1 - Les étranges courriers (2/2)

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 Les jours qui suivirent furent un calvaire pour Édouard car il était constamment surveillé par ses parents. Mais ce comportement devint plus étrange encore quand il vit qu’ils ne faisaient pas que surveiller son attitude en classe.

En effet, avant de partir à l’école, Mme Vittel fouillait son sac et lui faisait les poches comme un vigile dans un aéroport. Édouard ne comprenait pas cette attitude qui le laissa perplexe. Et bizarrement, Ludovic ne comprenait pas non plus car il posa des questions à Édouard qui ne sut pas quoi lui répondre. Visiblement, cela le dérangeait de ne pas être au courant de ce qui se passait, lui qui aimait tellement avoir le contrôle sur tout.

Mais Édouard comprenait mieux maintenant quand il voyait sa chambre mieux rangée que lorsqu’il l’avait laissée. Sa mère devait la fouiller également. Mais pour trouver quoi ? se disait-il interloqué. Quelque chose ne devait pas tourner rond pour que M. et Mme Vittel agissent ainsi. Quelque chose de grave qui pourrait donner une mauvaise impression sur le voisinage.

Rapidement, Édouard n’en put plus de cette surveillance qui l’étouffait. Il avait l’impression d’être un animal féroce qu’il fallait absolument surveiller. Tandis qu’il vit Ludovic, libre comme l’air, sortir avec ses amis, Édouard devait rester confiné dans sa chambre sans la moindre raison à lire un chapitre entier sur l’algèbre.

Ce dernier était extrêmement jaloux de son frère. En fait, Ludovic avait tout ce qu’Édouard n’avait pas : un physique imposant, des notes plus que correct, une bande d’amis, une grande chambre, des vêtements toujours neufs et à sa taille et par-dessus le marché, on lui laissait faire tout ce qu’il voulait.

Depuis qu’Édouard fut jugé comme responsable du trou en plein milieu de la cour, tout le monde s’était mit à le détester. En effet, à cause de lui la saison de foot de Kevin était ruinée et pourtant, c’était la vedette de l’équipe.

A cause de lui, il était désormais interdit de jouer dans la cour tant que le trou ne serait pas rebouché. Ainsi, tout le monde était confiné dans les salles de classes parfois inondée par la chaleur du mois de juin au lieu de profiter de ce soleil. Pire encore, Lucie, une jeune fille de sa classe dont Édouard était fou amoureux, l’insultait à son tour.

Cette dernière était aux yeux d’Édouard la plus belle fille de l’école avec ses yeux bleus et ses cheveux bruns. Il pouvait passer des heures à la contempler, elle et ses petites manies. Son sourire étincelant de blancheur, son air radieux, bref, avant qu’elle ne l’insulta, elle était le seul réconfort d’Édouard. Mais maintenant c’était terminé. Il n’osa plus la regarder et préféra s’isoler en pensant à autre chose.

Heureusement, la fin de l’année scolaire approchait et Édouard venait d’apprendre qu’il passerait en classe supérieur, de justesse. Ainsi, l’année suivante, il entrerait au collège, le même que son frère, et il comptait bien se faire des amis là-bas. La rentrée en sixième serait l’occasion pour lui de se rattraper et de rencontrer de nouveaux élèves venant des villes alentours.

Il se voyait déjà en train de se venger de Kevin avec ses nouveaux amis, sortir avec eux dans des fêtes d’anniversaires ou la fête foraine du coin comme le faisait Ludovic. Il voyait déjà les nombreuses cartes postales qu’ils lui adresseraient, remplir la boîte aux lettres pendant les vacances et le visage vert de jalousie de Ludovic qui n’en aurait jamais autant.

« Ah ! La vie sera tellement mieux, se répétait-il sans arrêt avec envie »

Avec un peu de chance, Lucie lui aurait peut-être même pardonné d’avoir cassé la jambe de Kevin et il pourrait enfin lui parler pour lui faire part de ses sentiments.

En effet, jusque là, il n’avait jamais réussi à lui décrocher un mot et pourtant, ce n’était pas faute d’avoir essayé. Lorsqu’il s’approchait d’elle, il souriait bêtement en attendant qu’un miracle se produise, mais elle semblait ne jamais avoir remarqué sa présence et s’en allait en faisant onduler sa magnifique chevelure dans les airs afin de rejoindre ses amies.

Malheureusement, on n’y était pas encore et pour l’heure, il fallait accepter que la fille qu’on aima vous ignorait totalement.

Mais il n’était pas encore en vacances, malgré le beau temps qui annonçait un été de plus en plus proche et de plus en plus rayonnant. Il y avait encore quelques journées de cours et une pluie de devoirs de vacances qui prédisait, malheureusement, un été studieux. Ainsi, Édouard n’eut aucun répit. Il fallait encore travailler à l’école puis travailler à la maison pour prendre de l’avance sur les devoirs de vacances. Mme Vittel tenait particulièrement à ce qu’Édouard passa ses journées à travailler plutôt qu’à rêvasser.

  • Regarde ton frère, répétait-elle sans arrêt en faisant référence à Ludovic. Lui il travaille bien à l’école, du coup il n’a pas besoin de travailler à la maison…

Édouard commençait à en avoir assez de cette rengaine à propos de Ludovic. Il était déterminé à découvrir le secret de sa réussite. Mais avant cela, il fallait terminer les exercices de calcul mental. Tandis que son esprit se perdait vers l’extérieur de la maison, il vit le facteur déposer le courrier dans la boîte aux lettres. Voyant là un prétexte pour sortir de la maison et se rafraichir les idées, Édouard prit l’initiative de chercher le courrier.

Dehors, il faisait un temps magnifique, estival, bien loin de ce que prédisait la météo. On entendait les oiseaux gazouiller gaiement dans les buissons et les jardins du voisinage se paraient de leurs plus belles fleurs.

Bien sûr, le jardin des Vittel n’avait rien de comparable puisque Mme Vittel y prêtait un tel soin et une telle attention qu’il faisait de l’ombre à ceux des autres. Il était vrai qu’elle ne cacha pas sa fierté d’avoir le plus beau jardin du quartier, selon un jury locale qui décernait ce prix tous les ans. Ainsi, Mme Vittel put exposer une magnifique collection de trophée sur la commode du salon.

Édouard, donc, alla chercher le courrier et regarda successivement chaque lettre. Il y avait une facture adressée à son père, de la publicité et une dernière lettre avec la mention « retour à l’expéditeur ».

Ainsi, La Poste n’eut pas trouvé le destinataire de cette lettre envoyée par Mme Vittel, puisqu’Édouard reconnut son écriture sur l’adresse. En même temps, un courrier adressée à « qui que vous soyez » n’allait pas aider La Poste à retrouver cette personne. Bref, tout en se dirigeant vers la maison, Édouard, de nature curieuse, ouvrit cette étrange erreur qu’aurait faite sa mère.

« Ce n’est pas son genre, se dit-il en dépliant le papier, elle qui est si méticuleuse habituellement, comment aurait-elle pu faire une erreur pareille ? » Mais lorsqu’il lu le papier, son inquiétude empira.

« Qui que vous soyez,

Sachez que vous faites erreur, vous vous êtes trompés de personne, laissez ma famille tranquille.

Mme Vittel»

La lettre ne contenait que cette phrase pour le moins étrange. Qu’est-ce que cela pouvait bien signifier ? Pourquoi Mme Vittel aurait-elle écrite cette menace ? A qui voulait-elle l’adresser ? Était-ce une nouvelle facétie dût à son comportement étrange ? Édouard n’en eut pas la moindre idée et il décida d’en avoir le cœur net, une bonne fois pour toute. De retour dans la cuisine, il posa le reste du courrier sur la table et fixa sa mère qui préparait le ragout du midi.

  • M’man, fit-il en lui tendant la lettre qu’elle avait elle-même écrite. Ils ont renvoyé une lettre que tu avais écrite.

Mme Vittel se retourna et prit la lettre des mains d’Édouard. Elle retrouva alors cette attitude étrange qui trahissait une grande inquiétude. Bizarrement, ces premiers mots furent à l’attention d’Édouard.

  • Et toi, tu n’as rien reçu ? dit-elle d’un air paniqué qui ne lui était pas propre. Tu n’as pas reçu de lettre bizarre, dis-moi !…

Édouard, interloqué, fit non de la tête en se demandant bien ce qui pouvait arriver à sa mère pour qu’elle fut aussi stressée. Elle poussa un profond soupir de soulagement et aussitôt, elle reprit un ton naturel et sévère qu’Édouard connaissait bien.

  • Mais qu’est-ce qu’il te prend d’ouvrir le courrier des autres hein ? hurla-t-elle comme à son habitude. Mais qu’est-ce qu’on va faire de toi ?

Édouard se fit encore rouspéter mais ça ne le dérangeait pas plus que ça car au moins, sa mère avait retrouvée un comportement normal. Malgré tout, il dût copier cent fois encore « je ne dois pas ouvrir le courrier des autres »

Ainsi, le mois de juin se finit par ces étranges courriers que Mme Vittel et son mari brulaient dans le barbecue en prenant soin de ne pas se faire remarquer, et par ce retour de lettre pour le moins suspect qu’Édouard venait de remarquer. Que se passait-il chez les Vittel ? Pourquoi tant de mystère pour du courrier ? Cacherait-on quelque chose à Édouard ? Tout cela resta un mystère, mais plus pour très longtemps car bientôt, la vérité allait exploser.

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