CONTRASTE
Arkan était bouleversé. Il mangea lentement, indifférent à la saveur et aux bienfaits des aliments. Cette rencontre lui avait fait un choc d'une intensité qui le laissait pantois. Son corps tremblait et son cœur flambait, glace et braise...
Lui qui avait connu charnellement bien des femmes, se trouvait en proie à quelque chose de terriblement plus puissant qui le secouait jusqu'au plus secret de son être. L'assaut de la passion balaya ses remparts et le laissa l'âme nue face à l'éternité...
La jeune femme sentait sa vie se réchauffer à travers sa coquille d'escargot si fragile et craintif. Elles gardèrent le silence un long moment puis Adesha reprit :
— Tu me sembles bien curieuse !
— Adesha, c'est très étrange, mais je l'ai déjà vu... en rêve.
— Il avait l'air de te connaître aussi. Il a abandonné ses amis d'un coup pour venir te parler. Et il t'a appelée Sorcière...
— On ne s'est jamais rencontrés auparavant
— Sauf en rêve, ma petite.
Iléa se tut, le regard perdu dans les braises. Ses doigts tremblants suivant les cicatrices de son visage. Elle inspira profondément pour stopper la montée des émotions et murmura :
— C'était un rêve triste. Cet homme était presque sans vie et couvert de sang.
— Quoi qu'il en soit, crois-moi, tu viens de lui foudroyer le cœur.
— J'ai peur.
Il y avait tellement de détresse dans sa voix qu'Adesha la serra dans ses bras et la berça tendrement. Iléa pleura longtemps, de lourdes larmes silencieuses de colère et de désespoir, trop longtemps retenues. Elle pleura ses parents, Crin de Feu, Zéline et tant d'autres. Elle pleura son corps ravagé qu'elle ne reconnaissait plus.
— Adesha, tous ceux que j'aime meurent autour de moi, j'ai tellement peur.
— J'ai subi ça de nombreuses fois, depuis si longtemps que je vis. Je sais ce que tu ressens, mais il faut garder espoir.
— Ou mourir de suite...
— Tu n'as pas le droit de dire ça, on a tous besoin de toi...
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