– Alors, comment vous sentez-vous aujourd’hui, pour notre douzième jour de travail ?

– Excité et inquiet à la fois, à vrai dire, docteur…

– Excité c’est bien, inquiet c’est… moins bien. Qu’est-ce qui vous tracasse ?

– Hé bien, il est déjà tard aujourd’hui et je n’ai toujours pas écrit une ligne, j’ai peur de ne pas avoir le temps, ou de m’épuiser avant la fin de la journée.

– Allons, allons. Vous exagérez quand même ! Vous avez largement le temps de vous y mettre et vous le savez, d’ailleurs… Et puis, s’il est tard, c’est aussi parce que vous avez pris soin de vous ce matin, ce qui ne fait pas de mal de temps en temps, et surtout que vous avez eu de la visite, me semble-t-il, et une visite particulièrement intéressante, oserais-je ajouter, n’est-ce pas ?

– Oui, j’ai pu parler à cette amie qui travaille dans le milieu hospitalier justement, et qui m’aide beaucoup pour ajuster certains détails… Elle accompagne des malades et pas des auteurs comme vous le faites, mais…

– C’est formidable ! Donc vous lui avez parlé de votre histoire et qu’a-t-elle pensé de vos idées ?

– Elle était très enthousiaste, à vrai dire… Elle m’a beaucoup encouragé…

– Hé bien, alors ? Avec tout ça vous arrivez encore à vous inquiéter de la suite ? Faut-il que vous soyez des petites choses fragiles, vous les auteurs, toujours pétris de doutes, jamais certains, éternels hypocondriaques de la création, n’est-ce pas ?

– Oui, enfin, ce n’est pas simple quand même, de créer tous les jours… Et c’est ma première expérience de ce type.

– Oui, je le sais bien, je vous taquine, mais c’est aussi pour vous aider à relativiser vos angoisses : objectivement vous avez le temps, vous êtes encouragé par vos proches et vos amis, vous êtes inspirés par votre histoire qui palpite maintenant sous votre plume et vous savez que vous savez écrire. Alors, un seul conseil, fermez les yeux, ignorez vos doutes et écrivez, bon sang !