En fin d'après-midi, la petite troupe fut arrêtée par une vigie leur conseillant d'attendre la maîtresse des lieux au pied de la colline où était perché le Repaire. Saphira arriva peu après, pâlie et amaigrie par le deuil, mais superbe. Elle alla droit sur Arris qu'elle avait reconnu et sans mettre pied à terre, le salua d'un sourire éblouissant.

— Sois le bienvenu, Arris ! Mes gens vont soigner vos chevaux. Tes hommes peuvent aller manger et dormir avec les miens. Mais toi, viens !

Elle lui tendit la main, l'invitant à monter derrière elle. Il obéit, car c'était bien un ordre, en réprimant un frisson de désir qui n'échappa pas à la dominante qu'elle était te passa un bras autour de sa taille avec appétit. Posant la main sur son ventre musclé, il inspira le parfum dans son cou, puis barricada ses pensées qui avaient pris une tournure brûlante. On ne pouvait jamais être certain que personne "n'écoutait". Elle apprécia la fermeté de ses jambes le long des siennes, l'énergie de son maintien puis elle talonna sa monture.

Ils montèrent la côte au petit galop et pénétrèrent dans le Repaire sous les applaudissements des gens de Saphira. Après un tour de parade, elle arrêta le cheval, passa une jambe par dessus l'encolure et se laissa glisser au sol en souplesse, dédaignant l'aide du responsable des écuries. Saphira n'avait besoin de personne ! Arris mit pied à terre et se laissa entraîner dans un escalier taillé à même la roche, éclairé par des cristaux fixés aux parois à intervalles réguliers.

Arris suivait le balancement régulier des hanches de la femme. Son cœur s'emballa. Saphira savourait son pouvoir à chaque pas, mais il se reprit et laissa une paire de marches de plus entre elle et lui. Habitude de survie, son esprit en avait compté une centaine et noté deux paliers surveillés d'où partaient des couloirs sombres. Cependant son instinct ne lui signalait aucun danger. Les seuls prédateurs, en ces lieux, c'étaient eux.

Au bas de l'escalier, deux hommes encadraient une porte ornée d'une sculpture représentant un humain pris dans les anneaux d'un serpent. . Aux gardes qui la saluait et proposant leurs services, elle ordonna qu'on ne la dérange sous aucun prétexte. Elle entra et invita d'un geste Arris à passer le seuil.

Dès qu'il fut à l'intérieur, elle referma les battants d'un mouvement brusque et le plaqua contre le bois, le regard étincelant. Il sentit sa lame contre son ventre, juste au-dessus du tatouage lui dessinant comme une ceinture finement ciselée, mais il en aurait fallut un peu plus pour l'impressionner et il l'enlaça brutalement. Leurs lèvres brûlantes s'affrontèrent. La lame entailla la peau à travers la chemise. Quand il relâcha son étreinte, elle l'attira vers le lit grand comme un navire et le précipita sur les peaux d'ours.

Il sourit à la vigueur de son assaut, la laissant chevaucher son corps de lutteur. Il savoura le piquant de la légère blessure qu'elle lui avait infligé comme un hydromel précieux. D'un mouvement souple et puissant, il roula sur le côté, l'entraînant en un délicieux combat. La confrontation fut sauvage.
Quand ils retrouvèrent, ce qu'il leur sembla une éternité plus tard, un calme relatif, Saphira le conduisit, par une porte dérobée, à une salle plus petite, au centre de laquelle, il découvrit un bassin alimenté par une source d'eau chaude. Ils s'y plongèrent avec délice. Elle détailla, sans gêne aucune, son invité, appréciant sa vigueur, les traces laissées sur son corps par sa vie aventureuse et les dessins qui y étaient gravés.

Arris soupira de bien-être. Après ces jours de chevauchée, l'eau froide des ruisseaux de montagne et les campements plus que rustiques, il appréciait ce confort inattendu, laissant ses muscles raidis par la fatigue se détendre peu à peu. À cinquante ans passés, il se trouvait enfin face à sa propre réalité. Elle lui offrait ce qu'il avait espéré tant d'années. Il venait de trouver son diamant brut.

— Garde tes pensées pour toi, grinça La Rumeur.