2 - Le lettre explosive (2/2)
Quelques instants plus tard, installé à son bureau, il mit son plan à exécution. Il griffonna un mot sur un bout de papier qu’il prit soin de faire jaunir dans du café avant de le faire sécher à l’aide de son vieux ventilateur. Il saupoudra la lettre avec une bonne dose de poivre et mit le tout dans une enveloppe elle-même jaunie par le café. Il voulait prendre son frère à son propre piège en lui envoyant à son tour une lettre piégée.
Ainsi, confiant de la réussite de son plan, Édouard glissa sa lettre par l’entrebâillement de la porte de la chambre de son frère et fila à toute vitesse vers la sienne. Il colla son oreille contre la porte pour s’assurer que son plan avait bien fonctionné. Il entendit son frère se déplacer puis ouvrir l’enveloppe.
- Atchoum !... mais qu’est-ce que ... A…A…Atchoum !
Édouard éclata de rire, le poivre chatouillait les narines de Ludovic qui ne cessait d’éternuer, tout marchait comme sur des roulettes. Cependant, quand il entendit la porte de la chambre d’en face s’ouvrir à la volée, Édouard sauta dans son lit, attrapa un livre et fit semblant de lire. Ludovic entra en trombe dans la chambre, le regard courroucé et le nez aussi rouge que celui d’un clown.
- Mais qu’est-ce qu’il te prend ! hurlait-il en reniflant… A…A…Atchoum ! T’es tombé sur la tête ?
- Ça t’apprendra à me faire des blagues de mauvais goût ! répliqua Édouard par-dessus son livre qu’il tenait à l’envers.
- Ne rigoles pas, ce n’est pas drôle du tout… A…Atchoum ! Et puis, qu’est-ce que je t’ai fais d’abords, et qu’est-ce que tu as mis dedans, imbécile…Atchoum !
- Qu’est-ce que ça change ? répliqua Édouard qui commença à élever la voix. Toi tu mets bien des pétards dans mon courrier !
- Quoi ? dit-il avec incompréhension. Mais de quoi tu me parles ? Faut te faire soigner mon vieux !
Ce fut alors que, tout en éternuant, Ludovic se rua sur son petit frère, lui arracha le livre des mains et lui tordit le bras pour lui faire mal.
- Aïe ! hurla Édouard qui se tordait de douleur, arrête, tu me fais mal !
- Oh, c’est vrai ? Excuse-moi, dit-il avec ironie tandis qu’il serra un peu plus fort.
- AAAAAAAïe !
Ludovic profita de l’avantage physique que lui accordait son âge et sa corpulence pour le faire savoir à Édouard qui était plus jeune et plus petit. Ce dernier avait bien crut que son frère allait lui arracher le bras. Mais finalement, il lâcha prise et s’éloigna en le menaçant.
- Tu vas me le payer... Atchoum !
Et il quitta la pièce la main sur le nez laissant Édouard seul avec son bras endolori.
Peu de temps après, en milieu d’après-midi, Édouard décida de se venger avant son frère en lui préparant une petite surprise. C’était une bombe de peinture faite avec un ballon de baudruche prête à répandre une mixture verte sur Ludovic. Il s’installa à sa fenêtre ouverte et attendit que son aîné rejoigne le jardin.
La bombe de peinture entre les mains, Édouard attendait le moment fatidique où il devra la lâcher. Finalement, le moment tant attendu arriva quelques minutes plus tard. Ludovic ouvrit la porte du jardin et sorti. Quand il fut sur le paillasson, Édouard lâcha sa bombe qui alla s’éclater sur le sol, un étage plus bas, à quelques centimètres de Ludovic. Ce dernier, qui ne s’attendait pas à ça, resta bouche bée, immobile, prenant conscience qu’il était couvert de peinture.
- Édouard ! hurla t-il tandis que l’appelé éclata de rire dans sa chambre.
Ses éternuements dût au poivre venaient à peine de s’estomper qu’il se retrouva couvert de peinture gluante de la tête au pied. Mais son fou rire s’arrêta net quand il entendit Mme Vittel hurler de colère.
- QUI A FAIT CA !
C’était un cri strident à faire froid dans le dos qui aurait put réveiller tout le voisinage. A ce moment là, Édouard craignit vraiment pour sa peau. Qu’allait-il lui arriver maintenant qu’il avait fait, sans doute, la plus grosse bêtise de sa vie ? En une fraction de seconde, Mme Vittel se retrouva dans la chambre d’Édouard le visage plus assassin que jamais.
Inutile de préciser qu’il reçut la punition de sa vie ce jour là. Cette fois-ci, recopier des lignes n’auraient pas suffit à lui faire comprendre la leçon. Il passa le reste de la journée à réparer les dégâts qu’il avait causés. Il y avait de la peinture partout, sur le sol, les murs et même à l’intérieur de la maison.
De plus, le mélange des différentes couleurs avaient donné au vert un aspect plutôt dégoutant. Il dut tout nettoyer à l’aide d’une brosse et d’un savon. Il fallait faire très vite avant que la peinture ne sèche et ne s’incruste totalement sur le mur.
Il avait même dut nettoyer les vêtements de Ludovic à la main ainsi que les draps blancs qui étaient à sécher dehors. Ce soir là, il mangea seul dehors en finissant sa punition avant de pouvoir aller se coucher.
Il finit tard le soir, le soleil s’était couché depuis déjà bien longtemps. Éreinté, il se dirigea vers sa chambre en trainant les pieds et s’écroula sur son lit sans prendre le temps de mettre son pyjama.
Il s’endormit aussitôt et plongea dans un rêve étrange qui le conduisit à se retrouver dans une calèche tirée par d’immenses chevaux ailés. Il portait un accoutrement ridicule et, autour de lui, se tenait d’autres enfants de son âge qui portaient les même vêtements.
Le carrosse roulait tranquillement dans la nuit tandis qu’Édouard remarqua à l’extérieure, d’autres carrosses tirés par ces immenses chevaux ailés. Il percevait au loin des statues en marbre blanc et des chandelles éclairant ce qui semblait être des bassins remplis d’eau. Selon lui, ils devaient traverser un sublime jardin à la française.
Les carrosses s’arrêtèrent enfin laissant tous les enfants descendre sur une cour pavée. Édouard descendit à son tour, c’est alors que sa vue se troubla mystérieusement.
Soudain, alors qu’il allait découvrir dans quel endroit extraordinaire il se trouvait, une lumière aveuglante vint le perturber l’empêchant d’en savoir d’avantage. Il comprit alors que c’était sa mère qui venait de le réveiller en ouvrant les volets. Il était déjà huit heure du matin et Édouard avait l’impression de s’être couché il y a seulement vingt minutes.
- Debout ! lança Mme Vittel sans se retourner. Vas prendre ton petit déjeuné, ta punition n’est pas terminée, dépêche-toi !
Et elle s’éloigna dans son habituel robe de chambre d’un rose criard tandis qu’Édouard se leva péniblement, lui qui serait bien resté quelques minutes de plus au lit.
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