Chapitre 3
PDV Rébecca Devalois
Putain de merde ! C'est quoi ce merdier ? Il est au courant ? Je pensais que j'étais la seule à savoir !
Mark me laissa entrer, une discussion s'imposait. Comme l'extérieur, l'intérieur de la maison était absolument sublime, un mariage divin entre style ancien et industriel. Je m'asseyais sur l'une des chaises en bois de l'îlot en chêne au centre de la cuisine. Il me tendit un verre d'eau et s'adossa contre l'îlot en croisant les bras, faisant ressortir les muscles de ces bras.
« Tu sais Rébecca, pas mal de choses ont changé depuis que tu es partie ! me confia-t-il.
— Je vois ça ! Ça fait combien de temps que tu es au courant pour moi ?
— Ça va faire trois ans ! Mon père me l'a révélé peu de temps avant de mourir !
— Ton père est mort ? Je veux dire notre père ! rectifiais-je plus pour moi que pour lui, toujours pas habitué que le père qui m'avait élevé n'était pas mon père biologique.
— Un cancer !
— Je suis désolée ! Disons que c'est cinq dernières années, j'ai été comme qui dirait un peu coupé du monde ! lui expliquais-je.
— Ton frère m'en a parlé ! Je ne sais pas tout en détail mais j'en sais assez pour être content de te retrouver ! me déclara-t-il d'une voix empreinte d'une certaine émotion.
— Bon ! On change de sujet ? Sinon je crois bien qu'on va devoir sortir les mouchoirs ! plaisantais-je un peu ému, chassant les mauvais souvenirs qui essayés de refaire surface. Alors ? Comment tu as fait pour conquérir le cœur de ma sœur ?
— Je me suis battu ! Au sens propre ! me raconta-t-il. Tu sais, elle est devenue un brillant médecin ! C'est elle qui s'est occupée du cancer de mon père et c'est elle qui m'a annoncé son décès ! J'ai été complètement anéanti, j'ai fait une grosse dépression ! Un soir, je suis allé dans un bar, Nat y était aussi ! À la fin de la soirée, elle a rembarré un mec qui l'a draguée ! Il est revenu à la charge, alors je me suis interposé mais le gars s'est énervé et c'est parti en vrille ! Les flics ont dû intervenir ! Elle m'a emmené à l'hôpital et même si ta sœur ne travaillait pas ce soir-là, elle m'a soigné ! J'ai fini avec une main blessée, le nez cassé, un sacré cocard et trois points de suture à l'arcade ! Tout le long où elle s'est occupée de moi, elle n'a pas dit un mot ! Elle m'en voulait d'être intervenu et si je n'avais pas été si amoché, je crois bien qu'elle m'aurait giflé, mais à la place, elle m'a traité d'idiot et m'a raccompagné chez moi ! Le lendemain je suis allé la retrouver à l'hôpital avec un bouquet de fleurs pour m'excuser et depuis on ne s'est plus quittés ! Ça va faire deux mois qu'elle a accepté d'être ma fiancée ! Comme tu peux le voir, je suis l'homme le plus heureux au monde ! »
Son sourire béat me le prouvait. Je ne l'avais jamais vu aussi heureux, même lorsqu'on était au lycée et qu'il avait toutes les filles à ces pieds. Je le félicitais et lui souhaitais mes meilleurs vœux. Accrochée sur le mur en face de moi, une horloge de style industriel indiquait 19h02. Je me rappelais soudainement l'invitation de Danny, c'était ce soir. Je me levais de la chaise et m'excusais auprès de Mark.
« Je suis désolée, il faut que j'y aille !
— Tu ne voulais pas parler à Nathalie ? Elle ne devrait plus tarder ! essaya-t-il de me retenir.
— Ce n'est pas grave, je la verrai une autre fois ! Et puis, je crois que je ne suis pas encore prête ! lui confiais-je. »
Il m'étreignit dans ses bras. Je pris le reste de mes affaires et Mark me raccompagna à la porte.
« Tu sais que repousser l'échéance n'arrangera rien entre vous ! me dit-il.
— Ouais, je sais ! lui avouais-je piteusement. »
Alors que nous étions encore dans le salon, le claquement de la porte d'entrée se fit entendre. Apparemment, le destin a choisi de faire tomber le verdict ce soir. Le stress monta en flèche instantanément.
« Chéri, je suis rentrée ! Je nous ai pris thaï pour ce soir ! lui annonça-t-elle déboulant dans la pièce où nous nous trouvions. »
Lorsqu'elle me vit, elle s'arrêta brusquement à l'entrée du salon, lâchant le sac provenant du restaurant thaï. Le temps semblait s'être arrêté pendant une fraction de seconde durant laquelle on se regardait en chiens de faïence. Elle se tenait là, devant moi, les cheveux un peu défaits par le vent d'automne et les traits tirés certainement dû à une garde très éprouvante à l'hôpital. Durant près d'une minute, personne n'avait ni fait, ni dit quoi que ce soit de peur que quelque chose d'irréparable ne se produise. Toutefois, il fallait faire évoluer la situation. Je décidais de briser la glace.
« Nathalie, j... commençais-je. »
Cela eut certainement l'effet d'un déclic pour Nathalie. Elle se mit subitement à avancer vers moi. Son visage inexpressif ne me permettait pas de savoir ou d'entr'apercevoir ce qu'elle prévoyait de faire. Sans que je m'y attende, elle me gifla puis la seconde d'après je me retrouvais blottie dans ses bras. Elle me confia qu'elle était vraiment contente de me revoir et que je lui avais énormément manquée. Elle précisa néanmoins qu'elle m'en voulait de ne pas être revenue plus souvent. J'avais redouté ce moment pendant tellement longtemps et il s'était finalement bien passé. J'étais soulagée. Je savais que notre relation prendrait du temps avant de revenir à ce qu'elle était avant que je ne parte, mais c'était déjà un bon début. Toutefois, le temps des révélations était arrivé. Je jetais un regard à Mark qui comprit instantanément et acquiesça, m'encourageant à parler à ma petite sœur.
« Qu'est-ce qui se passe ? s'enquit Nathalie apercevant nos regards.
— Je vais vous laisser entre vous ! nous dit Mark en ramassant le sac de nourriture resté sur le sol. »
Je le remerciais du regard.
« Nat, je te dois des explications sur mon départ !
— Quelles explications ? Tu as dit que tu voulais faire comme papa, servir ton pays ! Tu n'es pas partie pour cette raison ? me questionna-t-elle.
— Si, mais ce n'est pas tout à fait pour ça que je me suis engagée ! C'est vrai que ça faisait longtemps que j'y pensais ! Mais si je suis partie aussi rapidement c'est pour autre raison ! lui avouais-je cherchant les mots adéquats.
— Quelle autre raison ?
— Si je suis partie c'est à cause de maman ! Je lui en voulais de m'avoir caché la vérité sur mon vrai père !
— Attends deux minutes ! Ton vrai père ?
— Oui ! Thomas n'est pas mon père biologique !
— Maman t'a dit qui s'était ? chercha-t-elle à savoir.
— C'est Andrew ! lui révélais-je pile au moment où Mark fit son apparition dans la cuisine un verre de scotch à la main.
— Andrew ? répéta-t-elle ne voyant pas de qui je parlais. Andrew qui ?
— Mon père ! annonça Mark naturellement avant de boire une nouvelle gorgée de son verre. »
Nathalie était abasourdie par cette révélation. Elle accusa son fiancé d'être au courant et de ne pas lui avoir dit. Elle ne devait pas lui en vouloir, ce n'était pas à lui de le faire. D'ailleurs, ça n'aurait pas dû être à moi non plus mais plutôt à notre mère. Je ne sais pas si un jour j'arriverais à lui pardonner de m'avoir menti durant tout ce temps, mais aujourd'hui, lui en vouloir risquer d'être compliqué étant donné qu'elle était atteinte de la maladie d'Alzheimer. Je ne savais pas exactement à quel stade elle en était. Je ne devais pas trop attendre pour la voir. Je voulais me défaire le plus rapidement possible de cette haine que j'éprouvais. Psychologiquement, c'en était devenu un besoin.
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