L'émergence d'une sensibilité palestinienne dans le monde anglo-saxon ?

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Au Royaume-Uni, USA, les divisions germent sur le génocide à Gaza. Le Labour est tiraillé de sa gauche corbyniste à sa droite déchirée. L'Écosse, l'Irlande du Nord sont face à l'Angleterre. L'aile gauche du Parti démocrate presse l'establishment fissuré d'agir.

Fidèle à une tradition de soutien presque inconditionnel à Israël, il est rare que le monde anglo-saxon soit si déchiré par une considération des Palestiniens, même insuffisante et tardive. Des USA au Royaume-Uni, de l'Irlande du Nord à l'Écosse, du Labour au Parti démocrate.

Une des exceptions notables demeure l'Irlande du Nord au Royaume-Uni. Au regard de son Histoire de luttes indépendantistes, parfois violemment réprimées,ce peuple a toujours eu cet attrait vers une solidarité des Palestiniens, confrontés à un colonialisme sans fin d'Israël. La dirigeante O'Neill de Sinn Fein, 1ère force parlementaire du pays, déclare : "Israël viole le droit international avec des 8punitions collectives, la confiscation de terres, un régime d'apartheid et nie le droit légitime du peuple palestinien à l'autodétermination".

Une autre exception semble aussi l'Écosse, avec son Histoire de combat indépendantiste. De plus, le Premier ministre Humza Yousaf a sa belle-famille en danger de mort à Gaza. Il porte ainsi les 8positions décoloniales historiques du Parti national écossais.

Au Pays de Galles, le Premier ministre Mark Drakeford sait qu'il joue son avenir politique. Celui qui fut un des soutiens de Corbyn, prend toutes les positions. La pression monte par une lettre des puissantes orgas du territoire : Urdd Gobaith Cymru, Congrès des syndicats... Ainsi, le 8 novembre 2023, le Parlement du pays de Galles a bien adopté l'appel à un cessez-le-feu immédiat. Les ministres du gouv de Drakeford se sont abstenus. Des membres du Parti travailliste divisé ont finalement voté la motion du parti d'opposition Plaid Cymru.

Le Royaume-Uni paraît en somme bien peu soudé. L'Angleterre est semble-t-il le seul véritable soutien sans faille d'Israël. Néanmoins, à la Chambre des communes, les Écossais et les Irlandais pèsent si peu, le Parlement est donc dominé par le Parti conservateur et le Labour. Le gouvernement du Royaume-Uni a toujours été frileux à reconnaître l'existence de la Palestine, une existence bien reconnue en droit international (résolution 2334 d'ONU de 2016). En 2012, sur un statut de membre observateur de l'ONU de la Palestine, ce sera une abstention.

À noter que la police londonienne se refuse à réprimer les manifs pour la Palestine, à la hauteur de ce que la sulfureuse ministre de l'Intérieur Suella Braverman exige. Ses débordements lui ont coûté son poste. L'arrivée de David Cameron ne change pas la position du gouernement.

En dépit de cette frilosité, de l'opposition même, le 14 octobre 2014, le Parlement du Royaume-Uni adopte une motion (vote non contraignant) demandant au gouvernement la reconnaissance de l'existence de la Palestine, par 274 voix vs 12. Opposition forte au Parti travailliste.

2023 a refait surgir la gauche du Labour, Corbyn. Son soutien à la Palestine lui avait valu une destruction, sur fond d'accusations d'antisémitisme, peu importe le soutien de groupes juifs de gauche, son parcours de lutte contre l'antisémitisme jamais remis en cause avant. Or, la gauche du Labour est devenue faible. C'est la division de la droite du parti qui fracture la ligne de Starmer, héritier de Blair, ami néolibéral des guerres USA. Sa ligne est un soutien inconditionnel à Israël, et une nette indifférence pour la mort des Palestiniens.

Le Parti national écossais a proposé de voter au Parlement britannique un "cessez-le-feu immédiat" en Palestine. Les fragmentations ont explosé au grand jour au Labour. 56 députés travaillistes sur 198, près de 30%, ont osé rompre la ligne Starmer et voté l'amendement. Ce n'est pas la gauche du Labour, la droite du parti s'affronte, le camp de Starmer, ceux qui ont participé à l'anéantissement de Corbyn et la gauche. 8 membres du « shadow cabinet » de Starmer (gouv d'opposition) ont été destitués pour cette position de cessez-le-feu.

Ce bouleversement se produit au Parti démocrate aux USA. Sans surprise, les plus progressistes Rachid Tlaib et Cory Bush, plutôt proches des Socialistes démocrates d'Amérique, dénoncent le colonialisme israélien et appellent à un cessez-le-feu immédiat. La répression rôde au Congrès toutefois pour la moindre déclaration. Néanmoins, le sénateur Bernie Sander et sa fidéle soutien Alexandria Ocasio-Cortez sont plus distants, au regard des liens tissés avec l'administration Biden ces derniéres années, les ayant déjà conduit à vanter des politiques internes discutables, notamment en matière d'immigration.

L'establishment du Parti démocrate, incarné par Biden, a des racines historiques de soutien sans limite à Israël, et d'une considération négligeable pour la reconnaissance même de l'existence de la Palestine. Les Accords d'Olso de 93 en son sein n'ont guère changé cela. Or, des hauts fonctionnaires, diplomates de la présidence Biden commencent à alerter Biden sur les graves conséquences de son appui infini à Israël. Le Parti démocrate tient (tenant les débuts de critique du parti à l'œil), il ne devrait pas y avoir un changement profond. Le Parti démocrate ne peut pas occulter une dimension électorale. La jeunesse des USA n'a jamais été aussi sensible à la cause palestinienne. En outre, l'électorat afro-américain aussi. Ce soutien imprègne toute l'intelligentsia afro-américaine, de la gauche aux néolibéraux.

Petit rappel historique, la résistance palestinienne a eu des liens considérables auprès des grands groupes antiracistes, décoloniaux des USA, comme les Black Panthers ou des penseurs (Angela Davis). La population afro-américaine est fortement imprégnée de cette Histoire. Dès lors, des figures de l'intelligentsia néolibérale de l'ère Obama, comme le journaliste Ta-Nehisi Coates, ont fait des discours poignants de sensibilisation à la souffrance palestinienne, à l'image de la position historique de l'universitaire très respecté Cornel West.

Il est à craindre que tout cela bouleverse peut-être dans un temps long les rapports de force, guère à l'instant. En effet, Israël déploie des trésors de communication aux effets certains, notamment pour faire visionner le tragique massacre ayant eu lieu le 7 octobre 2023. Toutefois, du côté palestinien, cela fait des décennies qu'une anesthésie générale est de mise sur cette souffrance. Les journalistes internationaux ne peuvent même pas entrer à Gaza, le Tsahal l'interdit. Pas d'images, pas de témoignages, pas de récits, juste des chiffres. Qui ne tremblerait pas devant les vidéos, les visites faites par Israël sur le massacre du 7 octobre ? Qui ne tremblerait pas face aux massacres de près de milliers de gazaouis, de milliers d'enfants, au cœur d'une prison à ciel ouvert et d'un apartheid vécu au quotidien ?

Les fixeurs, ce qui constitue une manière méprisante en France pour dire des journalistes Palestiniens (ce que les journalistes Israéliens n'ont pas comme dénominations d'ailleurs), meurent tous les jours, tel Roshdi Sarraj. Avec eux, leurs articles, photos, regards meurent.

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