Chapitre 40

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Un autre soir, la belle-mère d’Astride avait encore frappé avec ses accusations farfelues. Cette fois, elle lui avait dit qu’elle craignait que Nicolas coupe le pénis de son propre fils.

Tout était parti d’une situation anodine. Nicolas donnait le bain à son fils de 5 ans. À cet âge-là, un enfant est encore dans la découverte de son corps, insouciant et parfois un peu turbulent. Ce soir-là, comme tous les enfants de son âge, le petit s’amusait à secouer son “kiki” dans tous les sens, ricanant de la réaction de son père.

— Si tu continues, je te le coupe ! lui dit Nicolas sur un ton exagérément sérieux, en faisant mine de le menacer.

Le gamin éclata de rire.

— Mais après, je pourrai plus faire pipi ! répondit-il, entre deux éclats de rire.

— Si, tu feras pipi assis, rétorqua Nicolas, prenant le jeu à la légère.

— Mais je vais saigner !

— Bah, on mettra un sparadrap, dit Nicolas, amusé par l’innocence de la conversation.

Un échange tout simple, de la pure comédie enfantine. Mais dans l’esprit dérangé de sa belle-mère, ce moment fut transformé en quelque chose de bien plus sinistre. Quelques jours plus tard, elle rapporta à Astride qu’elle craignait que Nicolas soit capable de “couper le sexe” de son propre fils.

Quand Nicolas entendit cette interprétation absurde, il resta sans voix un instant. Puis, en colère mais avec un sang-froid calculé, il attendit que la belle-mère soit dans la pièce avec Astride avant de dire ce qu’il pensait d’elle.

— Sérieusement, vous croyez que je vais mutiler mon fils ? demanda-t-il d’un ton acerbe.

La belle-mère, sans se démonter, répondit :

— Tu as dit que tu allais lui couper ! Je t’ai entendu !

— Et c’est censé être une menace réelle pour vous ? Vous êtes en train de me dire que vous pensez vraiment que je vais prendre des ciseaux et faire ça à mon propre enfant ? Vous vous rendez compte de ce que vous dites, là ?

La belle-mère ne trouva rien de mieux à répondre qu’une nouvelle envolée mystique sur les mauvaises ondes que Nicolas dégageait dans la maison, mais cette fois, il ne l’écoutait même plus. Il se contenta de sourire, sachant qu’il venait de démonter son argumentation ridicule.

Le plus inquiétant pour Nicolas, c’était qu’il savait que lorsqu’il était au travail, et qu’Astride aussi, c’était cette tordue de grand-mère qui s’occupait de son fils. Cette femme, capable de critiques insidieuses et de comparaisons absurdes, ne manquait jamais une occasion de rabaisser les efforts du petit.

Un souvenir en particulier lui revenait en tête : un jour, son fils de 5 ans avait peint une toile à la maison. Le petit avait passé tout un après-midi à y travailler, concentré, ses pinceaux entre les doigts, fier de créer quelque chose par lui-même. Quand il avait enfin terminé, il était venu montrer son œuvre à sa grand-mère, le visage illuminé d’un large sourire, avec toute la fierté innocente d’un enfant.

— Regarde, Mamie ! J’ai fait un tableau !

La vieille femme, fidèle à elle-même, avait observé la toile en silence pendant quelques secondes avant de se lancer, d’un ton sévère alors que lui, il avait montré son dessin à sa grand-mère, visiblement fier de son travail.

— C’est pas mal, mais… tu pourrais faire beaucoup mieux, lui avait-elle dit, les yeux scrutant la toile avec un air dédaigneux. Regarde Renoir, lui, il peignait de véritables chefs-d’œuvre ! Tu devrais rajouter des détails, ce n’est pas fini comme ça.

L’enfant, déconcerté, ne comprenait pas vraiment la comparaison avec ce Renoir dont il n’avait jamais entendu parler. Mais ce qu’il comprenait très bien, c’était que son effort, pour elle, n’était pas suffisant. Nicolas se souvenait de l’expression de son fils, le sourire disparaissant lentement de son visage. Sous la pression de ces mots, l’enfant, pourtant fier de sa création, avait repris ses pinceaux. Sa main tremblait un peu, incertaine. Plus il ajoutait des détails, plus il s’éloignait de ce qu’il avait voulu créer au départ. Sa grand-mère ne cessait de donner des directives, imposant sa vision d’une perfection qui n’avait aucun sens pour un enfant de son âge.

Quand enfin il posa son pinceau, les larmes montaient déjà. La toile, son tableau, ce qu’il avait peint avec tant d’enthousiasme, était gâché. Ce n’était plus son œuvre, mais une sorte d’imposition extérieure qui avait vidé son travail de tout son sens.

— C’est nul ! avait-il fini par pleurer, jetant un regard désespéré à ce qui était devenu un amas de traits et de couleurs qui ne lui parlaient plus.

Nicolas, qui avait été témoin de la scène, bouillonnait intérieurement. Comment pouvait-on faire ça à un enfant ? Cette quête de perfection forcée, ces critiques déguisées en encouragements… tout cela ne faisait qu’étouffer la créativité de son fils. Pour lui, c’était la goutte de trop.

— C’est qu’un gamin de 5 ans ! se disait-il avec rage, encore aujourd’hui. Comment osait-elle comparer l’innocente créativité d’un enfant à celle d’un grand maître de la peinture ?

Nicolas ne supportait pas l’idée que cette femme puisse passer autant de temps avec son fils et lui inculquer cette vision toxique, celle qui imposait la perfection à tout prix et sapait la confiance des autres sous prétexte de standards ridiculement élevés, surtout en sachant le niveau d'éducation raté qu'elle essaye de donner à ses autres petits enfants qui se pensents supérieurs.

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