Chapitre 19 : Entre colère et envie

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Une fois arrivée à l’hôtel, je me précipite dans ma chambre, impatiente de découvrir ce qui se cache sur ce morceau de papier. J’ai bien ma petite idée, évidemment, je pense qu’il s’agit de son numéro de téléphone, mais je meurs d’impatience d’en avoir le cœur net.

Chose que je fais immédiatement après avoir allumé la lumière de ma suite. Tout en marchant pour m’asseoir sur le lit, je déplie la petite feuille et l’inspecte d’avant en arrière. À première vue, je me suis trompée, il n’y a aucun numéro de téléphone la-dessus ! Les sourcils froncés, passablement déçue, je commence ma lecture de ces mots manuscrits :

« Alicia, jolie demoiselle. Tu n’es plus celle que j’ai connue, trop timide, trop réservé, celle qui n’aimait pas le goût du risque, tu as changé. J’espère que j’ai changé moi aussi, d’une façon ou d’une autre. Voudrais-tu me revoir ? Que l’on prenne un verre ensemble ? Le courant semblait passé entre nous ce soir. Il faisait des éclairs. En tout cas, j’aimerai beaucoup avoir la chance de passer quelques instants supplémentaires avec toi. Demain ? Vingt heures au P’tit Paradis ? Je t’attendrai impatiemment. Daegan.»

Ma main se referme instinctivement sur ce morceau de papier que je froisse si fort que mes jointures blanchissent. Désespérée, je ferme les yeux en pensant au bonheur que cette note m’aurait procuré quelques années plus tôt. S’il savait à quel point je le désirais à l’époque, peut-être que nous serions deux aujourd’hui… Mais il a raison, il l’a d’ailleurs écrit noir sur blanc, je ne suis plus la même, j’ai changé, mais pas de la façon qu’il espère. Je n’irai pas à ce rendez-vous, même si cette initiative me laisse un goût amer au travers de la bouche et me coûte.

Car la vérité est que je meurs d’envie de le rejoindre demain, même pour une simple bière, un simple regard en arrière ! Rien que pour le revoir une dernière fois, si beau, si homme, si Daegan… Mais ma raison me l’interdit. Et heureusement qu’elle existe parce sinon, je serais déjà cuite à l’heure qu’il est ! Enfin, quand je dis cuite, je veux dire complètement nue et à cheval son corps puissant et viril, prête à atteindre l’orgasme suprême ! Je suis honnête au moins…

Je me félicite intérieurement de ne pas me laisser avoir et me lève afin de ranger quelque part ou je ne le verrais plus, ce petit bout de papier ou trône le message de mon coup de cœur du lycée. Hors de question que je sombre ! Je suis devenue une femme forte et qu’il m’en coûte ! Je n’abandonnerai pas…

Mais maintenant que je repense à tout ça, je n’ai pas envie de le laisser m’attendre sagement dans ce restaurant dont le nom me fait penser à ces couples bienheureux, dégoulinant d’amour et puant le romantisme à plein nez. Ce serait bien trop simple, bien trop gentil de ma part avec ce que j’ai subit autrefois…

Il me faut quelque chose qui le vexe, quelque chose qui le blesse, qui le fasse ruminer de tout son être comme je l’ai fait si souvent lorsque nous étions encore scolarisés. Toutes ces nuits où j’ai pleuré son ignorance. Toutes les larmes gaspillées par ses soins. Toutes les fois où il me regardait, narquois, au bras de sa nouvelle conquête d’une soirée. Mon cœur brisé. Mes sentiments envolés, en miette, comme les bibelots qui ornaient le petit bureau de ma chambre…

Et cette confiance en moi qui me manquait durant si longtemps. Tous les efforts que j’ai dû fournir pour la regagner. Et l’amour que j’ai eu peine à donner après tout ça…

Pour sûr, Daegan, tu paieras !

La colère remplace très vite le désir et l’excitation que je ressentais en lisant ces mots. Je sens mes nerfs monter et le sang bouillir dans mes oreilles. Même mes dents se serrent ! Comme je l’avais dit, les rôles sont bel et bien en train de s’inverser et je te jure, Daegan, saleté de beau gosse hypocrite, tu vas très vite retomber de ton petit nuage de minet qui met dans son lit toutes les filles qu’il désire ! Tu ne m’auras pas ! Je ne suis pas de celles-là ! Je ne suis pas faite pour toi !

Sans réfléchir plus longtemps, je saisis mon portable et cherche le numéro de Gabin. Merde ! Il est plus de trois heures du matin, pas sûre qu’il répond à ce moment de la nuit ! Je décide donc de lui laisser un message aussi simple que possible.

« Alicia : 3H29 : On se voit demain ? J’ai envie… »

Rien de plus, rien de moins et tant pis si je dois me servir de lui pour toucher l’autre. Ce n’est pas bien, je sais, mais je n’ai d’autre choix ! D’ailleurs, il ne me reste que quatre jours de vacances dans le Pas-de-Calais, je rentrerai bientôt chez moi, je vais vite reprendre mes habitudes et les oublier tous les deux. Ce n’est qu’une passade, un mauvais moment qui ne nous hantera pas, c’est évident !

***

Cela fait plus d’une heure que je tourne dans mon lit, sans réussir à trouver une place confortable. Morphée ne veut pas venir me jeter sa poudre de fée. C’est sûr, je suis trop énervée, trop excitée à l’idée du coup du siècle que je prépare pour ce boulet rebelle. Incapable de fermer l’œil, je me concentre dans ma lecture et tout ce que je peux imaginer me ramène à lui. Ses mains sur mon corps, entre mes cuisses, sa bouche contre la mienne et son souffle dans mon cou. Sa voix roque lorsqu’il me signifie que je suis belle, que je l’excite, qu’il m’aime… N’importe quoi ! Il faut que ça cesse ! Putain Daegan ! Comment fais-tu pour me pourrir autant l’esprit ?!

Décidant qu’il faut que j’assouvisse ce désir qui me consume de l’intérieur, je me rends dans la salle d’eau et me fait couler un bain. J’imagine qu’une séance caresse s’impose, et bien sûr, je le ferais en pensant à son corps de rêve. Peut-être qu’ensuite, mon cerveau me fichera la paix, le temps que je dorme, quelques heures tout au moins serait parfait !

Une fois que les bulles aux fragrances de fleurs ont envahi la baignoire chaude, je me faufile à l’intérieur, jouet vibrant et waterproof en main. Évidemment, avec toutes les pensées coquines qui me passent par la tête depuis tout à l’heure, il ne me faut que quelques minutes pour atteindre le haut de la montagne. Mon corps est parcouru de spasmes, ma tête me tourne, je sors de l’eau en vitesse et enfile un peignoir avant de me jeter, telle une étoile de mer sur le lit.

Cette fois, je n’ai pas besoin de compter quelconque mouton ! Mes pensées divaguent chez moi, à Paris. Je pense à ma mère, à mon père, à ma sœur et sincèrement, rien ne me donne envie…

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