Où comment Jean-Baptiste de Neuville est devenu capitaine pirate.

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Il n'était plus temps de tergiverser. La vie en dépendait, leur vie à tous. Pourtant Jean-Baptiste de Neuville comprenait l'arduité de la tache à venir. Il ne l'aimait pas, ne la voulait pas. Le jeune second de la Martre Bondissante pondérait. Hésitant encore, cherchant dans ses souvenirs une raison qui lui ferait éviter tout ce qui découlerait d'un tel acte.

Les cris résonnaient encore dans ses pensées. Durant trois jours ils avaient lutté, trois jours trois nuits à lutter conte Neptune, contre Éole, pour ne pas finir chez Davy Jones. Le vent si fort, la tempête s'était calmée aux premières lueurs de l'aube, ne devenant plus qu'un zéphyr. Les voiles des haubans déchirées, pendaient lamentablement au grand mat. L'eau de mer avait tout envahie, éteignant même le feu de la cambuse, les corps éreintés, disloqués étendus sur le pont prouvaient bien que la Martre Bondissante avait failli se transformer en cercueil flottant. Le regard bleu de Jean-Baptiste rencontra le regard hagard de Sans souci, un des timoniers rescapés. Son regard était suppliant, lentement le second passa sur chacun des matelots et tous avaient la même lueur dans l’œil.


Il se redressa, lançant une prière muette au ciel en même temps qu'un soupir. Et pourtant c'est d'un pas décidé qu'il se dirigea vers les quartiers de son capitaine. Quand il poussa la porte, tout était dans la pénombre, seule une lanterne à la lueur vacillante brillait entre les pans d'un rideau de velours rouge. Il y eu un rire flûté, un rire de fille. Jean-Baptiste serra la mâchoire, en faisant connaître sa présence. « Capitaine... » Mais il n’eut aucune réponse, sinon un nouveau rire, gloussement enfantin de farceur.


Lentement il se rapprocha du lit et soulevant un pan des lourds rideaux un remugle capiteux envahi ses narines, une odeur entêtante et lourde. Une odeur de diablerie.

Deux yeux d'un ambre brillant le regardaient amusés. Le visage était pale, le sourire carnassier, une langue rose passa sur des lèvres purpurines et humides. Avec difficulté le second de la Martre Bondissante baissa le regard pour le poser sur le corps avachi de son capitaine. Un sourire jubilatoire ornait son visage, les yeux vitreux, endormi éveillé, béat de plaisir. Ailleurs. Perdu dans un pays fait de songes et de désirs assouvis. Nouveaux gloussements enfantins.


Jean-Baptiste se retrouvait à nouveau devant son dilemme moral. Il avait tant de respect pour Jacques de Monjoie son capitaine et ami. Ils avaient tant de souvenirs communs, de rires ou de douleurs. Tant d'aventures. Et en ce jour, il le regardait perdu et triste. Monjoie, être infatué pour ce démon, cette créature trouvée sur une petite île déserte où ils avaient du faire halte pour des réparations. Et cette chose se dorant au soleil, jouant dans les vagues, sautant des rochers. Monjoie tombant chaque jours un peu plus, Jean-baptiste lui ne voyait que les crocs brillants, que les ongles si longs, que les éclats d'écailles miroitant sous la lune.


« Jacques... réveillez-vous ! Jacques ne me forcez pas... Jacques mon ami.. » Aucune réponse.

« Par la grâce de Sainte Marie reprenez vos esprits ! Jacques vous me forcez la main... je ne veux point être pirate. Ce que je vais devenir après cet acte factieux que vous me forcez à commettre. Jacques je vous en supplie, vous en conjure sur tout ce que j'ai de cher ! » Mais aucune réponse ne lui parvint, lentement il fit sortir son épée du fourreau et la créature feula.


Lorsque Jean-baptiste sorti bien plus tard des quartiers du capitaine, son visage était grave. Un filet de sang coulait sur le pont se delayant dans l'eau de mer. Il provenait de deux têtes décapitées. La créature avait perdu de sa superbe, et ressemblait à celle d'un lézard, l'autre n'était que celle de Jacques de Monjoie, une stupeur à jamais gravé sur ses traits.
« Il a voulu la défendre, et s'est interposé au moment où je portais le premier assaut. » expliqua-t-il à personne en particulier, l'air hagard.

D'un geste il jeta les têtes à la mer. Il était devenu par les faits capitaine, capitaine pirate et l’Océan Septentrional lui ouvrait les bras.

L'aventure en somme.

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