La fin des illusions - partie deux
Face à mon expression figée, le démon me lance avec un sourire narquois :
- Eh bien. . . Moi qui pensais que tu te faisais une joie de me voir. . . Tu as une bien drôle façon de l'exprimer.
Ces mots sont comme un réveil qui me sort de mon état second. Je bondis hors du lit en lançant à mon ennemi une boule de feu, qu'il pare sans difficulté avec sa main.
- Arrête. Tu te fatigues inutilement. Non seulement tu n'as aucune chance de me vaincre, mais en plus, tu risques de mettre le feu à ma demeure. Enfin. . . à notre demeure, désormais.
- Retire immédiatement ce que tu viens de dire ! Cette maison n'est pas la mienne !
- Tu es ma fille, réplique-t-il calmement. Tu es donc ici chez toi.
- C'est faux ! m'écrié-je en lui lançant de nouvelles flammes. Nous ne sommes rien d'autre que des ennemis !
Il les écrase dans son poing, puis laisse encore résonner son rire puissant à l'intonation maléfique, mais cette fois-ci, il est teinté d'une pointe d'amusement :
- Ha ha ha ! Pourquoi devrions-nous être ennemis ? Certes, j'ai dû te faire croire que je te voulais du mal à la façon dont mes serviteurs et moi-même t'avons abordée, mais il n'en est rien. Ne te laisse pas avoir par les apparences.
- Tu as déjà oublié. . . dis-je en entre mes dents serrées par la rage, la façon dont tu lui as ôté la vie et dont tu m'as presque tuée ? ! Tu as déjà oublié son corps inanimé, que tu as contemplé avec une telle délectation ? !
Au dernier mot, je lui envoie une nouvelle boule de feu, qu'il pare comme les précédentes sans le moindre effort.
- Franchement, tu les crois encore ? N'as-tu pas toi-même dit qu'ils t'ont menti sur toute la ligne ?
Je me fige. Il poursuit :
- Qui t'a dit que c'est moi qui ait provoqué ce drame ? N'est-ce pas les soldats de l'ASC qui ont trahi ta confiance ?
- Je ne me fie pas qu'à leurs seules paroles ! me défendé-je. La boule de feu qui nous est tombée dessus ne pouvait être que le fruit d'un démon !
- Ha ha ha ! Vraiment ? Les êtres humains sont pourtant réputés pour être les seuls animaux maîtrisant le feu. . .
Mes yeux s'écarquillent. Cette réaction n'échappe pas à mon interlocuteur, qui confirme avec un large sourire la révélation qui vient de s'offrir à moi :
- Oui. . . Ce sont ces trois soldats qui t'ont prétenduement sauvé la vie qui ont tué ta chère mère. Ils ont volontairement usé d'une arme capable de tirer des boules de feu pour pouvoir m'attribuer facilement le crime. Tout cela pour que tu me haïsses et que tu te tournes logiquement vers mes ennemis, vers ceux dont tu croyais qu'ils t'avaient sauvé et qu'ils voulaient ton bien.
Au fur et à mesure qu'il avance dans son explication, son sourire s'élargit. Je sens mon coeur se serrer et ai un peu plus de mal à respirer que d'habitude. Je m'étais rendu compte de la monstruosité de ceux que je pensais être mes amis, mais je ne les imaginais pas aussi vicieux. . . Comment ont-ils pu . . . ? ! Je sens des larmes couler sur mes joues et la main du démon se poser sur mon dos, dans un geste se voulant sans doute réconfortant, mais je le repousse brutalement en m'exclamant :
- Tu n'es pas différent d'eux ! Tu m'as aussi menti ! Comment puis-je te faire confiance ? ! Croire en tes paroles ? !
- Quand t'ai-je menti ? demande-t-il en levant un sourcil.
- Tu t'es présenté à moi sous une fausse identité !
- J'ai certes été contraint de changer d'apparence pour t'approcher. Avoue que jamais tu ne m'aurais suivi sous ma forme actuelle. Or, nous devions rejoindre Paris le plus rapidement possible. Le temps nous était compté. Je n'ai pas eu d'autre choix. Ceci dit, je ne t'ai jamais menti sur le reste. Je suis bel et bien un membre de ta famille, qui connais parfaitement tes parents et souhaitais te ramener à ton père.
- Qu'en est-il du faux prénom ?
- Quel faux prénom ? demande-t-il en penchant la tête sur le côté.
- Veux-tu me faire croire que Luc est ton véritable prénom ? insisté-je avec une pointe d'agacement.
Il place son poing devant sa bouche pour laisser échapper un rire étonnamment doux, que je ne lui connaissais pas. Même sous sa fausse apparence, ses rires taquins et amicaux restaient puissants. Je l'observe donc en silence, bouche bée, jusqu'à ce qu'il finisse par dire :
- Luc est effectivement mon véritable prénom. Pour être plus exact, c'est le diminutif de l'un des nombreux noms qu'on me donne.
- Quel est-il ?
Il esquisse un nouveau large sourire en levant le menton et plonge son regard écarlate dans le mien pour répondre :
- Lucifer. . .
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