Le motard disparu, prématurément.
Je suis né sur une île, où la circulation est débordante.
Chaque matin, en allant travailler, je croisais sur ma route, ce routier sympathique. Il conduisait un camion et faisait tous les jours, des allers-retours entre l’entreprise de poissonnerie et quelques hypermarchés de l’île.
Je voulais cette moto depuis que j’ai signé mon premier contrat de travail. Je rêvais depuis longtemps, de visiter l’île avec des copains motards.
Un dimanche, on s’est enfin décidé et on a fait ce fameux tour de l’île. C’était si agréable de voir défiler les arbres à toute vitesse. Mon esprit partait si loin. L’évasion était si intense.
À l’heure du déjeuner, on s’est arrêté à un restaurant. On a bien mangé, bien rigolé, on a échangé nos visions de la vie.
En file indienne ou presque, on a repris la route, en sens inverse. À un moment donné, je me suis retrouvé seul. Le groupe s’est dispersé en chemin. Faut bien, rentrer chez soi, n’est-ce-pas ?
Dans la soirée, j’ai eu envie de faire une petite balade sur le front de mer, toujours à moto. Mais la fatigue est apparue, alors je suis retourné chez moi.
Reprendre le boulot, surtout un lundi, c’est toujours compliqué. En plus, j’ai encore en tête ma ballade d’hier avec mes copains motards. C’était tellement enrichissant.
Je reprends quand même la route, mais cette fois pour aller bosser. Et encore une fois je me retrouve dans les embouteillages.
Je n’ai pas vu ce sympathique routier, avec son beau camion. Je me suis retrouvé de l’autre côté de la route, en moins de temps qu’il faut, pour un accouchement.
Je me suis réveillé dans les bras de ma jeune mère. Elle a attendu que je sois en âge de comprendre, pour me dire que je suis né dans la rue. Que j’étais un prématuré…
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