Charybde en Scylla
- Naranwe, descends à l’étage inférieur, dit Sedryn. Tes compagnons ont besoin de se rétablir dans la salle de soins médicaux.
L’àlfar le regarda en n’ayant aucune envie de réagir. Comment pouvait-il obéir à un traître à son propre sang, celui qui s’était détourné de son peuple par amour ? Mais, si son paternel avait ôté la vie de sa maternel, il n’existerait guère. Il ferma les yeux, sentit sa respiration s’accélérer au fur et à mesure que ses pensées devenaient confuses.
- Fait-le immédiatement ! dit Sedryn en percevant son immobilité.
-Tu devrais écouter ton paternel, Naranwe, dit le drow.
Sur ce dernier mot prononcé à haute voix, il ouvrit les yeux puis fut projeté hors du palier. Le mur qui juxtaposait la pièce se détruisit à la suite d’un passage plus imposant, son bras droit agrippé dans un étau. Stupéfait, il leva la tête vers son paternel qui le tenait fermement, eut l’impression qu’il s’affaiblissait par une brusque sensation de malaise.
- Je t’en pris, accroche-toi ! s’exclame Sedryn.
En apercevant les doigts de sa progéniture se détendre et sa main se crisper soudainement, il eut un cri de douleur en voyant son fils tomber dans le vide. Avant que n’advienne la chute brutale, il fit apparaître un portail qui emporta le corps. Soupirant de soulagement, il baissa le regard puis ressentit alors un sentiment de haine l’envahir. De sa main libre, il sortit l’épée de son fourreau, s’élança dans la salle de réception dans un écran de fumée. Il attaqua son ennemi sans vergogne qui ne fut déstabilisé par ce changement de ressentiment. Sa force égalait celle du drow au cours de ce combat qu’il tentait de remporter avec acharnement. Il fut légèrement satisfait lorsqu’il vit l’expression d’une quelconque concentration de la part de Cormrael, son suzerain. Son adversaire durcissait ses coups puis mit soudainement sa lame à l’horizontale, tranchant sa garde en évitant au passage le cimeterre de l’assaillant. Sedryn lâcha son arme inutilisable, la paume de sa main se referma sur la manche d’une nouvelle épée. Voyant la ténacité de l’àlfar, le drow eut un léger sourire. Il fit un pas en avant, sentit le fil d’une lame s’enfoncer brusquement le long de son cou, sa tête se détacher de son corps qui s’écroula au sol. Le regard du seigneur se posa sur le frère de son épouse, ses iris semblable à ceux du compagnon de voyage de Naranwe, qui abaissa son épée sanglante.
- Je ne m’attendais à ce que vous me soustrayez de sa folie vengeresse, dit Sedryn.
- Je ne fais qu’accomplir mon devoir envers Eledwen , ma défunte sœur, dit l’àlfar en remettant l’arme dans son étui. Bien que vous soyez une créature de l’ombre, vous connaissez votre priorité.
- Naranwe est de ce que j’ai de plus précieux en ce monde, dit Sedryn. Je voulais préserver la part de mon épouse présente à l’intérieur de son être. Il est la preuve vivante de mon amour envers votre peuple.
- Notre peuple, dit l’àlfar. Svartàlfheim aura des parcelles de nos terres dans les délais les plus courts afin de pouvoir vivre dignement.
Meneldil s’avança puis lorsqu’il fut aux côtés du seigneur, il s’arrêta et tourna la tête vers lui.
- Vous devrez rejoindre votre fils, dit l’àlfar. Il a besoin de votre compagnie.
À la suite de cet échange, il poursuivit son chemin vers les escaliers de pierre qui menaient à la cour. Sedryn aperçut la fenêtre entre-ouverte par laquelle l’àlfar avait pu se faufiler. Ne voulant faire attendre son fils plus longtemps, il traversa la pièce, franchit le seuil et descendit les marches.
Argos referma sa mâchoire sur ses crocs toujours présents, vit l’hôte de la forteresse entrer dans la salle circulaire de soins médicaux. Il s’approcha de Naranwe qui le regarda, le visage blême par cette commotion qu’il venait de vivre.
- Père, dit Naranwe.
Le jeune dieu l’observa un instant puis ressentit brusquement une douleur lancinante lui parcourir le corps, se contracta en percevant ses muscles augmenter d’épaisseur.
Son ossature se métamorphosant de nouveau, il sentit que ses bras et ses jambes s’élargissaient tandis que ses doigts se transformaient en griffes. Ses iris se teintèrent d’une lueur jaunâtre, d’un bond, il se mit debout puis se tourna. Sa peau était entièrement couvertes de poils, ses oreilles devenaient pointues, son nez était celui d' un museau d'une bête. D’un grognement, il montra ses crocs acérés, son rythme cardiaque s’accéléra. La créature examina son entourage stupéfait d’une haine nouvelle.
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