Le repas se déroule dans une ambiance bonne enfant. J’ai retrouvé l’appétit et Tristan mange casi pour deux, pour le plus grand bonheur de Ma qui ne rêve que de le remplumer. Arrivé au dessert, il nous avoue se souvenir d’avoir connu la douleur de la faim et que c’est une sensation qu’il ne veut plus jamais ressentir. Je constate que je ne connais pas toute sa vie et qu’il a dû souffrir plus que je ne le crois.

Paps semble plus réservé sur notre relation que Ma, même s’il ne dit rien. Il paraît plus silencieux et taciturne que d’habitude et je dois dire que cela m’inquiète. Je décide de lui faire confiance après tout il m’a assuré de son soutien…

Nous prenons le café dans le salon. Mon petit lion et moi nous nous asseyons dans le sofa en face de la porte séparant le garage du salon et nos parents (j’aime ce terme) prennent place dans leurs fauteuils respectifs. Tristan regarde ladite porte puis moi et ses yeux se voilent.

• Rey… Corriges-moi s’il te plaît et dis-moi que tu n’as jamais franchi ce passage couvert de sang…
• Désolé mais… si… répondis-je, penaud, et tu étais assis exactement ici…

Ses yeux s’écarquillent et s’y mélangent peur et incrédulité. Ma lui annonce qu’elle lui a déjà raconté cette histoire… Trist secoue la tête, un peu nerveux. Elle en recommence quand même le récit : comme quoi je suis allé travailler dans la ville voisine (je serre les poings à cette mention car je suis le seul à savoir que j’ai menti sur ce coup-là… Je me promets alors de raconter la vérité à mon petit lion plus tard) et que je lui avais donné mon vélo.

Paps enchaîne et lui raconte qu’ils l’ont tous les deux bricolé avant qu’il n’aille faire un tour avec dans l’après-midi. Je ne connaissais pas cette partie et cela me fait secrètement plaisir qu’ils aient partagé au moins ce moment à deux.

• Oui… Je crois me souvenir… mais je n’étais pas sûr qu’il s’agissait de toi ou… de mon vrai père.

Arnold lui sourit, un brin nostalgique, avant de reprendre un visage dur : il mentionne ensuite le fait que Tristan non seulement s’était fait voler le vélo mais qu’en plus trois jeunes l’avaient tabassé pour l’avoir.

• Ah ce Richie ! Si seulement son père ne l’avait pas mis au pensionnat !
• Richie… Richie… Oui ce nom… ce nom me parle… et pas dans le bon sens, marmonne Tristan, une main posée sur le front.
• Ça va ? Tu peux continuer ? m’inquiétais-je.
• Oui… Oui… Ça va aller… Mon coeur…

BABOUM !

Il… Il vient de m’appeler mon coeur où j’ai rêvé ?!

Comme en écho à mes pensées, sa main attrape la mienne et il me sourit avant de reporter son attention sur Paps.

• Ensuite ?
• Tu as terminé à l’hôpital : deux côtes fêlées, un énorme hématome à la tête et diverses contusions notamment au niveau de l’abdomen. Fanny a appelé Rey pour qu’il revienne afin que nous soyons tous là pour te soutenir. Bien entendu, une plainte a été déposée mais… comment t’expliquer… hésite Paps.
• M. Turner est un gros ponte de la ville, aucune charge n’a été retenue voilà. Pas besoin de prendre des gants Paps.
• Contrairement à toi, n’est-ce pas Rey ? ironise Ma.

Je la regarde avant de lui tirer la langue. À mon tour de parler. Je n’y vais pas par quatre chemins et lui explique que lorsque j’ai su qu’il s’agissait de Richie, je suis allé directement chez lui.

• Non seulement j’ai récupéré ton vélo mais je t’ai vengé. Cette image de moi ensanglanté date de ce jour-là mais je te rassure : il s’agissait plus du sang de Richie et de son frère plutôt que du mien ! Et puis tu aurais dû voir Ma ! Une vraie tigresse lorsqu’elle a fait face à Turner !

Je détourne volontairement l’attention. Je viens de me souvenir que c’est cette nuit-là la première que nous avions passée ensemble. Je lui tais cette information pour le moment. Plus tard. Les yeux de mon petit lion se sont voilés, sa tête s’est légèrement penchée sur le côté. Ce mécanisme… comme lorsqu’il venait de sortir du coma…

• Oui… Je me souviens qu’il était trois… J’étais au sol, recroquevillé et ils n’arrêtaient pas de me frapper. Jusqu’à… Jusqu’à ce que… je perde connaissance…

Je me crispe. Si j’avais été là, jamais, jamais il n’aurait posé ne serait-ce qu’un doigt sur lui. Trist le sent et me regarde. Son sourire… Son sourire fait fondre toute ma culpabilité. Je peux lire dans ses yeux une douleur cachée, comme s’il me cachait quelque chose.

• Aussi… J’ai bien seize ans, n'est-ce pas ? - hochement de tête de Ma - Je… je n’ai eu aucun… flash… du lycée ou même du collège…
• Pour le lycée… C’est normal… Tu as dû faire en tout et pour tout qu’une semaine. Tes années collège ont été un fardeau pour toi : tu te souviens je t’avais dit que ta mère était alcoolique ?
• Oui…
• Eh bien, tu as réussi à le cacher pendant presque quatre ans. Tu vivais… seul. Les rôles se sont inversés : ce n’est pas ta mère qui s’occupait de toi, mais bien l’inverse.

Je n’en reviens pas. Il a perdu son père à onze ans, ça je le sais. Lorsque nous l’avons recueilli, il en avait quinze. Cela veut dire qu’il s’est débrouillé seul… durant tout ce temps ? Incroyable. J’étais à la recherche du secret de sa force, la voilà. Il s'est occupé de sa mère alcoolique durant presque quatre ans tout en étant encore un enfant. Sans compter qu’il a su le cacher aux personnels scolaires.

Qu’est-ce que tu as bien pu vivre durant ces années mon petit lion ?

• Je… Non… Ça ne me revient pas… plus tard peut-être ?
• Je ne suis pas sûre que cela soit une bonne chose… murmure Ma.
• Pourquoi ?

Elle sursaute, certainement persuadée qu’elle avait parlé assez bas pour qu’il ne l’entende pas. Elle finit par se confier : elle a simplement peur que ces souvenirs ne réveillent sa phobie scolaire ou même… sa dépression. Mon petit lion la regarde, les yeux attendris et se lève pour s’approcher de Ma. Avant qu’elle le comprenne, le voilà assis sur ses genoux, entourant son cou de ses bras, dans une étreinte aussi tendre qu'inattendue. Ma hésite même avant de le lui rendre.

• Ne t’en fais pas… Je crois… Non, j’en suis à présent sûr, tout ça est derrière moi. Je ne risque plus de broyer du noir. Je veux simplement comprendre les images qui me reviennent. Reconstruire mon passé… pour mieux voir mon avenir. Après tout… J’ai plusieurs lumières pour me guider. Et… quelqu’un pour m’aimer.

Là, ses yeux se posent sur moi. Mon coeur s’est mis à accélérer. Mon petit lion se rapproche à nouveau et s’assoit, sa main dans la mienne. Discrètement, Ma essuie une larme qui s’est échappée et Paps reste bouche bée devant cette déclaration. Tout cela a pour le mérite d’amener la discussion sur Hannah et le pourquoi de son job à mi-temps.

À nouveau, Tristan penche sa tête sur le côté et à nouveau ses yeux se voilent. Que vient-il de se rappeler ? Ah merde… la veille de son entretien avec Mme Luxus, je l’avais embrassé pour la première fois… et je l’avais rejeté dans la foulée. Lorsque j’ai vu ses cicatrices… j’ai été tétanisé. Quel monstre a pu lui faire une chose pareille ? Les miennes sont ridicules à côté.

Je n’avais pas réussi à canaliser, à comprendre mes sentiments à ce moment-là : un mélange de frustration, de haine et de colère. Une colère sourde. Froide. Je n’arrêtais pas de me demander pourquoi je ressentais ça. J’étais tellement concentré sur le fait de ne pas exploser que je n’avais même pas réalisé qu’il avait quitté ma chambre : je me suis senti tellement coupable ensuite que je n’ai pas osé aller le retrouver. J’ai fui. Encore.

Tristan pose sa tête sur mon épaule en émettant un petit cri de douleur. Sa main s’est posée sur son front et ses yeux se sont fermés. Paps se lève et prend le thermomètre : Tristan a 38.2° de fièvre.

• Je crois que cela suffit pour aujourd’hui. Garçon, il va falloir te reposer. File dans ta chambre.

Mon petit lion cache un éclat de rire et moi, mon sourire. Nos parents nous regardent, ne comprenant pas la raison de cette hilarité soudaine.

• On leur dit ou pas ? me murmure-t-il.
• Peut-être plus tard… Je crois qu’ils y ont eu assez de nouvelles pour aujourd’hui, je lui chuchote en retour.

Je lui prend la main et l’emmène vers notre chambre. J’ai à peine le temps de fermer la porte que Tristan s’effondre : je l’attrape avant qu’il ne touche le sol. Mon cœur cogne dans ma poitrine : mon petit lion est soudain très blême et transpirant. J’appelle Paps au secours tout en le soulevant et en le posant délicatement sur le lit.

Paps arrive dans ma chambre, un peu surpris, et lorsqu’il aperçoit Trist, repart chercher sa trousse de secours. Après vérification, ses constantes sont bonnes mis à part sa température qui a légèrement augmenté. Ma récupère une bassine d’eau froide ainsi qu’un linge pour le lui passer sur le front. Mon petit lion soupire.

• Je vais bien… ne vous en faites pas… nous rassure-t-il d’une petite voix. C’est juste… juste… que j’ai trop d’images, de sensations…de… de sentiments et j’ai l’impression que ma tête va exploser ! Bizarrement…
• Bizarrement quoi ? insistai-je.
• Ce ne sont que des images de vous. Quand je dis vous c’est toi, Rey, Ma, Paps et même Lydia ou Hannah… J’ai même une image mentale de Mme Luxus… Mais… Je ne vois rien, ne me rappelle rien d’avant ça… ou même d’après… Mmmmhhh… Aïe… Ma tête me lance…
• N’y pense plus garçon, lui conseille Paps, en lui caressant les cheveux avant de se lever. Fanny, je vais appeler le doc, je crois qu’il a besoin d’un scan, fait-il en aparté à Ma.

Je les suis jusqu’à la porte. Un scan ? Mais pourquoi ? J’ai une boule au ventre. J’ai envie de questionner Paps un peu plus et me tourne vers mon petit lion. Ses yeux larmoyants ont raison de moi : je parlerai à Arnold plus tard. Je ferme la porte et retourne près de lui.

Je m’allonge dans son dos : cette fois-ci, pas dans la position de la cuillère, non. Placé sur le côté, il se place directement contre mon épaule, dans son cocon, son propre bras replié et sa main agrippe mon T-shirt. Je ne sais pas trop pourquoi mais je sais qu’il souffre.

Une souffrance physique ou mentale ?

Je n’ose pas lui poser la question. Il se serre un peu plus contre moi à la recherche… de réconfort ? Aucune idée. En tout cas… sa détresse est palpable… Je suis presque sûr qu’il se rappelle d’autres choses mais de quoi ? Telle est la question… Nous restons un moment en silence. Juste son corps contre le mien. Je n’ose même pas bouger.

Il lève alors la tête vers moi. Ses yeux… Ses yeux me supplient de l’embrasser.

Inutile de me supplier…

Je pose mes lèvres sur les siennes. Ce baiser est tendre, terriblement affectueux. Contrairement aux derniers, il n’a rien de… sexuel. Il est juste… juste… je n’arrive même pas à le définir. Juste ses lèvres sur les miennes. Lentement. Doucement. Tendrement. Amoureusement ? Il se détache et pose sa tête sur mon torse, de sorte que je ne vois plus son visage.

• Mon démon angélique… murmure-t-il. Avant… Avant ma disparition… Je… Je suis resté combien de temps avec vous ?
• Un peu plus d’un mois pourquoi ?
• Et… Et toi et moi ?

Sa voix est incertaine. Lui et moi ? Que veut-il dire ? Je veux le regarder, ne comprenant pas sa question mais il ne veut pas lever sa tête vers moi. Je sens comme un étau enserré mon coeur. Pourtant, il est bien là, dans mes bras.

• Je… je sais que nous nous sommes cherchés… câlinés… embrassés… avant… poursuit-il, en chuchotant. Je l’ai vu… Simplement… Ces images sont parfois… souvent… accompagnées de… de souffrances… De douleurs… Rey… Mon démon angélique… Je… Je ne veux plus souffrir. Une voix au fond de moi me dit que c’en est assez. Que j’ai eu ma dose.

De souffrance ? De douleur ? J’ai vraiment été un salaud de première. Je le réalise et me demande combien de fois je l’ai fait pleurer. Je n’ai fait que fuir mes sentiments, mes envies pendant que lui combattait non seulement ses démons mais aussi mes questionnements puis mon rejet. Alors que si j’avais réfléchi ne serait-ce qu’un peu, nombres de ses - de nos - souffrances auraient pu être évitées. Je détourne mon visage pour qu’il ne voit pas mes propres larmes et essaie de contrôler les soubresauts de ma poitrine.

• Mon coeur… me souffle-t-il en attrapant mon visage.

Mon coeur ?!

• Non… Ne pleure pas. Pas pour moi. Je t’en prie.

Ses yeux se remplissent de larmes et ses lèvres se posent sur les miennes.

• Je ne peux nier le sentiment qui grandit en moi en ce moment même. Ce sentiment a toujours été présent depuis que tes yeux ont croisé les miens à l’hôpital… Mais…
• Mais ? demandais-je, hoquetant.
• Mais je dois… Je veux tout savoir sur nous. Comment toi tu l’as vécu. Afin de tenter d’effacer cette peur que j’ai.
• Quelle peur mon petit lion ? Je serai toujours là pour te protéger. Rien ne pourra t’arriver tant que je serai là.
• Justement. Cette peur de me confier, de me donner entier à toi pour qu’ensuite… tu me brises. Tu auras… tu as ce pouvoir-là. Comme cette fois-là… dans ma chambre… où tu m’as dit que tu ne pouvais pas…

À mon tour de me briser. Il me supplie de tout lui raconter. Je ne sais pas, surtout au regard de son état actuel de santé. Il me rassure, à présent qu’il est dans mes bras, il se sent beaucoup mieux. Il se cale confortablement contre mon épaule et m’encourage. Sa main passe sous mon T-shirt et me caresse la poitrine. Je m’exécute donc et me mets à nu. J’espère juste qu’il pourra me pardonner après ça.

Notre premier jour à la grotte : cette fois-là, j’ai vraiment failli l’embrasser pour la première fois. Mon corps était désespérément attiré par le sien sans que je sache pourquoi et ce depuis un moment. Même dans sa chambre, le soir où il a fui Ma et qu’elle avait pleuré. Je ne comprenais pas et j'ai moi-même fui pour me réfugier chez Lydia.

Puis Ma m’appelle et m’annonce qu’il est à l’hôpital : j’ai cru que mon cœur s’arrêtait. Lorsque je l’ai vu dans ce lit, recroquevillé sur lui-même, paraissant si fragile, je n'ai pas pu m'empêcher de m’allonger près de lui pour le recouvrir de mon corps et ainsi le protéger. Mon palpitant pulsait à plein rythme à ce moment-là.

Et l’apparition de Lydia… Je n’avais même pas réalisé qu’elle s’était présentée à lui comme étant ma petite amie. Je ne voyais que son visage tordu par la douleur, que ses yeux exprimant tant de souffrances. Je l'ai accompagné au cinéma, la mort dans l’âme : je ne désirais qu’une chose, retourner auprès de lui. Je savais qu’il fallait que je rentre : j’avais comme un mauvais pressentiment. Lorsque je l’ai vu porter la pile de médicaments à sa bouche, j’ai vu rouge. Je le sais aujourd’hui : j’ai failli lui dire je t’aime à ce moment-là mais j’étais terrifié. Terrifié par mes propres sentiments. Terrifié par le fait que je puisse ressentir de l’amour pour un autre garçon.

Du coup… j’ai voulu me prouver que je n’étais pas homosexuel et… j’ai essayé avec Lydia. Sans prendre en considération ce qu’elle aurait pu ressentir. Je lui ai donné rendez-vous au centre commercial et lorsque je l’ai vu… je l’ai embrassé. Mon corps entier l’a rejeté. Je ne voulais pas d’elle. Je l’ai donc repoussé et elle m’a giflé, un immense désespoir dans les yeux.

Je ne comprenais plus rien. Je ne voulais pas comprendre. Ce soir-là, quand il est venu dans ma chambre, je ne savais pas comment réagir. J’ai encore utilisé la carte du sarcasme, de l'indifférence. Mais quelque chose avait changé. Quelque chose dans son regard. Lorsque les larmes y ont perlé, je n’ai pas pu m’en empêcher : je l’ai embrassé.

Ça a été comme une révélation : si mon corps, mon âme avaient rejeté Lydia cet après-midi-là, ils accueillaient Trist avec une joie et un plaisir non dissimulés. Et… Oh surprise ! Mon petit lion avait envie de moi autant que moi de lui… Et puis… J’ai découvert sa cicatrice et encore une fois j’ai fui.

Je n’ai pas analysé ce que je ressentais, je voulais juste… juste être auprès de lui, en bon lâche que je suis. J’ai nourri ses sentiments tout en cachant les miens jusqu’à ce fameux jour. Ce jour où j’ai commis ma plus grande erreur : celle d’avoir eu peur de cet amour que je ressentais pour lui.

Je ne voulais pas le croire. Il ne pouvait pas être amoureux de moi. Mais quel con j’ai été ! Toutes ces caresses, ces baisers, ces câlins n’étaient certainement pas anodins ! Mais j’ai préféré fermer les yeux. En bon lâche.

Et puis… et puis il a disparu. Ces six derniers mois ont été les pires de ma vie. La plupart des personnes le croyait mort. Je n’avais plus goût à rien : si je n’ai pas essayé de le rejoindre c’est uniquement pour que Ma ne souffre pas encore plus. Et aussi parce que… je nourrissais l’espoir secret qu’il me revienne enfin. Et mes prières ont été exaucées.

• Voilà… Tu sais… tu sais à peu près tout. Aujourd’hui… murmurai-je, c’est plus toi qui détient le pouvoir de me détruire que l’inverse…

Ses mains se posent sur mon visage. Je prends enfin le courage de le regarder : ses prunelles sont larmoyantes et expriment une tristesse infinie.

• Merci… Mon démon angélique. Merci d’avoir été aussi honnête avec moi. Pour tout t’avouer… Je crois bien… Je crois bien me souvenir de tout ça… Je t’en prie… Dis-moi… Dis-moi que tout ça est derrière nous… Que ça ne recommencera pas…

Je ne peux m’empêcher d’être un peu brutal et le plaque sur le lit, moi entre ses jambes. Son visage reflète alors une immense surprise : ses iris noisettes se noient dans le blanc de ses yeux, tellement ils sont ouverts. Mon corps écrase littéralement le sien : il ne peut absolument pas se défaire de mon emprise, même s’il le voulait.

Mais je sens, je sais qu’il ne veut pas. Je pose mon front sur le sien : il est encore brûlant. Il a besoin de repos pour que sa fièvre descende. Mais avant ça… Je lève mon visage et plonge ma dualité dans la sienne : doucement, lentement je m’approche. Plus je suis près, plus ses prunelles se dilatent. Je mets directement ma langue dans sa bouche et enroule la sienne. Sans fermer mon œil, qu’il voit, qu’il sente tout l’amour que j’ai pour lui. En effet, je ne peux cacher mon érection à ce moment-là.

Et peu m’importe. Tant pis. Je veux qu’il sache. Je suis fatigué de me cacher, surtout de lui. Ses yeux finissent par se fermer et le mien aussi. Mon baiser devient plus tendre, plus langoureux. Mes mains libèrent les siennes qui viennent automatiquement se perdre dans mes cheveux.

• Putain… marmonai-je…
• Quoi ?
• Réalises-tu à quel point… À quel point tu détiens ma vie entre tes mains mon petit lion ?
• Je crois, oui… J’ai vécu la même chose… Il y a de cela six mois… Mais j’ai peur Rey… Je suis terrifié.

Je sais.

C’est ce que je voudais lui répondre mais j’en suis parfaitement incapable.