Un chien, un livre, une rapière, et moi
Il était une fois un jeune adonis, qui s'adonnait à égrainer ses vers de bon aloi.
Néanmoins une montagne de tracas s'abattit sur lui sous la forme d'un moins que rien, un fin chihuahua. Ce damné chien qui se prétendait seigneur le sortit de sa torpeur, et japant de toute ses forces, exiga du bel infortuné , une nouvelle, et pas n'importe laquelle, une fiction qui respectait ses conditions.
Le pauvre héros céda, pour se débarasser de cet admirable cabot. Il prit le parti d'aller quérir un livre en ville, pour allègrement piller ce roman et expédier l'affaire, car c'était la manière de faire de ce fainéant animal, il préférait les termes efficace et optimal.
- "Allons acheter ce bouquin et pillons-le tel un sagouin" dit notre bel héros, puis il prit sa fidèle rapière et son masque à lanière car les rues n'étaient pas sûres et la France avait peur.
En chemin, il croisa son ami Jean, qui décida d'être le compagnon de ses malheurs. Le juvénile Adonis maugréait, ressassait ses pensées :
- "Par Saint-Firmin, ce que je déteste les chiens, Par la barbe de Raoul, leurs aboiements me saoulent ! D'autant plus que ces bêtes sont féroces, nulle surprise si les militaires convoitaient leur forces, Épirotes en tête "
C'est alors que d'une poubelle de l'abribus, devant les deux amis à l'air ahuri, surgit Pyrrhus d'Epire, le roi des Molosses, entourés de ses chiens de combat.
- "Je te l'avais dit " fit notre héros d'un ton blasé .
- "Inclinez vous, pauvres mortel, car je suis l' Aigle, le fils de jupiter, le premier capitaine de cette terre" s'exclama le sympa Pyrrhus.
- "Tu parles Charles"
- "Non moi c'est Pyrrhus" le coupa Pyrrhus
"C'est l'heure de ton trépas Pyrrhus ! Je n'ai que faire de ton pieux laius. Tu te prétends Bonaparte mais les femmes de Sparte te défirent, et les éléphants du roi d'Épire furent impuissants face à cette brique fatale, lancée par une terrible grand mère d'Argos. Ta mort restera dans les annales : Le grand Pyrrhus, craint de ses ennemis, tué par une mamie ! "
- "Assez ! Misérables ! Cela suffit ! Je vous mets au défi de me vaincre , car je dois bien venger cet affront et rétablir mon honneur, et dire que j'étais venu en tant que simple promeneur"
- "Soit, disputons une partie d'échec pour voir qui est le meilleur stratège, à moins que vous ne souhaitiez tâter de ma rapière ?"
- "Cela me convient , faites vos prières"
La partie débuta alors, un bras de fer mental, chacun avait un grand mal à lire les mouvements de son adversaire, et la partie redoublait d'ardeur quand notre héros s'écria d'un air hâbleur :
- "Grand-Roque Tour d'Ether et roi de fer !"
- "Fourchette Cavalier D5 Fou E6 , éperviez sortez, balayette !"
- "Excusez moi de vous interrompre, mais savez vous au moins jouer aux échecs ? " demanda Jean
Les deux duellistes l'ignorèrent et reprirent de plus belle :
- "Tu es fini Yu-Gi ! Je sacrifie ma reine de pique pour invoquer et poser Exodia le Maudit face cachée en mode attaque sur le terrain ! "
- "Pauvre fou, tu viens de déclencher ma carte piège, Docteur Boom, qui invoque un porte avion et le pouilleux, Je combine avec Sylvanas et mon dragon aux yeux bleux suffit amplement à terrasser tes points de vies, tu es mort, Échec et mat"
- "Quand êtes vous passé à un jeu de carte ?" soupira Jean
- "Non malédiction! Comment ai je pu perdre face à deux avortons pareil, j'avais pourtant la bénédiction d'Akhénaton ! "
- "Tu sais vaincre, Pyrrhus, mais tu ne sais pas utiliser ta victoire"
Sur ces sages paroles, notre héros renversa le plateau, saisit sa rapière en un éclair et poignarda le roi.
- "Que fait-on de ces hordes de chiens à présent ?" s'interrogea Jean
- "Prevenons la SPA je suppose, mais pressons, j'ai hâte d'en finir avec toute cette histoire, car je pressens que nous ne sommes pas au bout de nos ennuis "
Les deux compagnons continuèrent de tracer monts et vallées, lorsque, soudain, une nuée les enveloppa. Conservant son calme olympien, notre héros au nez aquilin brandit sa fidèle rapière et frappa avec sa lame la fumée lactée. Un cri plaintif s'éleva alors, le brouillard se dissipa, le sphinx apparut :
- "Doux Jésus, que signifie ces coups de massue" dit la femme au corps de lion et aux ailes de pigeon.
- "Je te l'avais dit, encore une empêcheuse de tourner en rond" pesta notre héros jovial.
- "Pour réparer cette faute, répondez à mes trois énigmes !"
- "Encore une maniaque des jeux, à tout hasard, que se passe t-il si l'on se trompe ?"
- "Vous serez foudroyés sur place"
- "Mais, au fait, pourquoi devrai-je te croire ? Si tu es vraiment ce que tu prétends être, réponds à mon énigme. Attention, elle est complexe, je te conseille d'être bien à l'écoute : Qu'est ce qui est petit et marron ?"
- "Un marron ?"
- "Diable elle est forte cette femme chat ! "
Le sphinx et Jean jetèrent un regard de mépris sur le beau malappris. Ce dernier demanda au héros s'il pouvait répondre aux questions à sa place mais celui-ci était sûr de lui, il s'avança avec assurance vers le monstre qui s'exclama :
- "Revenons à nos moutons, première question : quel... est ton nom ? "
- "Mon nom est personne."
- "Quelle... est ta quête ?"
- "Chercher le Saint Graal"
- "C'est le nom du livre que nous cherchons" précisa Jean
- "Quel... est l'effet d'un changement de la constante de Planck par un facteur d'un milliard sur le découpage d'une pastèque?"
- "Que veux tu dire ? Un melon charentais ou un melon espagnol ?"
- "Plait-il ? Je ne sais pas...Ahh!" un éclair emporta la mystique panthère.
- "Je te l'avais dit" se délecta notre héros d'un air délicat.
Mais nos deux compères n'eurent pas le temps de savourer leur succès.
- "Il faudrait penser à conclure" entendit-on au loin.
- "Plait-il ? Serait-ce le jury de mes concours ? Non merci, les examens et les oraux j'ai déjà donné, il ya déjà des années!
- "Non, je suis l'intrigue" repondit la mystérieuse voix.
- "Ah d'accord...Mais attendez, n'était-ce pas un narrateur qui contait depuis le début ? "
- " Tic tac... le temps s’ecoule...vous serez bientôt réduit au silence, faute de mots"
- "Euh...Je conclus mon aventure au plus vite! Ciel, hâtons nous vers le rayon littérature !"
Personne et Jean vendirent donc leur rapière pour quelques deniers puis se précipitèrent dans une librairie, fouinèrent dans les allées, trouvèrent le Saint Graal et s'apprêtaient à régler à la caisse. Cependant, notre héros eût alors une épiphanie : le coeur , l'essentiel d'une aventure, ce n'est pas tant la destination que les pérégrinations. Il s'exclama alors, haut et fort :
- "L’important ce n’est pas le chalutier mais l’albatros "
Satisfait de cette conclusion, il allait rentrer chez lui, conter son histoire puis fermer boutique.
Mais un bruit strident vint interrompre ces pieuses résolutions.
Le gérant fermait la sienne, durant les vacances d'été. Un mois plus tard, à la fin des congés, il vint secourir nos deux éprouvés, qui pour survivre avaient dû dévorer ses livres.
Et c’est ainsi que l’auteur finit son histoire.
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