LA BERCE *, AOÛT 2032

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— J'aurais pu marcher jusqu'à la Saint-Glinglin, ou jusqu'à ce que j'en crève. Je ne sais pas combien de pas j'ai fait, mais une après-midi, au loin, j'ai aperçu les tours de la cité de Carcassonne, comme un mirage dans le soleil brûlant. On était au mois d'août. C'est en août que je prends mes congés d'habitude...

Par moments, j'ai l'impression que plus rien ne fonctionnera comme avant et à chaque fois que je pense à ça, une petite voix me dit :

— Mais bien sûr, tu as raison, c'est fini ! Et elle ricane tout bas. Elle se manifeste de temps en temps. Elle m'a dit son nom : « La Rumeur ».

Au début, j'ai pensé : ce coup-là, mon vieux, tu es cuit ! Tu barjotes ! Tu entends des voix ! Non, pas « des » voix, juste une ! Et puis, quelle importance ? Je suis tout seul. Alors, que je parle avec moi même, avec les oiseaux ou avec cette voix dans ma tête, quelle importance ?

Et ce silence, partout ! Tout le temps ! Plus de klaxon ! Pas de gens qui discutent, qui s'engueulent, rient et trinquent ! C'est la mort ! Les villes sont mortes et je déteste la campagne ! La campagne est déserte aussi ! Mais qu'est-ce que je vais devenir ?

Après les confinements et interdictions, conseils et recommandations, on avait retrouvé une vie presque normale. On allait au bureau, au restau, boire un coup en terrasse avec les potes. Merci les vaccins et la poisse à ceux qui étaient contre ! On pouvait retourner au ciné, en concert, la joie !

Moi, j'ai continué à porter le masque quand même, comme d'autres, pour être sûr. Je me suis fait agresser à trois reprises par des inconscients contre, et la dernière fois, ça m'a valu une semaine d'arrêt de travail ! Les deux types ont chopé deux mois fermes et un an de mise à l'épreuve, plus les dommages et intérêts.

Mais avec cette nouvelle épidémie, je ne toucherai pas un centime ! Parce que tout est foutu ! Il n'y a plus de flic, plus de banque et plus de bar ! Il n'y a plus personne pour arroser ça !!!

C'est la fin !

— La Rumeur est de bonne humeur...


( * ÉPIDÉMIE QUI PRIT LE RELAIS DE LA COVID. ELLE FUT VITE SURNOMMÉE LA BERCE, OU LA BERCEUSE, SUIVANT LES GENS. TEXTE ANONYME, NOTE DE PISTOLETA, 2095 )

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