Chapitre 15
Chapitre 15
La volonté de bien faire pouvait être une garce, une compagne terriblement exigeante et jamais pleinement satisfaite. Il y avait longtemps maintenant que Yu en avait conscience, mais s’il parvenait à s’imposer ses objectifs et à se dépasser sans en souffrir moralement, ce n’était pas le cas de tout le monde. Les prétendants étaient généralement pleins d’espoirs et les moments de véritables tristesses n’étaient pas si commun, mais dans un endroit tel que la laiterie, les choses étaient moins évidentes. Ces personnes avaient toutes été des prétendants et prétendantes, rêvant d’un ailleurs auprès d’un mâle de valeur. Certains avaient rêvé d’avoir des enfants, d’autres de voyager, mais tous avaient été déçu au bout du compte, ne parvenant même pas à recevoir un nom.
Il fallait donc se fixer de nouveau objectif et passer sur l’amertume première. Yu était de ceux qui ne se laissaient pas abattre. Il y arriverait, une part de lui n’abandonnerait jamais quelques soit les déceptions et échecs. Malheureusement, ce n’était pas le cas de tout le monde et à l’abri, dans le dortoir, certains se laissaient aller à des sentiments bien sombres. Cela faisait plusieurs dizaines de jours à présent qu’il était là, et une jeune Oom le touchait tout particulièrement. Elle aurait pu être mignonne avait ses fossettes, son petit nez pointu ou ses jolis yeux verts. Elle aurait pu être charmante avec sa voix douce et l’attention qu’elle savait porter au détail. Elle aurait même pu devenir passionnante si elle avait osé s’exprimer un peu plus. Mais le soir, alors que la majorité d’entre eux s’endormait, elle pleurait. Les cernes se faisaient de plus en plus marquées sous ses yeux et son teint prenait la couleur de la maladie. Presque instinctivement, sans que personne ne le décide vraiment, un vide s’était créé autour d’elle. On la fuyait.
C’était exactement pour ce genre de choses que Yu avait toujours eu envie de grimper jusqu’aux côtés de l’Akoutie. Il ne voulait pas juste de lui et de sa compagnie, il voulait également changer les choses. Cette petite n’avait plus de lait depuis longtemps maintenant. Elle s’était tarie et son ventre rond n’y changeait rien. Son corps refusait d’en produire plus que quelques petites gouttes d’une piètre qualité. Après avoir su encaisser son échec, après vu ses grands rêves se briser, son corps refusait de suivre la cadence et de satisfaire les demandes. Elle échouait, encore une fois et cette idée plus que tout autre chose la catastrophait.
S’il avait pu décider pour elle, il l’aurait sortie de la laiterie pendant au moins quelques semaines en lui demandant de faire autre chose. Quelque chose qui la mettrait en réussite. Seulement il n’avait aucun pouvoir sur ce qu’elle ferait, tout ce qu’il pouvait choisir c’était son propre comportement, alors il s’installa tout contre elle et lui demanda avec toute la tranquillité du monde :
- Ca t’embête si je dors contre toi ?
Elle parut surprise mais fit « non » du visage. Ils étaient couchés, l’un contre l’autre, leurs bras fins collés ensemble. Yu comatait, le sommeil prêt à le faucher, lorsqu’elle demanda faiblement :
- C’est vrai que tu vas à la trayeuse plusieurs fois par jour, pour rien ?
- … oui.
- Et ça marche ?
Oui, ça marchait. Sa production de lait augmentait de jour en jour et s’il était encore loin d’atteindre les sommets des plus expérimentés, son corps acceptait de se montrer tout particulièrement généreux.
- Tu as déjà essayé ?
- Oui… J’ai tout tenté… Ce qui marche avec les autres… Ca ne fonctionne pas pour moi.
Elle semblait tellement triste en le disant qu’il se sentit vraiment peiné pour elle. Tranquillement, il lui demanda si elle accepterait de faire une expérience avec lui.
- Pour produire plus ?
- Oui… à terme.
- D’accord. Je suis prête à tout.
Il la gratifia d’un sourire, caressa doucement son épaule puis tout en la regardant dans les yeux, il descendit jusqu’à ses seins fatigués. Elle redressa un peu sa poitrine, la mettant en valeur et soupira de soulagement quand il s’en approcha pour les embrasser. Ses tétons étaient épais, un peu gonflés, mais doux. Les prendre en bouche fut une expérience étrange et sucer pour en tirer le lait fut relativement déconcertant, mais il le fit avec tendresse et passion. Lentement, dans son giron, il s’endormit avec son sein entre les lèvres.
Au petit jour, il l’invita à le suivre entre ses séances de traites, pour l’emmener à travers toute la couveuse. A force de questions, il parvient à la faire se confier sur les choses qu’elle aimait faire et ainsi, il se retrouva dans une zone de préparation, à aider d’anciens prétendants qui avaient été envoyé en cuisine. Elle lui montra comment sélectionner les ingrédients et comment appliquer des décorations. Ils passèrent plusieurs heures dans cet atelier. Ensemble, ils firent deux gâteaux spécialement prévus pour féliciter les plus jeunes. Yu en fit un sur le modèle de vaisseau Onabias pendant que la jeune Oom travailla sur différentes textures de sucre pour obtenir une transparence digne des Geresandres. Elle dut l’aider et le guider quasiment à chaque étape car c’était quelque chose qui sortait totalement de son domaine de compétence, mais alors qu’il retournait à la trayeuse, Yu se fit la réflexion qu’il avait apprécié ce petit moment de calme en cuisine.
Ce soir-là, ses propres seins étaient douloureux et il apprécia qu’elle les lui masse pendant qu’il reprenait son office, tirant sur un mamelon puis l’autre, se délectant des quelques gouttes qui venaient parfois le surprendre. Il fallut quelques jours encore pour qu’une autre ne s’approche et ne demande s’il voulait un peu d’aides ce qu’il accepta avec joie. A tour de rôles, ils s’accrochèrent à la poitrine fatiguée pour l’embrasser et la suçoter doucement. C’était le seul mot d’ordres : de la douceur et idéalement du plaisir.
Chaque jour, ils se rendaient ensemble devant le tableau de production qui annonçait le classement et les statistiques complètes avec jusqu’à la composition exacte du lait de chacun. Elle l’accompagnait, la tête un peu basse, puisqu’elle ne produisait plus rien du tout. Yu lui avait conseillé d’arrêter d’aller à la trayeuse au moins quelques jours et au point où elle en était, elle ne risquait plus rien. Le jeune homme quant à lui voyait la quantité et la qualité de son lait augmentait et tranquillement se stabiliser. Il faisait à présent parti des meilleurs de sa section, malheureusement, pour y parvenir il s’imposait plus du triple de passages en trayeuses et ses seins peinaient à suivre ce rythme drastique.
Dans quelques semaines à peine, le conseil de la laiterie serait appelé auprès de l’Akoutie et l’un des meilleurs producteurs serait envoyé comme porte-parole pour relater les problèmes, les soucis divers et proposer des solutions potentielles. Ce serait sa chance d’accéder à celui dont il rêvait, chaque nuit, mais pour cela, il devait se dépasser et poursuivre son programme d’entraînement. Malgré tout, il s’imposait des pauses et tentait de remettre sur pied, la jeune Oom en continuant à lui faire faire des activités gratifiantes. Peut-être qu’après bien des sessions, il pourrait réussir un gâteau sans aide ?
Régulièrement, ils en faisaient un immense, qu’ils ramenaient à la laiterie pour le partager avec les autres. C’était un moyen de souder les liens dans un groupe qui resterait ensemble. Yu se surprit à offrir des surnoms aux uns et aux autres. Sa protégée devient « sucre », à cause de ce goût si particulier quand il lui offrait des caresses buccales. A croire qu’elle aimait se badigeonner de sucreries, dans le plus grand des secrets. Une autre fut nommée « deux » à cause de sa production journalière des plus régulières. L’un des rares autres androgynes fut surnommé « Ona » à cause de son attirance des plus singulières envers les Onabias. Qu’ils ne soient pas nommés ne changeaient pas la réalité des choses. Ils n’étaient plus du tous des interchangeables et des liens se forgeaient entre eux.
Ces liens se voyaient plus particulièrement dans les moments de repos où chacun vaquaient à des occupations diverses, parfois ensembles, et dans les moments d’entrainement où certains venaient les aider, les encourager. Yu aimait particulièrement ça. Il aimait se sentir beau et désirable à leurs yeux. Il aimait les caresses et les encouragements. Il aimait également les surprises et les fantaisies des uns et des autres.
Petit à petit, à chaque entrainement, il se retrouva un peu plus entouré. Son envie, son ambiance, n’éclipsait personne au fond. Cela aurait pu créer des clivages ou des jalousies, mais ce ne fut pas le cas car la manière dont il s’offrait aux machines pour tenter d’accéder à son rêve était trop intense et complète pour réellement laisser indifférent. Ainsi, couché sur la machine qui l’excitait et le sollicitait tour à tour, il put gouter à la sensation de mains sur sa peau, de caresses tendres au creux de ses reins et d’encouragement à ses oreilles.
Il se perdait régulièrement dans les sensations, offrant gémissements et cris en fonction de stimulations. Lors d’une séance, quelques doigts curieux vinrent se glisser au côté de l’appendice pour écarter ses chairs intimes. Ils le caressèrent, le malaxèrent jusqu’à ce qu’il se sente fondre et alors qu’il aurait cru ne pas pouvoir ressentir plus tant il était bombardé de sensations diverses, une bouche vient glisser sur son pénis, avant de l’englober de la plus délicieuse de façon. Lorsque les appendices relâchèrent ses seins, le contact se poursuivit à travers d’autres lèvres plus douces encore et pour la première fois de sa vie, Yu se sentit véritablement aimé. Pas par un seul individu, mais par tout ce groupe qui le cajolait avec attention et dévotion.
- Merci. Chuchota-t-il.
Et pour seule réponse, on l’embrassa. Leurs langues se rejoignirent et dansèrent ensemble comme si elles se comprenaient parlant un langage de chair et d’envie qui lui était jusque là étranger. Il avait été éduqué pour la sexualité. Il avait été entrainé pour le coït. Il avait tant appris, volontairement, avec application. Mais c’étaient les premières fois qu’il découvrait ce qui pouvait se cacher réellement derrière les actes physiques. Et au lieu de lui faire plaisir, au fond, cette découverte le rendait triste car il aurait aimé la faire avec le seul et unique qu’il avait un jour désiré et qu’il continuait de désirer : Roch’mey. Il voulait que ce soit lui qui fasse naitre de tels papillons dans son ventre. Il voulait qu’il soit à l’origine de chaque fourmillement, chaque crispation, chaque mouvement involontaire de son corps. Pire encore, il voulait lui offrir tout ça à son tour.
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