Claria courait sans savoir pourquoi. Elle avait abandonné sa capsule et ses provisions derrière elles. Elle n’entendait toujours pas ce qui se passait autour d’elle. Ses articulations lui faisaient souffrir le martyre. Le général Mallors l’informa qu’elle pourrait se cacher dans une forêt non loin. Ses pieds touchaient à peine le sol tant la missionnaire accélérait pour ne pas être repérée.

À la base spatiale, le docteur Dylia fut surpris d’être appelé si tôt dans la mission. Penché devant des écrans, il analysait avec attention les activités cérébrales de Claria. Des lumières rouges et une sirène annonçaient le danger des inconnus venu rencontrer la jeune femme.

Le général Mallors arriva dans son dos :

- Docteur Dylia, il me faut un diagnostic au plus vite des capacités de Claria.

Celui-ci inscrit quelques mots sur un carnet avant de se tourner, concentrés, vers son général.

- Je dois m’entretenir avec la demoiselle. Les électrodes cérébrales ne sont pas assez précises. Elle a dû subir un traumatisme crânien suite au crash de la capsule. Je ne peux savoir si cela est grave sans lui avoir parlé.

- La situation ne peut pas nous permettre de l’interrompre, s’énerva Mallors. Je vous donne les commandes de la puce pour accéder au message nerveux de ses souvenirs.

Le docteur Dylia sourit de satisfaction. Il s’assit dans un des fauteuils et commença à manipuler précautionneusement. La nanopuce se basait sur une base nouvelle de la médecine. Un neurone parmi tant d’autres, implanter judicieusement dans l’hypothalamus. Cette zone du cerveau avait pour but de trier l’information. La vue, le toucher, le son, tout ce qui anticipe les réflexes, façonne les rêves, les souvenirs. Cette brillante invention était tombée dans le domaine public, il y a quelques années et l'armée n’avaient pas tardé à en faire un prototype fonctionnel. Ce sujet était passionnant pour tout chercheur.

L’activité cérébrale générale s’afficha devant les yeux du docteur. Il se servit des hologrammes pour visualiser le lieu des lésions et commença à les examiner. Rapidement, il se rendit compte que le traumatisme de Claria était plus grave que prévu. Il semblait qu’une partie de ses neurones étaient totalement détériorés. Le général Mallors l’avait prévenue qu’elle avait des souvenirs d’ancienne mission. Le Docteur Dylia commença à trier les informations pour savoir l’état du cerveau de Claria.

Il entendit que la jeune femme avait atteint les arbres.

Celle-ci était essoufflée. Elle s’effondra contre un tronc mort. La voix du général vint de sa tête :

Claria, vous me recevez ? Vous êtes en sécurité. À vous !

…

La missionnaire sentait ses poumons brûler. La souffrance commençait à lui recouvrit le corps. Son bras gauche la paralysait de douleur. Elle articula quelques mots :

- Annulez… la mission…

Un long silence recouvra ses oreilles.

Claria… la mission n’est pas finie. Vous devez l’accomplir jusqu’au bout pour pouvoir remonter à bord de la base. C’était l’accord que nous avons mis en place entre nous.

Des larmes atterrirent sur la terre meuble.

Claria, le docteur Dylia veut essayer des tests avec la puce.

Bientôt, la jeune femme entra dans un demi-sommeil. Des images défilèrent à toute vitesse. Claria fut pris de panique. La voix calme et claire du docteur vint la calmer :

Tout ce qu’il se passe est normal. Je vous active une partie de votre cerveau, dites-moi ce que vous voyez.

Elle prit une inspiration et les images s’arrêtèrent. Elle avait l’impression d’être au beau milieu d’un rêve. Un visage prit forme dans ce brouillard.

- Je vois… mon père.

Il était sec avec elle. Claria voyait ses larges narines et sentait les paroles blessantes la recouvrir.

- Il me crie dessus. Cela arrivait souvent.

Le souvenir s’évanouit d’un coup. La forêt réapparue devant ses yeux épuisés.

Vos souvenirs sont confus. Les communications nerveuses sont… détruites. Je ne peux pas vous promettre que vous les retrouvez sans une nanochirurgie faite par des experts.

- Il n’y a pas de… chirurgien sur cette Gaia ?

La voix rauque du général Mallors prit le dessus :

Cette planète est sauvage. Les individus que vous croiserez sont potentiellement dangereux.