Epilogue
Deux ans plus tard.
Les accords grandiloquents de l'orgue résonnaient triomphalement. Tous étaient venus -ou presque- pour assister à ce jour de fête. Un mariage ! C'était le mot qui se répecrcutait dans toutes les têtes.
La cérémonie commença sous les regards admiratifs des invités habillés en robes et en costars. On fixait les mariés, on commentait, on critiquait... Personne n'était indifférent face à la force de leur amour.
Alexis et Ethan se tenaient timidement la main. Ils s'échangeaient des œillades qu'ils étaient les seuls à comprendre, des mots silencieux en l'honneur de ce jour si spécial.
- Mesdames et Messieurs, nous sommes aujourd'hui réunis pour célébrer l'union entre...
BIIIIP. La bande son du film fut coupée brièvement et remplacée par la voix grave du médecin :
- Ginette et Monsieur Boloni.
La voix du prêtre reprit. L'infirmière soupira, tandis qu'Alexis tentait de réprimer un fou rire, qu'Ethan se demandait ce qu'il faisait là et que le médecin ne savait plus où se mettre. Le vieux fou et son écharpe étaient au centre du petit groupe, se regardant passionnément. Lorsque le moment d'échanger les voeux arriva, tous les "invités" se tournèrent vers l'infirmière afin qu'elle remplace la voix manquante de Ginette. Alexis n'en pouvait plus : il se retenait tellement de rire qu'il en avait mal au ventre. Quelqu'un intervint soudain :
- Où sont les alliances ?
L'infirmière, un peu gênée, s'avança vers les jeunes mariés, noua au doigt de Monsieur Boloni un ruban doré et lui tendit le rouleau avec révérence. Le vieil homme s'en empara avec empressement, et noua au bout de l'écharpe le même bout de tissu étincelant.
D'une voix de stentor, le médecin prononça :
- Monsieur Boloni, consentez-vous à prendre pour épouse... Ginette ?
Incapable de prononcer un seul mot à cause de l'émotion qui le laissait tout larmoyant, Monsieur Boloni acquiesça vigoureusement.
- Ginette, consentez-vous à prendre pour époux Monsieur Boloni ?
L'infirmière, aussi rouge qu'une tulipe, balbutia un "oui" timide.
- Que ces anneaux fassent que vous viviez ensemble dans la paix, la...
Alexis n'écoutait déjà plus, la litanie du médecin n'était plus qu'un mince filet de voix. Monsieur Boloni n'avait plus beaucoup de temps devant lui, mais il semblait pourtant si heureux !
Alors que le vieillard embrassait passionnément son écharpe, le jeune homme ne put s'empêcher de verser une larme. Il avait mis tant de temps à laisser partir Adrien, tant de temps à se faire une raison après l'avoir perdu... Il s'était accroché à la vie comme un fou pour ne pas perdre pied, et s'était réfugié dans le travail comme si... Parce que sa vie en dépendait. La douleur l'avait dévoré jour et nuit, l'avait fait pleurer de longues heures sur une épaule. Celle d'Ethan, dont il s'était progressivement rapproché et qui, aujourd'hui, avait pris place à ses côtés comme un petit ami, non pas qui remplacerait celui qu'il avait perdu, mais avec qui il se tournait vers l'avenir.
Il pensait avoir enfin laissé toute la douleur du deuil derrière lui. Pourtant, un pincement au coeur l'étreignait. Ce moment, il aurait tant voulu le vivre avec Adrien : tenir sa main tachée d'encre et rire avec lui.
Au milieu de la chambre d'hôpital, Monsieur Boloni, lui, riait de tout son coeur. Même si sa femme n'était plus là, elle vivait dans cette écharpe, et rien ni personne ne pourrait éteindre la passion qui les unissait encore.
Ceux qui sont partis le sont pour toujours. Mais ce sont ceux qui restent qui les font vivre à nouveau, en continuant leur chemin avec assez de rêves pour deux. Alexis sourit doucement. Il n'oublierait jamais Adrien, et c'était pour lui qu'il allait croquer la vie à pleines dents.
- Merci, murmura-t-il à l'homme qui était la preuve vivante que sagesse et folie étaient des synonymes.
FIN
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