55. Sensuelle prise d’initiative

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Clothilde

Marguerite me fait signe de la suivre et je m’exécute en baissant les yeux, refusant de croiser le regard des villageois que nous pourrions trouver sur notre chemin. J’ai bien essayé d’interagir un peu, mais c’est comme si les femmes se méfiaient de moi. Les hommes, eux, se montrent un peu trop charmants, et leurs regards me collent des frissons, si bien que je ne sors qu’en présence de la Normande ou avec Einar.

Une partie de moi a très envie de relever la tête, de soutenir le regard de tout un chacun, mais provoquer ne servirait à rien dans ces circonstances et je me montre patiente. Qui sait, peut-être cela finira-t-il par changer ?

Lorsque Marguerite s’arrête devant une vieille maison à l’allure un peu plus délabrée que les autres, je prends conscience de ce que je m’apprête à faire. Parler de tout ça avec une inconnue me semble aussi insurmontable que lorsque je l’ai fait avec ma seule alliée ici, et je me rends compte que mon éducation m’a donné un côté prude que ne semblent pas avoir les femmes ici. Est-ce cela qui attire Einar, chez moi ? Ou aimerait-il au contraire que je sois moins réservée dès qu’il s’agit de sexe ? Je me pose bien trop de questions et me torture encore et toujours l’esprit, mais une partie de moi est angoissée à l’idée qu’il se lasse et me délaisse, m’obligeant à n’être plus que sa bonne à tout faire et à supporter une voire plusieurs autres femmes dans son lit. Peut-être même se débarrasserait-il de moi en me renvoyant à son frère, qui sait ? J’ai beau apprendre à la connaître davantage chaque jour que Dieu fait, certains aspects de la vie Viking me sont encore inconnus.

Marguerite ouvre la porte de la maison après avoir frappé et m’invite à la suivre. Une vieille femme se trouve à l’intérieur, assise à une table qui regorge de plantes diverses qu’elle est en train d’arroser. Dans sa longue robe d’un noir profond, elle me ferait presque peur si elle n’affichait pas un sourire chaleureux bien qu’édenté.

— Bonjour, Astrid, la salue Marguerite dans leur langue. Comment vas-tu ? Je te présente Clothilde.

— Eh bien, que de Normandes ici. Vous avez besoin de mes services ? Je n’ai pas l’habitude de te voir ici, Marguerite, c’est une vraie surprise.

Marguerite me lance un regard et je rougis déjà. Entre la barrière de la langue qui, si je la comprends plutôt bien, me pose des problèmes quand je dois moi-même échanger, et le sujet à aborder, j’avoue que j’ai rarement été aussi mal à l’aise de ma vie. Dieu merci, mon alliée est un ange.

— Clothilde souhaiterait savoir si tu as des potions spéciales pour les femmes. De quoi lui éviter d’enfanter pour le moment.

Elle n’y va pas par quatre chemins quand moi j’aurais tergiversé pendant des heures, à n’en point douter. Je la remercie d’un regard et approche alors que la guérisseuse nous fait signe de nous installer.

— Je vois, énonce-t-elle énigmatiquement. Mais pourquoi refuser d’enfanter ? Ne serait-ce pas là le meilleur moyen de t’attacher cet homme de manière définitive ?

Elle a raison, j’imagine. Mais porter un enfant me fait peur et pour plusieurs raisons.

— Ma mère est morte en enfantant, réponds-je finalement. Et j’ai passé les huit dernières années de ma vie à élever quatre enfants. Je n’ai que dix-huit ans, j’aimerais… avoir un peu de temps avant de devoir à nouveau m’occuper de nouveaux-nés.

— Le meilleur moyen est d’éviter sa couche, mais je suppose que ce n’est pas envisageable… Ces hommes ne pensent que par leurs besoins, soupire-t-elle. Je vais te préparer une potion, elle est efficace. Mais évite quand même les périodes où tu sens tes seins gonfler et ton besoin de copuler augmenter. Sinon, je ne garantis pas le résultat. Vous attendez un peu que je prépare ma concoction ?

Nous acquiesçons toutes les deux alors qu’elle se lève comme si elle avait vingt ans et virevolte dans son intérieur, récupérant des bocaux à droite et à gauche en sifflotant. Cette femme est un personnage que je suis ravie de découvrir. En revanche, j’aimerais bien qu’elle m’explique comment je pourrais résister à Einar qui semble très doué pour réveiller mon envie de lui quand bon lui semble. Il a bien compris que certains de ses gestes, certaines de ses caresses, induisaient en moi une folle envie de m’unir à lui.

Nous ressortons de chez la guérisseuse une bonne demi-heure plus tard avec mon précieux elixir et des consignes strictes concernant la posologie et la fréquence d’utilisation. Est-ce que ça fonctionne réellement ? Je n’en ai pas la moindre idée, mais je sens bien qu’Einar est frustré chaque fois ou presque qu’il doit finir ailleurs qu’entre mes cuisses, et j’ai souvent moi-même du mal à mesurer le moment où il faut qu’il se stoppe.

Je remercie chaleureusement mon accompagnatrice pour son coup de main et bifurque au bout du chemin en direction de la grange où sont abrités les animaux pour l’hiver. Einar m’y a emmenée il y a quelques jours et est parvenu à convaincre Ingrid, une vieille Viking peu aimable, de me laisser l’aider. Cette femme est un peu la vieille fille du village. Elle n’a pas de famille et se contente de vivre auprès des bêtes, renfermée sur elle-même, mais je perçois chez elle ce besoin d’indépendance qu’elle semble revendiquer depuis toujours, celui de n’appartenir à personne, et je me dis que si je n’étais pas obligée d’être avec Einar, j’aurais pu finir comme elle. Peut-être nous ressemblons nous un peu, en vérité, mais ma rencontre avec le Viking a tout changé et, si le côté esclave me dérange, la vie avec lui est plutôt agréable.

Je passe le reste de ma journée à croiser Ingrid sans que nous nous parlions. Je retrouve avec plaisir mes premières amours en fabriquant du fromage avec le lait de brebis, et suis surprise lorsque la vieille dame me tend l’un de ceux arrivés à maturation pour le ramener à la maison.

Maison qui n’est pas la mienne, évidemment, mais c’est le lieu où je vis avec Einar tant que la sienne n’est pas terminée, et j’y reviens avec la boule au ventre. Si Bjorn ne me parle pas, il n’a de cesse de me regarder avec dédain et un poil de méchanceté. Quant à sa mère, j’ai beau avoir marqué des points lors de l’Assemblée, ce n’est pas non plus le grand amour entre nous.

Je dépose le fromage sur la table et suis surprise par le silence qui règne dans l’habitation. Einar se trouve dans notre chambre, torse nu. Il se change après sa journée de travail et il est… lui. Grand, imposant, musclé, beau et tentateur. Mes joues s’échauffent lorsqu’il me voit en train de le dévorer du regard, et je me dis qu’il serait temps de voir comment il réagit à mes avances. C’est toujours lui qui me montre qu’il a envie de moi, alors… j’avance vers lui en ôtant mon châle, que je laisse tomber sur le lit.

— Ta journée a été bonne ? lui demandé-je en délaçant ma robe.

— Euh… oui, répond-il, déconcentré par la vue que je lui offre. J’ai bien avancé et la maison sera bientôt prête.

Je laisse tomber ma robe à mes chevilles et frissonne bien malgré moi sans savoir si c’est davantage son regard ou la fraîcheur de l’air qui en est la cause. Toujours est-il que ma peau semble hypersensible, sans parler de mes seins qui pointent douloureusement.

— Tu es pressé ou on peut rester un peu tranquilles ici ? continué-je en glissant mes pouces sous le cordeau de ses braies sans quitter ses yeux des miens.

— Je suis pressé de continuer ce que tu es en train de faire, mais on a tout le temps du monde, ma jolie Clothilde.

— Le contraire m’aurait étonnée, ris-je en faisant glisser le tissu le long de ses jambes avant de me presser contre lui. J’ai parfois l’impression que tu aurais envie de passer ta vie entre mes cuisses, Einar. C’est flatteur, d’ailleurs, quoique je me demande si je ne devrais pas avoir peur que tu me tues. On peut mourir de trop faire l’amour, tu crois ?

Je promène mes paumes sur son torse, descends le long de son ventre et empaume son sexe durcissant pour le caresser tout en frôlant ses lèvres des miennes. Ses grandes mains se posent sur mes reins et me plaquent plus fermement contre lui, me tirant un gémissement qui le fait sourire avec fierté.

— Moi, je vais mourir si on ne fait pas l’amour, là, tout de suite.

— Impatient, beau Viking ? ris-je en le faisant reculer jusqu’à ce qu’il se laisse tomber sur le lit. Est-ce que tu me permets ? Ou tu veux jouer le mâle qui maîtrise tout ?

En lui posant ces questions, je monte à mon tour sur le lit, directement sur lui. Mes genoux de chaque côté de ses cuisses, je pose mes lèvres au niveau de son sternum et remonte dans son cou. J’essaie d’afficher une assurance que je n’ai pas vraiment, bien que la situation m’excite énormément.

— Fais-moi tout ce que tu veux, parvient-il à grommeler d’une voix rauque.

Comme il peut me le faire lorsqu’il cherche à m’exciter, je lèche sa peau et souffle dessus, le faisant frissonner. Dans le même temps, j’ondule contre sa virilité qui prend de la vigueur, et je m’applique à faire monter la température comme lui peut le faire lorsqu’il a envie de me rendre folle.

Je me fige pourtant en entendant la porte de la maison grincer, mais un seul regard dans la direction d’Einar me convainc de ne pas m’arrêter pour autant. Sans parler de ses mains qui se promènent sur ma peau, passant dans mon dos, descendant sur mes fesses, remontant jusqu’à mes seins qu’il adore cajoler lorsqu’il ne les malmène pas de ses dents. Cependant, aujourd’hui, c’est moi qui lui intime de ne pas bouger d’un froncement de sourcils lorsqu’il me soulève légèrement en espérant s’introduire en moi. Pas très patient, mon Viking grogne et malaxe plus fermement mon fessier, m’incitant à accélérer mon déhanchement contre lui.

Quand enfin je l’accueille en moi, Einar m’attire contre lui et capture ma bouche avec force, comme s’il la revendiquait. Et j’adore ça, même si je ne le lui avouerai jamais. A défaut de prendre le dessus durant notre étreinte, puisqu’il me laisse mener la danse, il contrôle notre baiser et sa langue conquérante joue avec la mienne de la plus divine des manières. Je ne reste pas inactive de mon côté et me soulève en rythme, tentant de trouver l’angle idéal pour nous mener tous les deux au plaisir ultime.

Cette étreinte est à la fois si différente et tellement similaire aux autres qu’elle me donne le tournis. Avec Einar, ces moments sont chargés en tension, en sensualité et en émotion. C’est fort, terriblement agréable et intense, et le fait qu’il se laisse aller à me donner la main sur notre étreinte ne rend la chose que plus étourdissante. Je suis essoufflée, les muscles de mes cuisses me brûlent, mais je ne lâche pas l’affaire et j’adore sentir ses mains s’enfoncer dans la chair tendre de mes hanches pour accompagner mes mouvements. L’orgasme me fauche avec brutalité mais je maintiens la cadence jusqu’à ce qu’il étouffe son gémissement contre mes lèvres, se déversant finalement en moi. Cela ne rend la chose que plus agréable encore, et je me laisse tomber contre son torse en riant doucement.

— Je pourrais m’y habituer, fais attention, murmuré-je, le souffle court.

— Oh, je suis désolé, je… D’habitude, tu te recules… énonce-t-il alors que je sens son membre toujours dur en moi.

— Je suis allée voir la guérisseuse, ne t’occupe pas de ça… Si elle est compétente, on devrait pouvoir faire ça plus souvent.

— Vraiment ? Plus souvent ? Et pourquoi pas tout de suite ? rit-il avant de m’embrasser à nouveau.

— Il va falloir que j’aide Marguerite à préparer le repas. La corvée des esclaves, tout ça, tu sais ?

— Tu es MON esclave, murmure-t-il, c’est mon plaisir que tu dois servir.

— Ton plaisir et ton estomac, beau Viking. Tu as une maison à terminer de bâtir pour qu’on puisse batifoler partout sans avoir à se retenir, chuchoté-je à son oreille en mordillant son lobe.

— Je vais faire au plus vite, promis.

Je lui souris et m’empresse de me lever. Quitte à avoir le pouvoir, autant que ce soit jusqu’au bout. Einar grommelle mais ne me rattrape pas, pourtant ses yeux ne me quittent pas tandis que je m’habille. Une fois prête, je pousse la tenture pour sortir de la pièce et souffle un baiser dans sa direction, un sourire innocent plaqué sur mes lèvres.

— Garde de l’énergie pour ce soir. A tout de suite, beau Viking.

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