé sur mesure. Sa chemise d’un blanc immaculé contraste avec la cravate anthracite, nouée avec une précision militaire. Mais ce m’intrigue, le plus, sur le revers gauche de son manteau, une épingle retient une rose noire séchée, parfaitement conservée. Une fleur aussi rare qu’inquiétante, figée comme une énigme funéraire.

— Nicolas !

Ma mère se lève d’un seul bloc, autant surprise que colérique. L’invité lui sourit et sort derrière son dos, des tulipes blanches. Roberto revient à sa place, ma sœur reste intriguée et mon père, lui, aborde son air mauvais.

— Qui est-ce maman ?

— Alors, Maria, on ne me présente pas ? Pourtant, ce charmant jeune homme, m’a déjà expliqué être le petit ami de Marta.

Ma mère s’approche de lui pour le gifler d’une telle violence que personne ne s’y attendait. Elle n’a jamais eu ce type de comportement.

— Plus de huit ans de silence que nous inflige ! Où était tu ?! Pourquoi tu as fui !

— Désolé ma petite sœur, désolé. Tu le sais bien que l’héritage de nos parents m’ont poussés à…à des moments de dépressions. Je suis venu peu de fois, voir grandir mes nièces et j’ai fui pour me soigner, me reconstruire, partir en Asie me marié un temps, sans succès. La famille est plus que tout pour moi et j’espère ne pas être rentré trop tard.

Il ne démonte pas en tendant le bouquet en larmes. Ma mère y répond, l’accepte et l’enlace. Cependant, je ressens une étrange sensation. Sa façon d’agir, me donne l’envie de me tenir éloigner de cet oncle inconnu. Et puis, la rose noire, tout une myriade de codes à résoudre.

— Bien, tu es pardonné. Vient t’assoir avec nous, on a tant de choses à rattraper.

— Le café sur le canapé ?

— Avec plaisir Mariano, c’est bien ça ?

— Je vais t’aider à ramener les tasses.

— Marta ? Tu veux aider à ranger ou aller t’assoir là-bas ?

Pendant que j’aide ma mère, ils vont tous s’installer. Mon père se détend un peu sans oser dire ce qu’il pense d’une telle rupture aussi brutal pour ma mère.

— C’était si difficile pour lui de gérer le deuil maman ?

— Mon frère avait un comportement difficile, beaucoup de temps en maisons de corrections. Quand nos parents sont décédés, il a mal pris le fait que tout l’héritage me revienne. J’avais essayé à chaque rare visite de sa part, de lui donner une part. Il a préféré ne rien prendre, sentant que je le méritait par ma réussite personnelle et professionnelle.

— Il porte une rose noir, revient sans avertir personne. Il peut être gentil, moi, je ne le sens pas.

— Ne devient pas comme ta sœur à devenir parano. Je connais très bien mon frère, il n’a jamais été un mauvais garçon, il a juste été au mauvais endroit au mauvais moment.

— Et la rose hein ?

— Noir souvent signe d’un deuil. Pour nos parents ou justement un veuvage, on va en savoir plus. Bon, assez de questions, prend les sucres et les cuillères et allons discuter.

Ma mère est une bonne conseillère et j’accueille avec soulagement ces mots apaisant. Nicolas nous raconte son maigre parcours passant de serveur à bénévole humanitaire jusqu’à effectivement la perte de sa femme en Asie pendant un attentat. Désireux de rentrer se réfugier dans la famille, il est là après deux mois de voyages entre avions, trains et taxi.

Il nous questionne à notre tour et par principe, je ne dévoile que mon poste à l’école. J’oublie bien vite sa manière de fumer, ses jambes croisés et son rire sincère. Jusqu’à :

— Et toi Marta, tu es bien silencieuse. Tu n’es pas contente de revoir tonton ? Tu te souviens quand je venais jouer aux médecins ?

Il s’aperçoit que ces souvenirs provoquent des interrogations. Pourquoi, le jeu du médecin ? Rapidement, Marta ose le déstabiliser en le fixant droit dans les yeux :

— Jouer ? Non. Mais, j’en connais un qui s’en délecte, il est cardiologue, mes doses provoquent en moi, une instabilité mental. Oui, j’ai un cœur inconnu et pourtant, c’est moi qui devient ombre.

Elle ne le lâche pas, il s’en délecte. D’un mouvement de tête, je fais admettre à ma mère que ce frère n’est sans doute plus celui qu’elle avait connu. Personne n’ose dire quoi que ce soit.

— Pourquoi tu souris face de rat ?

Dieu du ciel ! Merci ma sœur ! Elle peut gagner la bataille.

— Mon sourire peut être le signe du Malin. Hors, j’ai plaisir à te voir si battante. Tu veux aussi savoir pourquoi, te rappeler ces petits jeux ? Hé bien, ton décolleté donne une vue visible sur ta cicatrice. J’ai vite deviner une greffe. On s’amuser à ça car j’avais l’ambition première de devenir médecin. Comme tu l’as bien compris, le destin en fût autrement. Pardonne moi alors, si cela t’a perturbé. Où sont les toilettes ?

— Faudra faire la queue, j’y vais, suit moi.

….

Il me donne des frissons cet oncle ! Je n’arrive pas à déterminer à quoi il joue. Personne ne semble l’avoir remarqué jusqu’à qu’il balance ces petits moment dont ma mémoire avaient tout rayé.

Mon besoin de me vider la vessie me permettra de ressortir plus à même de revenir accepter le test de la psy. La guerre c’est ma passion, je ne compte jamais rien laissé passer. Une fois sortie, l’oncle me force à rentrer à nouveau dans la salle de bain.

Que faire ? Crier ? Peut-être est-ce un imposteur ? Il ferme ma bouche pour m’annoncer à voix basse :

— N’hurle pas, ce n’est pas la peine. Dans moins d’une heure, je repars. Je ressens ta peur mais je connais tes symptômes, ta douleur, cette faiblesse qui te ronge sans raison apparente. J'ai vu ton corps changer, comme une marionnette dont les fils se tendent et se brisent. Tu n’es pas seule dans cette souffrance.

— Hum…

— Tes proches n’ont pas le droit de savoir qui tu vas voir, ils ne vont rien comprendre à cette alternative plus douce, plus personnalité, plus saine que la psy. Voici, le numéro, appel et tu auras un rendez-vous. Fait moi confiance, j’ai moi aussi un autre cœur, regarde.

Il ouvre sa chemise pour dévoiler la même cicatrice. Je suis perdu, j’ai vite besoin de prendre l’air. Je tente de partir mais il me bloque le passage, me murmurant à mes oreilles :

— Le même âge que toi et les mêmes délires. C’est un bon ami, fait moi confiance, si nécessaire, on se reverra pour en parler. Par contre, en parle à personne.

— Pourquoi ?

— Les originaux sont mis à la poubelles tandis que les copies courent les ruent. On est unique, incompris, rejetés. S est la lumière qui t’hissera haut, t’aidera à vivre plus longtemps et accepter tes pensées qui sont mis en cage par la société. Après, si tu veux rester dans l’ombre, une place est déjà réservé pour toi au cimetière.

Je tremble tandis qu’il glisse le papier dans la poche de mon pantalon et je fuis prendre l’air. Roberto se précipite vers moi et je mens en invoquant des idées parasites. Nicolas repart finalement assez vite sans raison et je fais de même avec Roberto pour me reposer à l’école. Dans la nuit noire, la blancheur du papier m’impose de saisir cette autre carte. Par peur sans doute de la mort.

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