Chapitre VIII
7 Août, 3 ans avant l’Avènement, Moscou, Russie.
Syrine avait enlevé ses chaussures et marchait pieds nus pour la première fois sur une route moscovite, les bras en croix, des larmes baignant sa jolie peau de porcelaine. Kami avançait à côté d’elle, le regard fou, incapable de se fixer sur quoi que ce soit. Ils croisaient des visages abîmés, des pauvres enfants déments ou alcooliques, parfois les deux, des vieillards prématurés âgés d’à peine cinquante ans… Et à côté d’eux, des bâtiments d’une richesse incomparable, quelques automobiles dont la rareté n’avait d’égal que le luxe, et des touristes se mouchant dans des billets.
Tous les deux se sentaient terriblement petits, au milieu de cette cité qui revêtait l’apparat du fantasme et de la féerie dans leur imagination. Moscou. Combien d’années avaient-ils attendues pour voir de leurs yeux sa célèbre splendeur ? Leurs cœurs s’étaient emballés lorsqu’ils avaient passé la frontière russe, mais de voir Moscou… Rien n’égalait ce qu’ils ressentaient alors. Tout semblait amplifié et démesuré, de la magnificence de la ville à la misère de la majorité des moscovites.
Il était évident que Moscou était une capitale d’inégalités gigantesques, où la minuscule minorité possédait quatre-vingt dix pour cent de la richesse. Mais malgré tout, les deux français ne pouvaient pas la désaimer.
Tout semblait parfait. Le ciel était d’un azur uniforme et les températures n’avaient jamais été aussi élevées depuis des années.
Syrine s’approcha d’un garçon couché sur le trottoir, faisant mine de chercher de l’argent à lui offrir.
— Ne fais pas ça Syrine, l’arrêta Anna avec son accent chantant.
La jeune femme se retourna. Les deux français étaient suivis de près par Stefan et Antha, puis par Anna et leur nouveau protégé. Le jeune garçon devait avoir seize ans, à peine, mais était déjà bâti comme un homme. Le fait d’avoir été sous-alimenté accentuait sa maigreur naturelle. Pourtant, il possédait une carrure masculine et une musculature fine mais développée.
C’était un beau garçon, avec de jolis yeux noirs, en amande, et un visage dont les traits carrés étaient bien appuyés. En un mois et demi, il n’avait jamais prononcé un mot. Peut-être ne comprenait-il pas le français, ni le polonais. Mais quand les deux sœurs lui parlaient russe, il n’avait pas plus de réaction.
Même alors que Syrine lui nettoyait ses plaies, il n’avait pas émis le moindre son. Pas même un grognement. Finalement, tout le monde s’était accoutumé à ce silence total, et aucun d’entre eux n’avait plus l’espoir de l’entendre un jour parler.
— Je ne comprends pas. Nous ne manquerons pas d’argent Anna, ne t’inquiète pas.
— Ce n’est pas ma préoccupation. Le problème est qu’en donnant à ce garçon, tu seras forcée de donner aux autres. » Tout autour, les jeunes mendiants avaient les yeux rivés sur la sorcière rousse. Tous étaient imbibés de vodka, sales, et tremblants. « Et en leur donnant, tu affermis leur misère sociale.
Syrine pris son air pincé, vraisemblablement choquée par les propos de son amie polonaise. Alors Kami intervint avant que la conversation se transforme en débat sociopolitique houleux.
— Bien. Notre jeune ami doit être las de porter mes vêtements. Je propose, Syrine et Stefan, que vous l’emmeniez visiter quelques monuments ou autres attractions pendant que nous partirons, avec les filles, pour lui constituer une garde robe digne d’un membre de la caravane.
C’est ainsi que le groupe se scinda en deux ce jour là. Syrine, Stefan, et leur protégé se promenèrent une bonne heure dans la ville, admirant la beauté architecturale, s’enivrant de l’effervescence moscovite et de la douceur du climat.
En milieu d’après-midi, Syrine entraîna les deux garçons vers un étrange bâtiment rouge et beige, entouré d’une petite clôture sombre. Un ballet incessant d’entrées et de sorties semblait animer le lieu.
La galerie Tretiakov n’était pas le musée le plus fréquenté de Moscou, mais Syrine savait qu’il s’y trouvait des œuvres d’une rare beauté. Elle savait également combien les livres ou les photographies qu’elle avait pu dévorer des yeux étaient loin de transmettre la splendeur et l’émotion des tableaux.
En passant la porte, elle respira à pleins poumons. L’odeur du lieu était chargée de mystères et de spiritualité, un peu comme un vieux grimoire de sorcellerie. Mais en plus intense peut-être, car rien ne passait par les mots. Tout lui arrivait de façon brute et vraie, avec une énergie qui lui embrasait la peau.
Elle prit son jeune protégé par la main et le tira un peu. Elle voulait lui montrer à quel point l’art et l’esprit n’avaient besoin du langage. Elle connaissait bien la force des œuvres, cette force qui liait les cœurs sans prévenir et à laquelle on ne prenait jamais assez garde.
Au bout d’un certain temps, la main du garçon se crispa dans celle de la sorcière. Ils venaient de s’arrêter devant un tableau intitulé « La Mer Noire » d’Aivazovsky. Une peinture splendide, pleine de poésie et de sous-entendus. Le corps du jeune russe fut pris de tremblements et des larmes roulèrent sur ses joues. Un gémissement s’échappa d’entre ses lèvres alors qu’il cachait son visage entre ses mains, écartant légèrement ses doigts pour ne cesser de voir le tableau. Syrine recula légèrement, laissant son compagnon à son état de grâce et de transcendance.
Les lamentations silencieuses ne durèrent pas dix minutes, puis les trois amis se remirent à déambuler dans la splendeur de la galerie. Syrine observait du coin de l’œil le plus jeune de ses compagnons, dont le visage était à la fois fermé et à l’affût de tout. Stefan et elle se tenaient de chaque côté de lui. La jeune femme s’apprêtait à ouvrir la bouche, quand un masque de terreur recouvrit la face de son protégé.
Devant eux, la toile « Tulipes » de la talentueuse Irina Starjenetskaïa ornait un mur blanc qui la rendait encore plus éclatante. Cette fois, c’est un cri qui sortit de la bouche du garçon. Sans prévenir, il s’enfuit en courant, traversant chacune des salles en bousculant les visiteurs.
Syrine l’avait suivi dehors, escortée par Stefan, dans les jardins de la galerie. Là, sur une balancelle, fixant une statue déboulonnée de Brejnev, le garçon haletait. Ses mains, encore abîmées des mauvais traitements du cirque, étaient crispées l’une sur l’autre.
La sorcière s’installa à côté de lui, muette et compréhensive. Alors il tourna la tête vers elle.
— Je m’appelle Tiass, articula-t-il difficilement dans un français plus qu’hésitant. Je sais, maintenant, que j’ai ma place parmi vous.
***
16 Septembre, 3 ans avant l’Avènement, Lyon, France.
Quand on le regardait, il était impossible de deviner la souffrance qui se terrait en Mahé. Il était le genre de garçon dans lequel la Lumière trouvait un nouveau souffle. Tout, en lui, respirait la fraîcheur et la bonté. Ni son visage, ni le reste de son corps, laissait deviner son douloureux passé ou ses doutes actuels.
Tous les jours, il venait au Domaine Occulte, suivait l’entraînement imposé par Diane, prenait une douche fraîche, et s’installait dans l’Antre des Maudits. Toujours dans le même siège, au fond, dans un coin sombre. Il observait alors le triste manège de l’Organisation, les va-et-vient incessants des initiés, et chaque jour un peu plus il prenait conscience qu’ils n’étaient que de la chair à canon pour Ulome.
Ce qu’il faut bien comprendre avec Mahé, c’est qu’il était sûrement le membre le plus objectif du Domaine Occulte. Plus objectif qu’Ogora ou qu’Ayhan, bien plus que n’importe quelle nouvelle recrue avide de pouvoir et de mystères. Et le regard qu’il portait sur l’endroit était presque dénué de sentiments. Il était venu à Lyon pour connaître un autre pan de la magie, et c’était chose faite. Bientôt, il en saurait assez et reprendrait son chemin. C’était son projet. Il n’avait plus rien à faire ici, au Domaine Occulte, car il projetait de connaître l’art de la magie, et non celui de la guerre. Bientôt il s’en irait.Il tourna les yeux vers Ayhan qui discutait, près du comptoir, avec Ogora. Le suivrait-il, son bel amant, lorsqu’il quitterait la merveilleuse cité des Lumières ? Accepterait-il de laisser derrière lui Ulome et les autres, pour l’inconnu et l’aventure ?
Rien n’était certain. Il avait un comportement étrange depuis la venue de Damase, comme si tout lui était égal. Il ne quittait plus le morceau de soie que son père lui avait laissé, mais refusait de parler de lui. Il ne semblait pas vraiment peiné que son pouvoir ait tué jadis, ce qui pour Mahé était la plus grande preuve d’un profond mal-être chez son amant. Mais il respectait sa douleur. Il ne le forcerait jamais à parler. C’était comme ça. Certaines souffrances ne pouvaient pas être exprimées, certains remords devaient être plus qu’un châtiment de conscience mais une damnation de l’âme.
La seule chose qui l’inquiétait véritablement, c’était la transformation progressive d’Ayhan. Plus le temps passait, plus Ayhan ressemblait à ce qu’il connaissait de Kami. Et cet état de pénitence perpétuelle n’allait rien arranger. Plusieurs mois étaient passés depuis la visite de Damase et les changements dans le comportement d’Ayhan étaient considérables. Il se battait avec plus d’ardeur, cherchait des sortilèges plus offensifs, intriguait et mentait.
L’avantage du pouvoir de Mahé, c’est qu’il était difficile de lui cacher des choses. Plus il usait de son don, plus il était capable d’entendre les conversations à distance. Évidemment, il n’écoutait pas Ayhan. Mais il se servait de la vision à distance pour l’observer, parfois. Et il s’était avéré que, depuis des mois, son amant rendait visiter à deux amis qu’il feignait de ne plus revoir. Mahé n’était donc pas dupe. Ayhan n’avait jamais renoncé à Raiden et Raven.
***
11 Octobre, 3 ans avant l’Avènement, Moscou, Russie.
Il n’avait pas beaucoup parlé de lui pendant les trois mois qui avaient suivi la visite de la galerie, mais Tiass était un élève assidu et doué. Chaque jour, Anna lui enseignait le français et le polonais. Il progressait à une vitesse folle. Pourtant, ces progrès ne l’emmenaient pas à communiquer plus intensément avec ses protecteurs. Il était, de nature, calme et très peu bavard, mais cela ne faisait pas pour autant de lui un mauvais compagnon de fortune. Son visage était constamment souriant, et il avait toujours soucis de bien faire.
Antha invitait souvent Tiass à s’isoler avec elle, pour lui enseigner le solfège et le violon, et Stefan profitait des sorties régulières des autres pour parler d’Histoire.
Parfois, Syrine l’emmenait visiter des musées ou de grands monuments moscovites, car c’était un garçon d’une sensibilité artistique extrêmement rare. Il ne cessait de s’émerveiller de tout ce qu’il voyait et, bien entendu, la sorcière en était ravie. Même s’il n’avait rien dit de son passé, elle se doutait qu’il n’avait sûrement pas été habitué à la culture ni éveillé à l’Art. Et pourtant, son âme en avait un besoin irrépressible.
Le rythme que ses amis lui imposaient était soutenu, beaucoup n’auraient pas supporté, mais Tiass était tout à son apprentissage. En trois mois, il avait déjà appris une quantité de choses impressionnante, comme si les années de privation intellectuelle remontaient à la surface. Elles lui donnaient une soif hargneuse d’apprendre.
Il y avait, cependant, une chose dans son enseignement qu’il redoutait avec force. C’était les moments où Kami l’enlevait aux autres pour l’entraîner au combat et aux arts occultes. Il ne cessait de parler des dangers du monde, d’une secte qui était après eux et des gens du cirque qui devaient sûrement vouloir le récupérer. Il ne l’épargnait jamais. Que ce soit lors de leurs affrontements, où Tiass maniait la faux qu’ils avaient volée à son geôlier, ou pendant les leçons occultes qu’il n’intégrait pas toujours correctement. Mais, malgré son aversion pour les méthodes du sorcier, Tiass reconnaissait les bienfaits de cette rudesse.
Il savait, à présent, contrôler son énergie, la projeter, et utiliser les sortilèges rudimentaires. Les similitudes entre sa magie et celle d’Antha restaient un mystère pour ses amis, mais il ne s’en souciait guère.
Pendant ces moments là, Kami avait connu, lui aussi une grande frustration. Étrangement, Tiass était imperméable à son pouvoir. Jamais il n’avait pu capter les souvenirs de son apprenti, jamais il n’avait réussi à extraire la moindre information du garçon. Il n’en avait rien dit au jeune russe, mais cela l’inquiétait. Tiass n’était pas encore capable de fermer son esprit, sa protection venait donc d’ailleurs. Pour Kami, l’étrange énergie du jeune homme n’y était sûrement pas étrangère.
Kami et Tiass sortaient d’une cathédrale située en plein cœur de la capitale russe. Le sorcier avait montré à son élève comment se connecter à l’énergie mystique en faisant un parcours bien précis dans un temple religieux. Tiass était encore sous le choc, brillant des énergies du ciel et de la terre qui s’étaient rencontrées en lui, totalement remis de ses récents entraînements. Mais plus que cela, la plupart des cicatrices qu’il avait récoltées tout au long de sa vie avaient disparu.
C’était la récompense pour sa progression fulgurante. Bientôt, il aurait fait le tour des connaissances essentielles. Il pourrait, alors, choisir par lui-même les domaines qu’il souhaiterait approfondir. Lui transmettre ce savoir sur l’énergie des temples sacrés était à la fois un moyen de le féliciter, mais également de lui souhaiter bonne chance.
— Kami, lorsque j’ai pleuré à la galerie Tretiakov, devant le tableau de la mer et celui des tulipes… commença le jeune homme de son fort accent traînant.
— Oui, Syrine m’en a parlé. Le français lissa les beaux cheveux noirs comme le jais de son protégé. Il tremblait entre ses bras.
Il chercha ses mots un instant, bataillant un peu avec la nouvelle langue qu’il avait appris en un temps reccord.
— C’est parce que j’ai fait beaucoup de rêves récemment. Et ces deux tableaux… Ils m’ont rappelés les horribles océans de sang qui ont hantés mes nuits.
Cet automne là, la vie à Moscou était d’une douceur fabuleuse. Chacun profitait de sa propre liberté, en solitaire ou en groupe, pour découvrir la ville et ses secrets. Ils avaient décidé que tout le monde porterait une arme, car trop de menaces planaient sur eux.
Kami portait donc, en permanence, ses deux massues accrochées à sa ceinture et Syrine cachait sa dague à tête d’aigle dans une botte. Anna avait, quant à elle, acheté une quantité phénoménale de petits shurikens. Elle en gardait une vingtaine dans une sacoche en cuir qu’elle avait toujours sur elle, alors que sa sœur avait opté pour un bâton de frappe tout ce qu’il y avait de plus simple. Seul Stefan avait refusé catégoriquement de s’armer. Ainsi, lui et le dernier arrivé dans la caravane restaient le moins de temps possible sans surveillance.
Kami et Tiass arrivèrent à l’hôtel où le groupe logeait. Le jeune garçon partit immédiatement s’enfermer dans ses appartements alors que Kami s’en allait à la rencontre de Syrine. Elle était assise dans le petit salon qui reliait sa suite à celle d’Anna, se brossant doucement les cheveux. Depuis qu’elle était à Moscou, elle reprenait soin d’elle. Des coquetteries qu’elle avait abandonnées depuis son départ de France.
Sa chevelure avait repris des reflets flamboyants, presque aveuglants, et sa manucure était à nouveau impeccable. Le chemisier en soie grise qu’elle portait, un produit local qu’elle avait payé une fortune mais pour lequel elle avait eu un coup de cœur, représentait parfaitement l’image féminine qu’elle retrouvait.
Kami la regarda faire un instant. Son geste était aussi assuré que répétitif. Elle tenait son outil d’une main ferme, dont les ongles étaient peints d’un joli blanc nacré, et à chaque coup de brosse ses cheveux semblaient s’enflammer un peu plus. Le sorcier s’installa sur un siège, face à son amie.
— Tiass est prêt, je crois. Son entraînement s’est passé comme prévu.
— Bien.
— Mais je n’ai toujours pas su utiliser mon pouvoir sur lui. Quelque chose m’empêche de me connecter à son esprit.
— Je sais, Kami. Nous voyageons avec deux personnes, deux sorciers naturels, dont la magie est totalement différente de la nôtre. Antha et lui sont des êtres à part, visiblement. Nous devrons les protéger. » Elle parlait d’un ton monocorde, comme véritablement absorbée par le traitement de ses cheveux.
— Pourquoi ?
Elle haussa les épaules. Aussi intuitive qu’intelligente, elle savait prendre les choses comme elles venaient.
— Qui peut le dire ? Pas moi en tout cas. Mais leur destinée devra se réaliser grâce à nous, je pense. C’est ce que je sens en tout cas.
— Je ne comprends pas. Il s’est pourtant un peu ouvert à moi ce soir. Il m’a parlé d’un rêve. D’un océan de sang. C’est étrange car l’an dernier… »
La jeune femme leva la main pour que son ami se taise. Dans le silence, tendant l’oreille de parts et d’autres, elle entendit son fantôme. La silhouette informe se matérialisa tout près d’elle, chuchotant dans son cou des mots secrets, puis s’évanouit juste quelques secondes après son apparition.
Kami n’avait rien vu. La sorcière se tourna vers lui, les yeux agrandis par la peur.
— Nous devons nous remettre en route, Kami. Les Descendants d’Eren nous ont retrouvés.
***
7 Novembre, 3 ans avant l’Avènement, Lyon, France.
Ogora était installée dans l’Antre des Maudits. Elle prenait garde à ses jambes, fines et galbées, qu’il fallait tenir fermées pour ne pas se dévoiler. Sa jupe était un peu remontée, mais elle ne pouvait pas trouver une position plus confortable. Parfois, ses goûts vestimentaires n’étaient pas toujours les plus pratiques, mais elle avait toujours parfaitement assumé sa féminité.
Les cordes vibraient dans toute la salle. La jeune femme s’étonnait sans cesse de l’ampleur que le son de la harpe pouvait avoir. Un instrument si délicat, ne cessait-elle de penser, et pourtant implacable. Le Domaine Occulte était de moins en moins fréquenté, depuis que Diane avait pris les commandes du complexe. L’aspect commercial ne l’intéressait guère. Elle avait une mission, protéger les magiciens d’Ulome, à laquelle elle se tenait parfaitement depuis des mois.
Ogora était la dernière du Domaine à tenter de sauver l’entreprise de la faillite. Elle organisait régulièrement des soirées à thème, tentatives désespérées pour assurer un autofinancement à l’affaire de Raven. Ce soir là, c’était une réflexion sur le lien entre la magie et la musique. Elle avait réussi à plonger les quelques clients présents dans une profonde transe, grâce à son instrument, et transmettait des images destinées à ouvrir leur perception. La cérémonie était une réussite, bien que l’endroit n’ait jamais été aussi désert lors d’une soirée à thème, et elle cessa de jouer pour inviter les participants à échanger leurs impressions.
Diane surgit alors du labyrinthe, dans son éternelle tenue de combat, et se dirigea vers la musicienne.
— Ne vas-tu cesser ces rituels inutiles ? Tu ne t’entraînes pas autant que les autres. Les Descendants d’Eren pourraient attaquer à n’importe quel moment, nous devons être prêts.
— Diane, ils ne se sont pas montrés depuis longtemps maintenant. Chaque fois qu’ils viennent, ils sont blessés ou tués. Peut-être ont-ils renoncé.
— Ne sois pas stupide Ogora. Ton pouvoir est puissant, mais leur secte a un objectif précis et des ressources presque illimitées. Ils n’abandonneront pas.
La jeune femme s’apprêtait à répondre quand un bruit sourd retentit soudain. Les deux sorcières n’eurent le temps que de faire volte-face pour apercevoir le corps d’un jeune initié tomber au bas des escaliers. Plusieurs Descendants d’Eren descendirent, armés jusqu’aux dents.
Diane fit un saut périlleux et retomba entre les assaillants. Une bulle opaque l’entoura, réduisant en cendres la totalité de ses ennemis. Les clients n’avaient pas eu le temps d’esquisser un geste, l’attaque était déjà terminée.
La sorcière s’approcha à nouveau d’Ogora, les yeux emplis d’une énergie de mort.
— Ils ont peut-être renoncé hein ? Diane gifla la musicienne. « Ce n’est pas la musique qui nous aura sauvés. Je t’ordonne de cesser ces soirées, et de t’appliquer à l’entraînement Ogora.
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